Mlle Anaïde

« Si votre imagination de bourgeois confiné dans ses intérêts n’était pas atrophiée, vous sentiriez comme moi la grandeur épique du bouleversement qui se prépare. Voyons, mais c’est formidable ! Le déferlement des masses galvanisées, la ruée des faubourgs sur les quartiers cossus, les violences, l’assouvissement, le sang des riches, les bourgeois qu’on égorge, les cadavres piétinés, quelle gueule ça aura ! Et la poésie de toute cette populace avide de vengeance, vautrée dans un silence bestial, saoulée de sang et de gueulements. Mais c’est fantastique ! Ah ! Tant pis pour qui n’est pas de son époque . Moi, j’en suis. Je serai certainement pillée, violée, éventrée, égorgé, mais j’aurai été dans le bain, je sombrerai dans la poésie barbare d’un orage de sang et de colère.

– Ma pauvre amie, vous vous montez la tête. Votre révolution est d’un modèle périmé. En ce qui vous concerne, je doute que la réalité se conforme à cette image d’Épinal. Puisque vous semblez y tenir, je veux bien que soyez violée, mais pourquoi égorgée ? Je vous vois devenir, avec plus de vraisemblance, bonne à tout faire dans un asile de vieillard ou dans un réfectoire d’usine, ce qui ne manquera peut-être pas de poésie non plus. Qu’en pensez-vous ?  »

De colère, Mlle Anaïde rougit jusqu’à l’échancrure du corsage. On voyait bien qu’elle aimait mieux être égorgée que bonne à tout faire.

Marcel Aymé, Le confort intellectuel, 1949
Photo : Karim « Beau comme une voiture qui brûle » Miské

15 réflexions sur « Mlle Anaïde »

  1. Lounès

    Karim Meskine attend tapi dans l’ombre que le massacre commence. Le feu, les CRS débordés, la destruction tout celà le fait jouir et le propulse dans un « sentiment d’irréalité ».

    Karim n’a aucune « street credibility » mais court après et cette description de l’époque ou il était un dingue avec ses potos de 25-30 ans qui fumaient des joints en rentrant du taf nous rappelle que nous ne sommes que des petits bourges coincés qui ne connaissent pas la vraie vie. Les références à Karim, Trainspotting et ce genre de merde sûrement http://www.youtube.com/watch?v=lm7IAQuN9YU

    Sur ces histoires d’émeute :
    Il ne faut pas s’en faire car les Anglais vont gérer ça comme des chefs à mon avis. Des preuves tangibles indiquent que la majorité de la population rejette intégralement ces actes, une attitude que l’on n’a pas vu clairement en France en 2005 lorsque tous ces Français moyens plus ou moins fascinés par la violence qui y allaient tous de leur petit vote de sympathie.

    Mais en Angleterre on a vu :
    – des groupes d’autodéfense spontanés se former
    – des groupes de citoyens anglais qui nettoient les rues spontanément pour marquer leur sens civique et leur amour du pays. Voilà un acte « positif » stricto sensu, et imparable, un acte qui marque bien la frontière entre les enculés et les honnêtes, entre ceux qui construisent et réparent et ceux qui détruisent.
    – une presse qui condamne fermement les émeutes(ça se mesure surtout non pas au contenu des textes mais aux choix des photos qui les illustrent, et c’est là un critère qui ne trompe jamais)
    – un pouvoir politique qui parle en premier lieu D’ARGENT et de coût des dégâts que le contribuable va devoir payer en remboursement. Ainsi l’Anglais moyen qui serait tenté d’admirer la noblesse de la voyoucratie va être calmé vite fait par le montant de l’addition
    – la structure très étalée des villes anglaises augmente le nombre de commerces de rue possédés par des petites gens. Ainsi les rues « appartiennent » à des gens qui ont un intérêt objectif à les défendre. Celà est impossible à Paris, ville bourrée de franchises dans des rues ou tout le monde passe mais personne n’habite.

    1. Rosco

      Exactement. Les Anglais sont pas tous complètement mous de la tripe, contrairement aux Français qui sont, regardons les choses en face, un peuple de cons qui mérite bien sa déchéance.

      ça ne fait pas plaisir à reconnaître, mais les Français sont une belle bande de lâches et plus je les regardent, plus je comprend le mépris dans lequel nous tiennent les Anglais.

      Quant aux Karim Meski divers et variés, pas étonnant qu’ils s’épanouissent dans un milieu aussi favorable à la veulerie et à la médiocrité.

      C’est bien triste, tout ça.

  2. Didier Goux

    C’est moi qui ai raté une marche (et perdu une case dans l’accident) ou bien les commentaires qui me précèdent n’ont rien à voir avec l’extrait de Marcel Aymé (excellente lecture, soit dit en passant) ?

    1. Lounès

      Oui mais lui il n’a pas le droit de parler de ce film voilà. Lui c’est une merde, un puceau de la vie qui se guinsse devant des voitures qui brûlent alors il n’a même pas le droit de citer Trainspotting pour justifier de sa sensibilité femelle pour le feu, élément yang par excellence qui attire les suffrages du yin (symbole du froid, de l’humide et du pourri) voilà.

  3. John Terby Jr

    Fascinant en effet… toute cete histoire de rosbifs et d’arabes qui se masturbent devant des bûchers d’Audi A4 est fascinante.
    Et savoir que des types comme ce Miské (serial killer en puissance: il avouait aimer torturer les chats dans un précédent article) finissent par enterrer des génies comme Marcel Aymé ou moi (pour un temps; la postérité est notre; mais la postérité, c’est pour les pédales) aide à relativiser et à devenir modeste. C’est toujours ça de pris…
    Par contre je confirme, Trainspotting c’est de la merde.

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