Je suis allé voir le film sur Omar Raddad.
En sortant je me suis avoué que, dans une cour d’assise, en tant que juré, je condamnerais Omar Raddad pour l’assassinat de Ghislaine Marchal.
Aujourd’hui comme hier et comme demain.
Il n’y a aucun moyen de faire autrement. Certes, on trouve des invraisemblances de partout dans le dossier. Certaines disculpant Omar Raddad, d’autres l’incriminant. Mais le niveau d’invraisemblance scénaristique nécessaire pour imaginer qu’Omar Raddad soit innocent se trouve être invraisemblablement plus élevé que le niveau d’invraisemblance de l’hypothèse de sa culpabilité. Autrement dit, le scénario de l’innocence d’Omar Raddad est nettement moins crédible que celui qui débouche sur sa culpabilité. Et de ce savant calcul d’invraisemblance positive et négative dépend largement le niveau de doute d’un juré en cour d’assise. On me répondra que le doute est supposé profiter à l’accusé. Sans doute. Mais chacun imagine bien que dans de telles affaires il existe forcément des doutes, des invraisemblances et des zones d’ombres. Il s’agit donc que le doute soit étayé un minimum et crédible.
Le doute doit ainsi être suffisant. En ce sens qu’il demande un peu de matière pour exister de manière raisonnable.
Autrement dit, les invraisemblances doivent être plus nombreuses en faveur de l’innocence d’un inculpé qu’en faveur de sa culpabilité.
Or, dans le cas d’Omar Raddad, les seuls doutes qui subsistent sur sa culpabilité sont soit déraisonnables, soit insuffisants.
Certes, le seul qui sache, ici, la pleine et entière vérité se nomme Omar Raddad. Mais il est douteux, vingt ans après les faits, qu’il consente un jour à nous la délivrer.
Si tant est qu’il s’en souvienne encore.
Quoiqu’il en soit, le scénario de l’innocence d’Omar Raddad demeure si rocambolesque et improbable jusqu’à aujourd’hui (sans parler des variations pittoresques de acteurs de sa défense depuis vingt ans), qu’il devrait rendre de tardifs aveux de sa part superflus.
Sauf que.
Par charité d’âme on passera sur le fait que le film de Roschdy Zem n’ait ni grâce, ni rythme ni intérêt. C’est long. C’est chiant. C’est mal fait au point qu’on ne peut s’empêcher par moment d’en rire. C’est largement subventionné. Nous sommes donc en présence d’un vrai film français.
Il y a des amateurs.
Mais on se permettra d’observer tout de même que la seule chose que le film démontre, et avec constance, c’est l’incapacité des défenseurs d’Omar Raddad à proposer une alternative crédible à la culpabilité de leur poulain.
Roschdy Zem se retrouvant obligé de produire quelques plans volontairement flous et rapides pour introduire subrepticement -si j’ose écrire- l’idée que la porte derrière laquelle Ghislaine Marchal était barricadée aurait pu l’être de l’extérieur. C’est à dire par quelqu’un d’autre que Ghislaine Marchal. Pourquoi ce flou ? Il était difficile de faire autrement puisque personne n’a été capable de reproduire dans les conditions réelles ce tour de force.
Pourtant, tout, absolument tout, repose in fine là-dessus, sur ces fichues portes de la cave.
De même, le réalisateur laisse subtilement entendre qu’il faudrait rechercher du côté de la femme de chambre ou de la famille de la victime ou encore d’un énigmatique 4×4 rouge. Mais sans s’y arrêter car, là encore, les enquêtes, qu’elles soient policières ou autres, n’ont jamais pu avancer quoique ce soit de solide -ou même de troublant.
Mieux vaut alors, comme le dit Pierre-Emmanuel Vaugrenard dans le film (Jean-Marie Rouart dans la vie), s’attacher à démontrer que le doute est omniprésent et que des éléments ne collent pas. Par exemple, a-t-il eu le temps matériel de commettre le crime ? Le film laisse entendre que ce n’est pas possible. Ah ? Bon. La défense d’Omar a-t-elle jamais démontré cette question dans le monde judiciaire ? Non.
Le film entier est ainsi constellé de la vacuité de la défense mais son véritable fil est ailleurs. Son fil est Omar. Omar qui pleure. Omar qui essaie d’écrire dans l’obscurité. Omar et sa famille. Omar et ses enfants qui pleurent. Omar et cette gueule qui serait celle de l’innocence. Vous savez, de cette innocence muette qui ne vaut pas moins qu’une qui vitupère, mais qui, ici, brusquement, serait devenu une preuve. Omar, ce jardinier si gentil tellement apprécié de ses patrons. Omar dont les voisins ne peuvent pas imaginer, divine surprise, qu’il ait pu commettre un meurtre.
Omar ou la construction d’un innocent.
> « Omar qui essaie d’écrire dans l’obscurité. »
Après avoir lu une de ses interviews (« Omar Raddad parle » dans nos liens d’actualité), j’ai essayé de reproduire cet « Omar m’a tuer » qu’il disait impossible d’écrire dans le noir, même en essayant des milliers de fois.
Pour ma part j’ai essayé deux fois. Je pensais que ce serait difficile. Et en fait non, l’écriture est impeccable dès la première fois. Alors je tente une seconde fois pour éviter le coup de chance, sait-on jamais. Même chose, aucun souci, les lettres se détachent et sont parfaitement lisibles. C’est à la portée de tout le monde sans entrainement de ninja.
Admettons que ce doit être plus difficile avec des blessures mortelles et en perdant son sang, mais là j’ai déclaré forfait pour une reconstitution.
En plus, ce machin pelliculaire de mâtons de Panurge a sans aucun doute été subventionné à 100% par le contribuable béat de base (moins de 50% des foyers français quoi et 100% qui ne le verront jamais — volontiers — en plus). C’est vrai que la vérité vraie, nue, historique, Dreyfus-à-poil-devant-le-prisu n’a pas de prix, même unique. Omar à bout de ficelle.
Rompez.
La vraie question est : comment un individu bien-portant peux aller voir un film pareil ? Ca tient du surnaturel cette affaire : perdre 1 h et demie de sa vie pour aller voir un moustachu analphabète à oil-pé écrire son nom dans le noir. Moi, on m’avait traîné pour voir « Elle s’appelait Sarah », j’en fais encore des cauchemars. Alors j’imagine vous. Vous êtes insomniaque ou quoi ?
De toute façon qu’il soit coupable du meurtre ou pas, je le condamne à la peine de mort quoi qu’il arrive. Ca ne se fait pas de porter une moustache et des pulls pareils en 2011. Sauf si on s’appelle Didier Goux.
Regardez plutôt Elle s’appellait Scorpion, c’est un bon documentaire sur l’univers carcéral japonais, et un film coup de poing contre le machisme. Ou alors c’est un film d’exploitation fun.
Un film sur des prisonnières ? Le dernier que j’ai vu c’était The Big Doll House, avec les gros seins de Pam Grier à l’air sous la douche. Du bon nanar, blaxploitation fun.
Oui un WIP (women in prison).
@ Grödion : « comment un individu bien-portant peux aller voir un film pareil ? » Il faut surtout être bien-pensant TM pour faire un truc pareil. Votre naïveté m’effraie Grödion : six mois de corvée de patates (avec votre bitte si vous n’avez pas de couteau). Exécution.
Rompez.
Général croyez-vous vraiment faire récurer les chiottes à une graine de déserteur comme moi ? L’armée française est tombée bien bas, plus en phase avec la réalité. Ô vous les ronds-de-cuir sortez de vos bureaux, la vie a bien changée !
Général, j’ai ce ce qu’il faut sinon : c’est la nuit du long couteau !
@ soldat Grödion : Et puis d’abord, je ne suis plus Français (et toc !) En plus, je préférerai toujours « la nuit du longues bittes » à la nuit des longs couteaux, c’est sûr. (question de fourreaux^^)
Vous n’êtes plus Français ? Vous êtes un chef de bande ? Un condottiere courant le cachet ? Un général d’armée mexicaine ? C’est la Revolucion, le clown Zapata et le jongleur Pancho Villa sont vos seuls hommes disponibles, le reste de la troupe décuve au Titty Twister, en très charmmnte compagnie :
http://www.youtube.com/watch?v=KD12OgQ3uAY
Non, pire, plus sinistre et plus moins drôle que ça : je suis général de l’armée de l’Apocal’Hips : je suis un archange exterminateur de comptoir (bref, un pôvre con comme toi et moi) Rompez (PS : les épluchures de patates, pas plus de 5 mm, sinon on va tous se faire gronder par XP et là, je ne te raconte pas… Mais tu sais)
Oui mais lui, il n’a pas les lunettes vert fluo qui font toute la différence !
Omar Raddad ne m’intéresse pas. en cire moins Jean Ma
encore moins Jean Marie Rouard, avorton tératologique né de la rencontre de deux éprouvettes où se trouvaient des fœtus de Chateaubriand et de Zola. Par contre, le cinéma japonais, oui, lui, il m’intéresse. Je pense subito en lisant les coms qui l’évoquent à ce film incroyable que j’ai vu en vidéo « Cimetière de la morale ». C’est complètement barge sanglant mais beau comme le destin d’un suicidé dans une chanson gitane, l’histoire d’un Yakuza drogué qui brise toutes les règles. Un film incroyable, dans sa violence, son souffle épique déjanté, sa folie. Me demande si quelqu’un d’autre l’a vu…
J’étais sur le point d’écrire des tas de saletés sur ces b**gn**les qu’il faudra envoyer à l’échafaud avec ces salopes du showbizz, mais là, de lire quelqu’un qui apprécie Fukasaku, ça me réjouit !
Il faut voir aussi Combats sans code d’honneur, tout aussi génial, et, dans une moindre mesure, Okita le pourfendeur ou Kamikaze club.
Pour info, c’est le même qui, à un âge avancé, a réalisé le fameux Battle Royale (ou la solution idéale au problème des cpf).
Dans un genre plus lyrique et déjanté mais toujours sombre et violent, il y a les films de Seijun Suzuki : La jeunesse de la bête, Le vagabond de Tokyo, Élégie de la bagarre.
Guerre des gangs à Okinawa de Fukasaku est pas mal aussi. Mais il vaut mieux éviter Le lézard noir même si Mishima y apparait en compagnie de Akihiro Miwa, acteur et drag queen, qui y interprète une voleuse, et dont on soupçonne qu’il fut l’amant.
Je ne suis pas surpris que tout le monde ici cultive d’excellentes références. ^^
Quand la fine fleur du nationalisme lyrique et sans concession se tape des travs, c’est vraiment la preuve qu’être pédé, c’est un vice, et pas seulement une inclinaison naturelle particulière.
je ne connais pas restif mais je vias m’empresser de le voir…si je le trove. En parlant de film fou et dérangeant sans parler ni de emprise, ni d’un truc comme irréversible, mais d’un truc salement malsain qui s’appelle a serbian film…
Ah, je pense que vous apprécierez Cherea.
http://www.sancho-asia.com/articles/le-cimetiere-de-la-morale
Je viens de trouver ça. Mais j’ai peur que ça en dise trop. Non, finalement, mieux vaut se prendre le knock-out direct. Ce n’est pas Old Boy (pas jap d’ailleurs) mais il y a bien cette surchauffe d’une âme en destruction, partie dans une odyssée massacre qui ici n’a peut être plus vraiment de but..
Et moi je va m’intéresser à votre Serbian film. Il est bon de se refiler ces pistes de contact avec ce type de films qui échappent aux radars habituels!
Je le cherche depuis un moment…
Y’a La Rivière noire de Kobayashi qui est un sacré film aussi. Et les polars de Kurosawa : Entre le ciel et l’enfer, Les salauds dorment en paix et Chien enragé. En parlant de Old Boy, Restif, son réalisateur a signé Sympathy for Mister Vengeance qui s’inspire grandement d’Entre le ciel et l’enfer, de Kurosawa. Une réussite.
Par contre hier j’ai revu Yakuza de Sidney Pollack, putain quelle daube, d’une lenteur abominable ! J’ai honte d’avoir apprécié ça la première fois que je l’avais vu (en 2003 à l’époque du tintamarre Kill Bill). Un supplice.
Intéressant rappel à l’affaire DSK. Après la présomption d’innocence, suit souvent la présomption d’erreur judiciaire. En France, ni l’inculpation ni le jugement n’ont de réelle importance; dsk restera un innocent possible tant que ceux qui voudront y voir du doute y verront du doute. Finalement dsk ne deviendra coupable que quand l’opinion publique l’aura complètement laché. La justice en France, c’est un peu cela: l’avis à un moment donné d’une minorité médiatique active.
Sur l’affaire Raddad lire le livre définitif sur le sujet : Omar l’a tuée de Georges Cenci. C’est le capitaine de gendarmerie qui a mené l’enquête de A jusqu’à Z. Il connait l’affaire comme personne. Tout y est expliqué, décortiqué, les soit disant zones d’ombre (qui n’en sont pas)tout y est. Les éléments irréfutables sont là. Omar Raddad a bien tué Mme Marshal. Il n’y aucun doute sur le sujet.