Le gouvernement vient d’annoncer une série de mesures pour lutter contre « l’insécurité routière » :
- Les panneaux indiquant la présence de radars fixes seront supprimés et les cartes d’implantations ne seront plus rendues publiques.
- Dans la même logique, les avertisseurs de ces mêmes radars seront interdits.
- Les excès de vitesse de plus de 50 km/h seront désormais qualifiés de délits, dès la première infraction.
- L’alcoolémie supérieure à 0,8 g/l au volant sera sanctionnée par le retrait de 8 points, contre 6 actuellement.
- Les sanctions pour usage du téléphone tenu en main seront renforcées. La contravention de 2e classe (35 euros) sera remplacée par une contravention de 4e classe (135 euros). L’auteur de l’infraction sera sanctionné d’une perte de trois points contre deux actuellement.
- Les conducteurs de moto devront porter un gilet rétro-réfléchissant.
- L’obligation désormais pour les usagers de moto qui n’ont pas conduit au cours des cinq dernières années de repasser par la case formation.
Et l’on parle déjà de réduire la vitesse à 70km/h sur les routes départementales et à 30km/h en ville. Les kits main-libres sont aussi sur la sellette. Autant dire que conduire va devenir un peu compliqué…
Pour remonter aux prémices de ce tour de vis sécuritaire il faut se rappeler de la campagne présidentielle de 2002. A l’époque l’insécurité était sur toutes les bouches, cette thématique était devenue le principal thème de campagne, sur lequel le parti socialiste s’est brisé les dents. Lorsque les candidats de droite évoquaient l’insécurité, des images semblables à celle-ci apparaissait dans l’esprit des Français :
Aussitôt élu, Chirac, par un habile tout de passe-passe a métamorphosé l’insécurité (vols, agressions, émeutes) en insécurité… routière. D’un sujet épineux où se mêlent des thèmes sensibles comme la lutte des classes, le pardon, la rédemption, le racisme, l’immigration, l’intégration, il a substitué un thème rassembleur autour duquel tout le monde peut s’entendre. Personne n’est favorable à l’insécurité routière, c’est un sujet qui ne suscite pas de polémique partisane. C’est ainsi que ce sont multipliés les durcissements de législation. Les radars et les gendarmes ont fleuris nombreux sur le bord des routes comme les coquelicots au printemps.
Chirac passait ainsi d’un sujet difficile, où les résultats n’auraient pas été possibles sans une remise en cause profonde du système et des mentalités, à un domaine de répression qui allait devenir une vraie mine d’or. Accompagnée d’une bonne campagne de communication, et s’associant à un phénomène de société où la vie apparaît comme devant être de plus en plus protégée, cette substitution fut bien acceptée par la population. Tellement bien que le ministère responsable de cette prédation en règle sur les routes fut à son tour élu. Nos politiciens sont vraiment des businessmen de talent.
Aujourd’hui la logique budgétaire se poursuit, on augmente les contraventions, on saisit les véhicules, on multiplie les matières à sanction. On réprime la liberté avec l’assentiment quasi général et même presque avec de l’enthousiasme.
Cette manipulation digne d’un joueur de bonto est bien acceptée parce qu’elle rejoint un courant majoritaire au sein des populations. C’est une parfaite métaphore de notre continent ; un continent qui veut ralentir, décroître, qui fait semblant d’accorder un haut prix à la vie humaine alors qu’il ne s’agit que de taxe et de contrôle. D’une infantilisation où les individus abandonnent leurs libertés dans un espace de plus en plus réglementé et borné.
Dans le même ordre d’idée la voiture devient prohibée, plusieurs catégories seront d’ici peu exclues des centres villes. La voiture représente la liberté individuelle, la possibilité de s’extraire du collectif pour jouir de la vie. Pas étonnant qu’elle soit si haïe, comme le pétrole auquel on devrait pourtant quotidiennement déclamer de longues louanges. Notre réseau routier est pour l’essentiel celui des années 70, il a fort peu évolué ces dernières décennies, et les projets d’évolution ambitieux ont été liquidés alors que la pression sur le trafic s’accroit. Un moratoire est en cours sur la construction de nouvelles autoroutes. La politique de la ville se résume à supprimer des places de parking et à abandonner les voies à des couloirs de bus, de métro, à vélos, ou à les transformer en voies piétonnes. Les villes deviennent musées.
Faute de voies de circulation adaptées les routes sont congestionnées et les bouchons s’allongent à proximité des agglomérations. Des millions de personnes sont coincées dans les bouchons chaque jour. Du temps qu’elles auraient pu partager en famille, ou consacrer à sortir, à aller au restaurant, au cinéma, ou à faire du sport, etc., s’égrène dans le néant. On peut facilement imaginer que la part de croissance perdue doit monter à plusieurs points chaque année. La qualité de vie est doublement sanctionnée. D’une part ces personnes perdent leur temps ; temps qu’elles auraient pu consacrer plus agréablement. D’autre part c’est moins de temps pour consommer, moins de temps pour rester au travail en sachant qu’elles ont x temps de bouchons pour rentrer, donc moins de richesse créée.
Les politiciens plutôt que de chercher à résorber le problème s’emploient au contraire à l’accroître. Sans que cela ne suscite de révolte.
A noter, pour contempler l’étendue de ce délirant chantage, qu’on ne dit plus « insécurité routière » ce qui était déjà très drôle, mais « violence routière », c’est à dire qu’on ressort de sa cage le vocabulaire du réel-qu’il-faut-cacher pour l’accoler aux gens qui conduisent avec un kit mains-libres ou qui utilisent des gps, les transformant ainsi en de potentiels criminels ou tout du moins en sociopathes aggravés.
On peut rêver, mais je pense tout de même qu’une barrière est franchie, et, malgré cet infect chantage, une partie de la population émet quelques doutes. Enfin, disons qu’avant des élections, c’est un peu con.
C’est amusant, on dirait que l’Etat français a décidé de s’attaquer aux quelques points du Manifeste du Parti Communiste qu’il ne maîtrisait pas encore :
Le n°6, qui fait l’objet du billet de Vae Victis («Centralisation entre les mains de l’Etat de tous les moyens de transport»
Le n°8, habilement introduit par Wauquiez (« Travail obligatoire pour tous; organisation d’armées industrielles, particulièrement pour l’agriculture »)
Et le n°4 ( « Confiscation des biens de tous les émigrés et rebelles »), avec le tout nouveau projet de taxation immédiate des plus-values à l’encontre des émigrants.
(A noter toutefois, que, l’Etat ayant investi, ou plus exactement dépensé, des milliards dans l’automobile – et notamment, récemment, avec le FSA –, depuis la nationalisation de Renault, le point n°6 se trouve en partie contrecarré par les efforts mêmes des communistes et étatistes).
J’avais à l’époque trouvé ça tellement gros, je n’imaginais pas que les français, aussi cons soient-ils, avaleraient avec tant d’enthousiasme. Faut-il avoir le cerveau ramolli par la connerie des journalistes, si prompts à nommer chauffard tout ce qui roule trop vite à leur gout, pour gober ce tour de passe-passe. Encore, le coup de la lutte contre le cancer élevée au rang de priorité nationale, c’est vraiment un projet contre lequel on n’a rien à opposer (même si je trouve ça bizarre qu’on présente ça comme un des piliers de son programme politique). Mais transférer les compétences de Mouloud et Babakar derrière le volant de Gérard, c’est que le Gérard en a une couche comme ça pour accepter avec le sourire. Et le Gérard aime tellement ça, voyez-vous, que l’état s’emmerde même plus à le ménager et retire sans vergogne la signalisation des pompes à fric.
Bah, du moment que ça reste une lubie franco-franchouille, et que personne m’empêche de rouler à plus de 200 à l’heure sur mes Autobahnen et de générer un max de CO2, je veux bien que le Gérard se fasse traire. Malheureusement, j’ai bien peur que la connerie française ne devienne une valeur européenne.
cette évolution est tout à fait palpable, la sécurité routière est un sujet rassembleur…Ce qui est terrible, c’est que je n’ai pas entendu un intellectuel, un sociologue parler de « sentiment d’insécurité routière », alors que les mêmes connards parlent de » sentiment d’insécurité » quand un brave type raconte qu’il va voter FN car il n’en peut plus de vivre dans son quartier pourri,de se faire insulter.. et en général c’est le même type qui est ensuite qualifié de « potentiel assassin », ainsi assiste-t-on à ce retournement sémantique sans précédent: le pauvre type agressé dans son quartier n’est pas une victime de la sale racaille, mais bien un raciste en puissance, il a un mauvais ressenti et le même qui n’a encore commis aucun crime ou infraction est un probable futur coupable et doit être traité comme tel…restriction de ses mouvements, des ses possibilités, des instruments qu’il peut utiliser…
Toutes ces nouvelles mesures n’ont qu’un seul but : augmenter la part de recette pour l’état de ce filon qu’est l' »insécurité routière ». Les radars ne donnaient plus assez d’argent, alors en enlevant les panneaux avertisseurs, ça va à nouveau les rendre plus « pompes à fric » que jamais.
Conduire bientôt à 70 sur des routes départementales ou à 30 en ville va relever quasiment de l’impossible : on sera sanctionné à coup sûr avec ce type de mesure.
L’idée n’est certainement pas de rendre les routes plus sûres, mais de les rendre plus rentables.
Quelle découverte.
Mes conneries mises à part, et même si je ne sais pas qui sont ces gens, j’ai choppé ce lien chez les CAB du salon beige: http://www.liguedesconducteurs.org/quatre-verites-sur-les-radars.html?ctc=3442&ca=11KI20
« L’idée n’est certainement pas de rendre les routes plus sûres, mais de les rendre plus rentables.
Quelle découverte. »
Hum oui, c’est pas très subtil, je reconnais mais demander à une femme d’être subtile ou intelligente est à mon sens un peu audacieux, Bobophobe! Cette réflexion n’est pas fausse cependant, à défaut d’être un commentaire d’élite..
Vous me direz, pourquoi bavasser pour ne rien dire? Je répondrais : vous avez raison.
Oh, vous savez, je ne fais pas partie de l’élite des commentateurs. J’ai pour cela une culture générale et des capacités bien en dessous de la moyenne des intervenants. Votre conclusion m’étonnait un peu, c’est tout. Et puis, je voulais juste faire mon gros malin pour glisser mon lien, car je trouvais intéressant de voir combien ça pouvait rapporter.