Le Président de la République Sarkozy dit en tribune que l’État dépense trop, qu’il faudrait lui imposer une cure d’amaigrissement et de modestie, et les habituels donneurs de leçons de nous dire qu’il n’a pas à faire la leçon, que c’est à lui et son gouvernement de nous donner l’exemple et qu’il sera légitimé à tailler dans les dépenses publiques le jour où sa femme et ses ministres prendront le métro.
Ce genre de rhétorique est l’archétype de celles dont on pense qu’elles nous ont convaincu quand elles n’ont fait que nous intimider… Moi, voyez-vous, je ne suis pas sectaire, et je ne rejette pas à priori la thèse selon laquelle le Mammouth de l’Éducation Nationale va se mettre au régime tout seul dans la minute où le Président Sarkozy aura rendu les clefs de son Falcon et dès lors que son chef de cabinet viendra prendre son service en autobus, même si elle me semble farfelue, pour ne pas dire limite sortie d’asile, une fois résumée noir sur blanc…. Seulement, avant de me prononcer sur sa validité, j’attends des arguments, une explication nette prouvant qu’il pourrait vraiment y avoir un rapport de cause à effet.
Les partisans de la thèse curieuse selon laquelle l’exemple doit venir d’en haut cassent les couilles le matin, le midi et le soir à leurs interlocuteurs avec leur putain de Général de Gaulle qui nous disent-ils, payait sur sa cassette personnelle les gâteaux de ses petits-enfants le dimanche et faisait déduire de son salaire l’électricité qu’il consommait dans ses appartements privés, mais pour ma part, je suis enclin à me demander de quelle utilité a été cet exemple venu d’en haut.
Les faits sont là, tout ça n’a servi à rien d’autre qu’à façonner la légende d’un Général de Gaulle austère, à faire qu’il devienne un symbole d’austérité, que l’anecdote fasse office de sustentation spirituelle aux imbéciles, lesquels ont la particularité de ne se nourrir que de signes et de symboles…. Naturellement, il ne viendra jamais à l’idée d’un Mongaulliste que toutes les grimaces de leur grand homme n’ont abouti à rien de tangible, que le spectacle du militaire vivant à l’Élysée comme dans une caserne n’a pas empêché son régime de se transformer en Vème République immobilière et de faire grandir en son sein des Chirac bien plus capricieux et dépensiers que l’Agha Khan.
La vérité, c’est que les signes et les symboles sont l’affaire des nuls, des Mongaullo-souverainistes et des mauvais en tout, que le chef de l’État pourrait bien faire savoir aux correspondants de Life Magazine qu’il torche ses fesses avec des billets de cent euros sans perdre son droit légitime à s’attaquer aux dépenses publiques à la scie à métaux…. La crédibilité du Prince qui prétend rabattre les prétentions de ses fonctionnaires ou de ses barons et combattre le fléau du gaspillage dans le Royaume, elle se juge à sa volonté de s’imposer une diète de popularité, pas dans sa propension à faire le clown en couchant sur une planche de bois, pas plus qu’à répondre aux sentiments d’inégalités pour complaire aux chroniqueurs sans talents, aux merdes de la République des Arts et Lettres ambitionnant d’être Joinville ou Saint-Simon…
Il a été question dans cette montaignerie du rapport des foules à la vérité, ainsi que du niveau de la dispute sorbonnarde quand elle est calibrée pour séduire l’homme de la foule fraîchement envoyé dans les collèges et les facs, voire même quand elle est façonnée par ces foules en sous main via des éditorialistes et des Docteurs es Lettres au QI de 104 ayant accédé à leurs chaires en répondant aux critères de la méritocratie républicaine, c’est à dire en bachotant comme des ânes…
Au XXIIème siècle, les historiens honnêtes tiendront la méritocratie républicaine mijotée par les hussards noirs de la République pour ce qu’elle est, à savoir le brouillon de cette positive action qui lui a logiquement succédé… Dans la version originale, il s’agissait de récompenser l’homme de la foule qui se donne la peine d’apprendre par cœur et de singer l’aristocratie, tandis qu’ensuite, il n’a s’agi que de reconnaître son mérite d’être plus foncé qu’un européen… dans les deux cas, l’exercice aura consisté à mettre une couronne sur la tête d’un vilain, à déplacer les bornes et créer du désordre …. On a commencé par demander à l’homo faber de passer des nuits blanches à potasser Aristote et l’apprendre par cœur avant de l’autoriser à parler d’Aristote à des élèves, puis on a envoyé des noirs et des arabes à Science Po…. Aux premiers, on n’a demandé presque rien, et aux seconds, on ne demande rien du tout, si ce n’est de mettre une chemise propre…
C’est ce qu’on appelle une pente naturelle.
C’est pas Giscard qui donnait l’exemple en invitant à l’Elysée les eboueurs pour des petit-déjeuners? L’égalitarisme mis en pratique par le premier homme de l’Etat. On peut pas dire que ça l’ait beaucoup aidé, l’exemplarité
Ce texte m’amuse beaucoup : c’est vrai que l’exemplarité du rendu du Falcon par le Président pour faire fondre le Mammouth de l’EN paraît… improbable.
Mais tout de même! (Et la c’est la crevette mère-de-famille-puritaine qui parle)l’exemple, ça compte…
On ne donne pas l’exemple pour attendre quelque chose en retour , l’exemple est un sacrifice . Parfois stupide , parfois un gâchis immonde , parfois infroductif , inconséquent .
Le sacrifice est la preuve uprême de notre individualité , il ne doit pas être pris en exemple .
Je crois que c’est un des souverains du Portugal qui disait » Je suis le Roy des rois , pas le serf des serf . »
Nous sommes pour l’instant en république , nous avons un chef d’état qui ne s’assume pas . Il n’y a rien de honteux à aimer l’argent , pour un laique . Mais qu’il surfe sur la vague du moment , tour-à-tour néo-galliste , droitard déconplexé , souverain proche du peuple , idéaliste , indigné , jouisseur-sans-entraves , partisan de la raison , puis admirateur de la foi , puis républicain , cela me dérange .
Le sacrifice appartient uniquement au sacrifié .
Cela me fait penser à une scène du président , avec Gabin et Blier .
– » Croyer-vous que vous feriez un bon président ?
– Pas plus mal qu’un autre , je crois .
– Quand on a pas plus d’ambition qu’c’a on gère une boutique , pas une Nation !!! »
Nos arrières petit-enfants riront probablement de cette période , s’ils sauront encore lire …
« Nous sommes pour l’instant en république », pour l’instant en effet