Plutôt que de se retrouver dans un café avec des gens qui ont comme seul point commun que vous d’avoir acheté le guide du routard, il vaut mieux découvrir des villes ou des régions à travers un écrivain de romans noirs…vous saisirez bien plus certainement l’essence de la ville à travers les pages gribouillées par un romancier du cru que par les connards du routard si bien enfoncés par Houellebecq.
Marseille: JC Izzo, un gauchiste désabusé mais encore un peu niais que Fabio Montale…La trilogie marseillaise vaut essentiellement par Chiourmo, éventuellement Total Kheops…et vous aurez les plus beaux coins de la région et comment y accéder…et là où partir à la pêche avec en prime quelques bordels.
La Sicile: Andrea Camilleri, n’importe lequel de la série des Montalbano et puis en plus ce sera un voyage largement gastronomique…caponetta, couscous de pesce, tagliattelle alla siracusana…On peut aussi lire Leonardo Sciascia, même si c’est plus limité. Enfin un petit jeune, Piergiorgio di Cara, qui à travers deux romans, L’âme à l’épaule et Verre froid, ballade son personnage de flic anti-mafia de Sicile en Calabre, de Cosa Nostra à la N’drangheta. Ici pas de parrain comme dans les films, mais des boss, des longues heures de filature et d’écoutes, une violence rare et sacrément barbare.
Barcelone: on peut suivre les traces de Pepe Carvalho, c’est également un voyage gastronomique…je ne suis pas fan, mais ça passe comme une bière fraîche en plein été…on boit, on passe un bon moment et on oublie…Andreu Martin aussi avec Barcelona connection…
Scandinavie: évitez l’affreuse trilogie Millenium…préférez Henning Mankell, le personnage m’énerve avec ses engagements à la con, à voir des nazis partout…il a récemment fait partie de la flottille de la paix ( sic), son personnage Wallander est pas mal et vous découvrirez la Suède provinciale et même les rives de Riga…et ça vous passera l’envie d’y passer vos vacances…Pour la Norvège et principalement Oslo, vous suivrez les pas de Harry Hole sous la plume de Joe Nesbo…Pour l’Islande ( oui, je sais c’est pas en Scandinavie…), il y la nouvelle star venue du Froid Arnaldur Indridasson, en même temps, il reste pas mal dans la capitale et va faire parfois un tour dans le Nord du pays…on y apprend pas grand-chose sinon que les Islandais sont tous plus ou moins cousins à des degrés divers, qu’ils bouffent de la morue et de la baleine, que ça a été un sacré territoire pour l’espionnage lors de la guerre froide et que les Islandais n’étaient que de pauvres pécheurs et agriculteurs et que c’est l’installation de nombreuses bases américaines lors de la seconde guerre mondiale qui les a rendus riches…Sinon, les histoires sont à l’image, j’imagine du pays…c’est lent, il ne se passe grand chose…mais il y a un truc qui vous tient…et presque vous attendrit…
Afrique du Sud: Deon Meyer…demandez à son flic ce qu’il pense de la nation-arc-en-ciel…romans vraiment noirs, les différentes histoires se passent un peu dans tout le pays, alors rien de précis mais une bonne vision d’ensemble…et puis le seul auteur qui écrit en Afrikaans…
New-York: je n’en choisirai qu’un… Jerome Charyn, son flic yiddish, Mickey blue-eyes… et sa fille complètement tarée et nymphomane, Marylin la dingue…on découvre un New-York assez baroque et nerveux qui doit dater de celui d’avant Giuliani…
Floride: des romans déjantés, la dope, des politiques corrompus, des retraités, des gangsters latinos, des sudistes complètement allumés…c’est principalement avec Carl Hiassen..et son fameux jackpot…ou encore Tim Dorsey et son Florida Roadkill…ce sont des romans relevant plus de la grande bouffonnerie et de la farce que du polar…mais bon on s’accommode…
Los Angeles: James Ellroy, on en a déjà parlé ici, le quatuor et la série des Lloyd Hopkins sinon on peut aller voir du côté d’Eddie Bunker..avec aucune bête aussi féroce ou les hommes de proie…
D.C.: Georges P. Pelecanos, pas de Maison Blanche, de lobbyistes, de politiques, de DSK mais le ghetto le vrai, pur et dur…toujours violents…
New-Orleans: James Lee Burke avec son privé Dave Robicheaux, bouffe et musique cajun…everglades, alligators et mafieux en perspective.
Texas: Cormac Maccarthy, no country for old men (comment l’éditeur a-t-il pu traduire littéralement le titre pour la version française?), Méridien de sang…et tout…j’imagine que le Texas n’est plus tout à fait identique à celui décrit dans ces bouquins mais la mentalité demeure…
Londres: Ken Bruen, R&B, les flics Roberts & Plant…sinon Robin Cook, avec j’étais Dora Suarez…et quelques autres.
Irlande: toujours Ken Bruen avec la série des Jack Taylor, du côté de Galway, pintes, pubs et coups de boule à tous les coins de rue…
Mexique: même si Santa Teresa n’existe pas et si l’étrange envie vous prend de visiter Ciudad Juarez, et bien 2666 est tout indiqué et particulièrement la partie des crimes.
Et comme le veut la formule, liste bien entendu subjective et non exhaustive…
J’ai lu le premier Bunker (Aucune bête…) qui me parais très efficace dans tous les sens dont un voyage à L.A (bon second derrière Ellroy ‘videmment), et l’unique Robicheau que j’ai visité du sol au plafond était excellent, très « cajun spirit ». Mais l’une des plus belles scènes Louisiane-Nouvelle Orléans que j’ai lue (malgré le titre de l’oeuvre) c’est dans un polar extraordinaire : « Le sabbat dans central Park » de William Hjortsberg (dont on a tiré Angel Hart; mais vous savez ça).
Quitte à remonter dans le temps, autant aller dans le classique : lecteurs, visitez un Harlem disparu avec les deux flics épiques de chester Himes, Ed cercueil et Fossoyeur,in « La reine des pommes », « Imbroglio Negro » & so…Quarto a sorti toute la série des huit romans consacrés aux deux zouaves terrifiants -pas vraiment le genre pleureuses negro spiritualisant « grand’ma on la fouettait dans les champs bheu heu heu ».
Je n’ai pas votre culture polardeuse Chéréa,ma régulière serait plutôt l’estampillée « Culture classique avec de vraies morceaux de littérature dedans », mais comme je ne fais pas de différences hiérarchiques de genre, la qualité étant la qualité… C’est juste qu’à côté des étiquetés de la prose qu’on lit le col bien boutonné (quand on n’aime pas vraiment ça et qu’on le fait pour la montre) je suis plutôt fantastique et Sf. Enfin… j’étais, la qualité de la SF s’est tellement effondrée que je n’ai plus rien à me mettre sous la paupière à part relire.Quand au Fantastique…Depuis que les éditions Neo sont mortes sans réels héritiers ,là encore relecture, notamment les grands givrés de langue allemande type H.Heinz Ewers ou Meyrink…avec aussi les anglos-saxons époque Clark Ashton Smith voir Hodgson -graaande influence de Lovecraft. Mais je ne méprise nullement pas un bon Masterton et ne suis pas de ceux qui rejettent tout King. « Simetierre » est un vrai chef d’oeuvre, son plus grand livre à ma connaissance.)
Quand même, un vrai polard senteur ténèbres, c’est quelque chose d’unique.
Et pour finir d’ opérer un retour au polar : « Les damnés ne meurent jamais » de Jim Nisbet fut un sacré choc.
Excellente façon de voyager en tous cas. J’apprécie beaucoup cette série de l’été.
Ps Je pense à la camarade ilysienne qui cherchait de la noirceur. C’est tellement évident qu’on a pas osé, osons ! : American psycho de Ellis.
(coucou Patrick ! bonnes vacances? J’ai oublié votre nouvelle incarnation bloguesque).