Mail d’un membre de la cinquième colonne bidolienne, section EN :
Tu me parles de la machine à décerveler scolaire, sache que, bizarrement, dans le public on est devenu nettement moins antichrétien, les professeurs ayant eu à subir les problèmes amenés par l’islam. De plus la religion est enseignée en sixième (sous l’enseigne lénifiante et désacralisante de « textes fondateurs » , accompagnés d’Hésiode et d’Ovide et du Popol Vuh. ce qui aux mains d’un athée militant peut se transformer en machine à relativiser, tout dépend dont du maître in fine : la puissance des maîtres qui choisissent leur présentation et leurs textes – cette ouverture à toutes les manipulations et la tromperie qui consiste à mettre Ovide sur le même plan que l’Évangile. Quand on ne se contente pas d’étudier la Genèse et passez muscade. L’Evangile, hélas, n’est pas un « texte » obligatoire) et l’Islam lui n’est plus au programme, il a été retiré. C’est presque dommage, une collègue par exemple leur faisait découvrir combien l’Islam était jeune à côté du christianisme et que Jésus comme Moïse et tant d’autres furent d’abord honorés par les chrétiens. C’est qu’ils ignorent totalement la chronologie de leur religion qu’ils pensent pré-chrétienne. C’est donc plutôt une défaite que d’avoir retiré l’Islam du programme de connaissance des religions.
Dans ce que je vis tous les jours, à mon sens, le plus gros problème sont ces classes mélangées où l’on met les faibles et les forts. Comment faire cours décemment avec des élèves qui vont trois fois plus vite que les autres ? On se retrouve avec une cote mal taillée, des élèves qui s’ennuient ayant déjà compris, et de l’autre côté des élèves qui décrochent parce qu’ils ne peuvent pas suivre. L’équilibre est impossible. Et puis… je songe à ce jeune troisième qui adore la plomberie, dont le stage s’est merveilleusement passé et pour qui les cours sont un enfer. Pourquoi, à 15 ans, est-il obligé de rester cloîtré dans un endroit qu’il hait et gâche pour les autres par son comportement ? Et ils sont plusieurs dans ce cas. Les manuels, à mon étonnement, font bonne place à la Ferme des animaux, parlent du stalinisme et je vais faire étudier aux troisièmes Balzac et la petite tailleuse chinoise qui leur donnera une idée de la vie dans un pays communiste qui brûle et interdit tous les livres autre que les recueils d’éloge de Mao et les classiques rouges. Je me promets bien d’expliquer soigneusement le pourquoi de ces interdits.
Je t’avouerai que ma religion est faite : nous assistons à la fin d’une civilisation commencée au 12ème siècle, qui a explosé au 16ème, a connu ensuite une période magnifique jusqu’à la fin de la seconde guerre mondiale. Après cela a encore été 30 à 40 ans de suite -soyons généreux -, sur la lancée, soutenu par de Gaulle en partie, mais désormais, c’est fini. Non seulement pas un seconde sur deux classes ne connaît Flaubert (si, un. De nom.) mais il y a quelques jours de cela, demandant à un libraire la correspondance Paul Morand- Jacques Chardonne, je me suis aperçu qu’il ignorait totalement de qui il s’agissait. De même pour Cendrars. Un libraire ! d’une bonne trentaine d’années, tenant la dernière librairie d’une petite ville où existait il y a encore 5 ans un homme délicieux et cultivé qui a pris sa retraite de dégoût, par lassitude, parce qu’il sentait que la civilisation de l’Esprit qu’il avait aimée s’écroulait. Depuis, j’ai parlé de ma thèse à de fort doctes et fort intelligentes personnes,mon maître XXXX entre autres, tous sont d’accord : depuis les années 70, c’est une chute accélérée qui va en suivant la loi de la chute des corps, de plus en plus vite. L’écrit est remplacé par l’image. A bien des égards, je suis un homme d’avant la seconde guerre mondiale – qui , spirituellement, nous a fait le plus grand mal, car nous nous sommes dégoûtés, nous avons connu la honte. Les hommes de Sedan n’étaient pas comme nous, ils pensaient la Revanche le jour même de l’armistice. 14-18 a emporté le plus beau de notre sang -les exemples de Péguy, Alain Fournier, Apollinaire, trépané, mort un an après, sont là et combien encore que l’on connaît à peine : peintres, poètes, musiciens débutants.Dieu seul sait combien de grands hommes la France a perdu, qui n’étaient alors que de très jeunes hommes que la maturité n’avait pas encore appelés. Et combien de cœur solides et forts, des chefs honnêtes, des spirituels, des bâtisseurs. Le désespoir n’est pas chrétien, aussi préféré-je penser sur la longue histoire. Il y a déjà eu une période semblable dans l’histoire connue, ce sont les 3ème et 4ème siècles après la chute de Rome, surtout le 4ème. IL faut lire les descriptions de Saint Grégoire de Tours voyant les barbares s’installer à la place des anciens maîtres si raffinés. Et pourtant l’Eglise les a finalement éduqués, et pourtant la renaissance carolingienne de 830 est venue, puis la Renaissance du 12ème siècle, enfin ce vaste mouvement de libération de l’esprit humain, cette naissance de l’individu, la Renaissance du 16ème dont Rabelais est l’admirable témoin, l’enthousiasme humain chante, toute lyre embrasée -et c’est la fameuse lettre de Gargantua à Pantagruel : « Maintenant toutes choses sont retrouvées, maintenant les arts renaissent et les petits enfants au pupitre en savent plus que les meilleurs doctes de mon temps d’étudiant » (de mémoire)
(merci à LC)
« « Maintenant toutes choses sont retrouvées, maintenant les arts renaissent et les petits enfants au pupitre en savent plus que les meilleurs doctes de mon temps d’étudiant »
Nous en sommes exactement là, et c’est bien pourquoi notre époque aurait émerveillé Rabelais, et avec lui ce cher Montaigne…
Une époque qui aurait enchanté Montaigne et Rabelais, et dans laquelle on fait passer à la trappe Chardonne et Morand… On y perd pas vraiment au change^^
Cette époque a des aspects détestables, mais elle est aussi pleine de grande promesse.
Très chier filz,
[…] Maintenant toutes disciplines sont restituées, les langues instaurées : grecque, sans laquelle c’est honte que une personne se die sçavant, hébraïcque, caldaïcque, latine; les impressions tant élégantes et correctes en usance, qui ont esté inventées de mon eage par inspiration divine, comme à contrefil l’artillerie par suggestion diabolicque. Tout le monde est plein de gens savans, de précepteurs très doctes, de librairies très amples, et m’est advis que, ny au temps de Platon, ny de Cicéron, ny de Papinian, n’estoit telle commodité d’estude qu’on y veoit maintenant, et ne se fauldra plus doresnavant trouver en place ny en compaignie, qui ne sera bien expoly en l’officine de Minerve. Je voy les brigans, les boureaulx, les avanturiers, les palefreniers de maintenant, plus doctes que les docteurs et prescheurs de mon temps. Que diray-je? Les femmes et les filles ont aspiré à ceste louange et manne céleste de bonne doctrine. Tant y a que en l’eage où je suis, j’ay esté contrainct de apprendre les lettres grecques, lesquelles je n’avoys contemné comme Caton, mais je n’avoys eu loysir de comprendre en mon jeune eage; et voluntiers me délecte à lire les Moraulx de Plutarche, les beaulx Dialogues de Platon, les Monuments de Pausanias et Antiquitéz de Atheneuz, attendant l’heure qu’il plaira à Dieu, mon Créateur, me appeler et commander yssir de ceste terre. Par quoy, mon filz, je te admoneste que employe ta jeunesse à bien profiter en estudes et en vertus. Tu es à Paris, tu as ton précepteur Epistémon, dont l’un par vives et vocales instructions, l’aultre par louables exemples, te peut endoctriner. J’entens et veulx que tu aprenes les langues parfaictement. Premierement la grecque comme le veult Quintilian, secondement, la latine, et puis l’hébraïcque pour les sainctes lettres, et la chaldaïcque et arabicque pareillement; et que tu formes ton style quant à la grecque, à l’imitation de Platon, quant à la latine, à Cicéron. Qu’il n’y ait hystoire que tu ne tienne en mémoire présente, à quoy te aidera la cosmographie de ceulx qui en ont escript. Des ars libéraux, géométrie, arisméticque et musicque, je t’en donnay quelque goust quand tu estoit encores petit, en l’eage de cinq à six ans; poursuys la reste, et de astronomie saiche-en tous les canons; laisse-moy l’astrologie divinatrice et l’art de Lullius, comme abuz et vanitéz. Du droit civil, je veulx que tu saiche par cueur les beaulx textes et me les confère avecques philosophie. Et quant à la congnoissance des faictz de nature, je veulx que tu te y adonne curieusement : qu’il n’y ait mer, rivière ny fontaine, dont tu ne congnoisse les poissons, tous les oyseaulx de l’air, tous les arbres, arbustes et fructices des foretz, toutes les herbes de la terre, tous les métaulx cachéz au ventre des abysmes, les pierreries de tout Orient et Midy, rien ne te soit inconneu. Puis sougneusement revisite les livres des médicins grecz, arabes et latins, sans contemner les thalmudistes et cabalistes, et par fréquentes anatomies acquiers-toy parfaicte congnoissance de l’aultre monde, qui est l’homme. Et par lesquelles heures du jour commence à visiter les sainctes lettres, premièrement en grec Le Nouveau Testamant et Epistres des Apostres et puis en hébrieu Le Vieux Testament. Somme, que je voy un abysme de science : car doresnavant que tu deviens homme et te fais grand il te fauldra yssir de cette tranquillité et repos d’estude, et apprendre la chevalerie et les armes pour défendre ma maison, envers tous et contre tous, et hantant les gens lettréz qui sont tant à Paris comme ailleurs. Mais, parce que selon le saige Salomon sapience n’entre poinct en âme malivole et science sans conscience n’est que ruine de l’âme, il te convient servir, aymer et craindre Dieu, et en luy mettre toutes tes pensées et tout ton espoir, et par foy, formée de charité, estre à luy adjoinct en sorte que jamais n’en soys desanparé par péché. Aye suspectz les abus du monde. Ne mets ton cueur à vanité, car ceste vie est transitoire, mais la parole de Dieu demeure éternellement. Soys serviable à tous tes prochains et les ayme comme toy-mesmes. Révère tes précepteurs. Fuis les compaignies des gens èsquelz tu ne veulx point ressembler, et les grâces que Dieu te a données, icelles ne reçoipz en vain. Et quand tu congnoistras que auras tout le sçavoir de par delà acquis, retourne vers moy, affin que je te voye et donne ma bénédiction devant que mourir. Mon filz, la paix et grâce de Nostre Seigneur soit avecques toy. Amen. De Utopie, ce dix-septiesme jour du moys de mars.
Ton père, Gargantua.
Je sais que tu es un maître en paradoxes mon cher XP, c’est là un jeu de salon assurément plaisant et tu pourras toujours clamer tout à ton aise que « Mierda d’artista » dépasse Velasquez et qu’un bon Happening renvoie Van Gogh au musée de la barbouille morte. Ben voyons. Ainsi c’est donc tellement évident selon toi que « les petits enfants au pupitre en savent plus que les meilleurs doctes de mon temps d’étudiant » ? Pas le moindre doute, la phrase de Gargantua millésime ne vois pas en quoi, vu que leur ignorance est totale et par Bidou ne me sort pas internet parce que pour chercher un nom sur internet encore faut-il savoir qu’il existe, tu as fort peu de chance de découvrir Yeats par épiphanie du clavier Tu présumes avec un culot frisant office de preuve et une facilité qui laissent pantois que Montaigne et Rabelais eussent aimés cette époque. (Ettu avance ça avec une complète gratuité qui frise l’escroquerie intellectuelle car enfin, sur quoi te bases-tu ?quelles citations des deux ? Bref,QU EST CE QUI TE PERMETS D’AVANCER CA? Nécromancie? Quintuple lecture de Rabelais dans les trois éditions différentes? Pas sa Correspondance, la seule qu’on a est adressée à Budé , Érasme, Nostradamus Dollet et les grands humanistes de son temps -c’est à dire ceux qui sont « savants es bonnes lettres », car c’est ça l’Humaniste et l’Humanisme est savoir, lectures et recherches car pour Rabelais un homme se jauge par son savoir,L’écrivain ne conçoit pas l’ignorance, qu’il méprise infiniment chez tous ceux qui ont une profession en contact avec le livre et l’écrit – que ce soient légistes, médecins, libraires, architectes, paysagistes. Et les princes qui doivent avoir la vaste érudition des anciens chefs grecs. C’est simple : on ne doit jamais, dit Gargantua à son fils Pantagruel fréquenter, ceux qui n’ont pas été « poli dans l’officine de Minerve- »- « bien affiné dans l’atelier de Minerve »-, trad. De Guy Demerson .C’est pourquoi je trouve que tu trompes diamétralement en voulant faire main basse sur Rabelais, lui qui parle -avec quelle force de mépris! -de la génération des « Goths » ayant précédé la sienne, ces tristes sires dépourvus des connaissance . Quant à Montaigne,ce bilingue français-latin qui passa sa vie après sa charge de maire« retiré dans le sein des chastes muses » à lire et écrire, qui influença Shakespeare, tu l’as rajouté de ton propre grès malgré ce qui les sépare – outre un bon demie siècle, il y déjà les guerres de Religion , Rabelais meurt dans les 8-9 ans avant la première. L’optimisme d’un Rabelais ne pourra plus être le lot d’un Montaigne, d’où son retrait d’ailleurs. La Renaissance est dans sa toute dernière période). Et encore une fois pourrait-tu me dire ce qui te permets d’avancer Que Montaigne se serait senti chez lui dans notre époque??? C’est gratuit, sans fond, rien n’étaye ton dire. Tu parles dans le vide, moi, comme notre camarade inconnu que je rejoins – je pars d’un constat qui, pour se situer en DEUG/ Licence ne fait que rejoindre les constatations de notre infiltré : les étudiants d’aujourd’hui sont le plus souvent des sommets d’inculture comparés à leurs frères des années 60. Essaye de seulement leur demander qui est Ramuz (que Céline reconnait comme l’une de ses grandes influences, majeures même) et tu verras le visage pâteux de la bêtise humaine envahir les insipides globules à ne rien voir de ces spécialistes qui gravent du Master avant même d’avoir appris à lire. Je passe sur l’enlaidissement d’une langue qui s’éteint sous l’appauvrissement d’un vocabulaire de plus en plus maigre (mesuré parles linguistes), puisque c’est la télévision qui fournit son langage au pays et qu’à la télévision il faut faire court et simple. Mieux vaut ne pas parler des flageolants de la syntaxe la plus élémentaire qui nous caguent leur perpétuelles antiennes qu’à l’évidence -avec cette émouvante ténacité des maniaques-, ils confondent avec un raisonnement. Que rien n’étaye , pas un fait, pas un chiffre, pas un témoignage d’un type ayant les mains dans le cambouis,
Et pourtant… L’écolier, ça, c’est du vivant, on est pas dans le théorique, s’agit pas de faire parler les morts en leur enfonçant ses opinions dans le gosier. Ils ont quelque mal à répondre, vois-tu. Mais il y a toujours eu un snobisme de l’époque : le coup de trompette joyeux style « nous sommes dans la plus belle, youpi, une vraie splendeur qui éclairera les siècles que celui de LouisXIV ou de Périclès à côté ce seront de fermes bouses! ». Enfin l’évidence est là! ça dégouline de connaissance, les enfants en nourrice citent Mallarmé et nos sixièmes prennent Heidegger en défaut. Jamais on n’a mieux bandé, les baudruches gonflées à l’oxygène de génialité transmuent le paysage poétique et romanesque et jamais depuis les soirées « Lyre et palette » de Cendrars et le bateau-lavoir où Modi pompait Max Jacob pendant que Jarry l’encultait on n’a vu fleurir comme aujourd’hui la création dansante, aérienne, légère même dans l’essentiel (Valéry) et sans pathos prétentieux et roublard. Jeff Koonz est là pour le prouver.
Le problème -car il existe -n’est même pas là. L’échec de l’école de masse est patent, indiscuté, pour plus de 80% des professeurs de collège, lycée ou fac. Venir soutenir le contraire est un agréable concetti d’amateur qui joue les Crétois (les paradoxes crétois, si souvenir avez) sans tenir compte du réel. Cane m’étonne aucunement de toi qui n’a jamais tenu compter du réel lorsqu’il te contredit. C’est un charme et j’irai plus loin , c’est une utilité. Mais certaines limites s’imposent :quand c’est chaque jour qu’on étaye n’importe comment en priant pour que l’écroulement n’écrase pas toutes ces vies qui n’arrivent même plus à faire un exo de math parce qu’ils ne comprennent pas la consigne et que les profs de sciences durs supplient qu’on les reprenne en main vu qu’ils confondent un COD et un sujet J’ai l’impression d’un type qui en plein début de la crise de 29 trompéterait que jamais
l’économie n’a aussi bien marché.. Ce qui est triste là dedans, vois-tu mon ami, c’est qu’il y a de la chair et de l’âme derrière tout ça. De l’échec et énormément de chagrin dans les familles, chez les mômes, chez leurs profs. Des élèves qui ne rendent aucun devoir parce qu’ils se masturbent au SMS et se couchent à 5 heures par amour-passion pour « call of duty » (ce n’est pas pour autant qu’ils connaissent l’Anglais,) ça ne fait pas un tissu humain avec lequel construire une société viable, capable d’avancer vers cette « Renaissance » sur laquelle compte notre billettiste. Rien que le maintien, actuellement, de la méthode globale dans les maternels est un scandale. Certains nous disent que le problème de la destruction du français écrit (je m’y limite mais tout va ensemble) nous vient de la flottille étrangère arrivée sur les bancs scolaires de la France. Mais il faut se souvenir que fut un temps pas si lointain où on réussissait à faire de parfaits francophones avec des centaines de milliers de gamins qui ne connaissaient que leur bretons et autres langues régionales. En un an ils vous parlaient recta français, en cinq ils vous torchaient une version latine.
Bon, fin. Je laisse tes appréciations sur Morand-Chardonne, ces exemples nous prouvent simplement qu’un libraire d’aujourd’hui ignore tout de son métier , ce n’est pas une question d’aimer ou pas les dits écrivains (il y a Cendras aussi de nommé, ce génie); tes goûts, eux n’ont ici pas la moindre importance, mais la qualité des libraires, oui. Parce que sur le net on ne te fera pas connaître ce que tu ignores comme savaient si bien le faire les libraires d’il y a encore 15 ans, qui conseillaient intelligemment.
Tu fait bien partie de l’ère Jack Languienne du « monde festif et intelligent », ce monde où « Bravitude » devient « un formidable néologisme », ce monde où l’on proclame (Lang encore) qu’on « jamais été aussi cultivé; que les élèves en savent bien plus aujourd’hui; que la culture touche bien plus de gens » etc, etc ad nauseam. On connaît le discours. Tu es chez toi ici. Heureux de ton bonheur.
Ps Pour ceux qui l’ignoreraient XP et moi sommes amis. Ce sont des choses qui arrivent. Nous avons, tous deux, de mauvaises fréquentations.
Ps s Jene mesuis pas franchement relu. Mea culpa – mais la vie n’est que contradictions.
Salut Restif!
J’ai pas lu ton commentaire, il est trop long. Qu’Est-ce que tu y dis? Tu pourrais m’en faire un résumer de 10 lignes?
Restif dit que pourtant le niveau intellectuel général des élèves baisse. Quand on n’est pas en mesure de comprendre une consigne en bon français, on est a-priori très loin de pouvoir converser d’égal à égal avec Rabelais. Rabelais pour qui un honnête homme devait au minimum maîtriser le Grec, le Latin, l’Hébreux et le Chaldéen en plus de sa langue maternelle, et avoir lu tous les maîtres antiques dans le texte avant l’âge de sa majorité. Cf la citation de Prolo.
Pas à dire, tu es raccord avec la pensée émincée, le dégraissée culturel et le slogan en guise d’échange. Quand même, t’aurais pu m’éviter ta vieille dernière carte, le « j’aipasluc’esttroplong » qui date de ton mésozoïque et sent la corde éculée. On la connait l’esquive, le fouette cocher, terrain miné. Du com’ Restif tu t’en es avalé des 3 fois plus épais lorsque ça t’étayait le point de vue. Bedit menteur.
Grand merci à la très amène Yulie-Anna qui maîtrise l’art peu aisé de la synthèse et qui souligne à point nommé. Salut à Gargantua venu nous visiter.
En même temps, est-ce que vous pensez réellement qu’un jeune homme se doive /forcément/ de posséder le grec, le latin, l’hébreu, le chaldéen et l’escrime pour être un honnête homme ? LOl !
Comme écrit dans la lettre, toutes ces prétentions nous viennent directement du Royaume d’Utopie… C’est donc aussi un peu risible, non ?
Moi si j’avais à définir ce que j’attends d’un honnête homme, je ne m’y prendrais pas comme ça. Et même si je maîtrisais le grec et le latin, je ne pense pas que j’exigerais de tous mes amis d’en faire autant.
Comment vous y prendriez-vous, vous, pour définir ce que vous attendez d’un homme ?
🙂
Rabelais l’auteur est peut-être un petit peu plus complexe que le personnage Gargantua, vous ne croyez pas ?
[Eh voilà, on donne les clefs à l’avocat du Diable pour s’en sortir glorieusement, et il ne les utilise même pas ! – Parfois il faut vraiment tout faire soi-même ! ^^]
J’ai écrit ceci :
« Rabelais pour qui un honnête homme devait au minimum maîtriser le Grec, le Latin, l’Hébreux et le Chaldéen en plus de sa langue maternelle, et avoir lu tous les maîtres antiques dans le texte avant l’âge de sa majorité. »
Mais vous, qui êtes pourtant professeur de français, emporté par votre colère et votre propos, vous n’avez pas jugé bon de me détromper ? 🙂
C’était évidemment faux : Gargantua pense cela. Rabelais nous n’en savons rien (du moins d’après l’extrait précédent).
Très amène Yulia-Anna, pourquoi- vouliez-vous qu’ XP ou Restif réagissent? C’est de l’évidence lourde votre remarque. Que Rabelais n’ait pas connu, le Chaldéen ni l’arabique c’est du domaine public. Et « il n’a qu’une teinture de l’Hebreux » (L. Senean cf infra). C’était donc si net qu’on avait pas besoin de s’encuistrer pour débusquer l’indubitable. Ce serait avoir maigre opinion de l’Ilsyen tel que je l’ai fréquenté (taillant même un brin de post, ce que je referais avec plaisir si Vittorio l’approuve. Côtoyer Il Sorpasso et les clercs de Bidou serait un oxygène. Même si la rareté s’impose pour cause d’inutilité chronophage .
Au fait, je n’était aucunement « en colère »; j’aime bien rompre une lance et rentrer dru dans le dojo de la parole comme les pro et contra de l’université de Paris mais la « colère », pfiou, quelle perte de temps et d’énergie.
« Rabelais l’auteur est peut-être un petit peu plus complexe que le personnage Gargantua, vous ne croyez pas ? » Non, sans blague? Je n’y aurais jamais pensé sans vous. Vous prenez souvent les gens pour des acéphales?
Ah :Je ne suis pas « professeur de littérature »,je maraude dans la recherche. Personne n’a oublié le best-sellers : « De l’origine du négatif à la néantisation du signifié : la virgule chez Mallarmé », dont les ventes massives me permettent aujourd’hui de jouir de rentes plantureuses.).
Depuis Proust et quelques autres on sait que l’homme et l’auteur ne font pas UN. C’est une des plus vieilles tartes à la crème de l’officine des faisandés du théorique.
La voix derrière Gargantua n’est, évidemment, pas celle de Rabelais, ne serait-ce que parce qu’à l’époque on ne connait de Rabelais auteur que ses publications médicales. Nul ne sait qui est cet Alcofribas Nasier dont le nom orne la couverture de l’édition 1532 de Pantagruel. Et la voix qui orchestre la polyphonie romanesque (cf Bakthine) est celle du narrateur, pas de l’auteur; les deux sont séparés, toujours, depuis 50 ans au moins de recherche littéraire. Rabelais, comme son disciple Céline, adore épuiser la langue, hyperboliser du vocable, épuiser l’énumération jusqu’à faire dérailler la logique de la langue en poussant jusqu’à’ l’absurde l’hypertrophie du discours. L’humour par exagération est forcément partie prenante d’une telle écriture et c’est bien pourquoi point ne croit qu’il fallait relever (déjà pour ne pas insulter le lectorat) ce qui paraissait tout aussi évident à l’avocat du diable (ce dernier devrait s’en défier car s’il est son avocat il peut se transformer très vite en son accusateur). .
XP Tu m’as brisé le coeur. Voilà. Tu « fais bisquer » et tu n’entends pas cataracter mon âme qui s’écoule. tu as du sang spirituel sur les mains. Je te répondrai dès que possible. a vrai dire, Revel l’a fait pour moi dans ses Mémoires lorsqu’il raconte son expérience de professeur et compare 60 (pas l’an 1934 de France culture) à 2000. Et d’ailleurs je ne trouve pas mauvais qu’en 34 seul une moitié d’élèves ait eu son certificat d’étude. Autant de gens qui plongeaient directos les mains dans le cambouis et ,fuyant l’ennuyeuse école laissaient à ceux qui ont quelques problèmes à refaire une tuyauterie le plaisir de traduire Cicéron ( « Ironie » Mâme Ylie, une de plus -. Je crois qu’il faudra ressortir le point d’ironie qu’avait inventé je ne sais plus qui il y a quelque deux cent ans de ça. Au temps de Rabelais on décryptait, ses lecteurs modernes sont censés faire pareil. J’avoue être un peu accablé que vous puisiez avoir l’idée saugrenue qu’un lecteur ait pris au pied de la lettre le portrait de l’humaniste selon Rabelais alors qu’il charge la barque que s’en est éléphantesque. Soupirs… Essayez un jour der partir du point de vue inverse et de vous dire que le lectorat n’est pas trépané du neurone).
Bréfi-bréfa, je te répondrais probablement mais on ne peut nier la baisse de la culture générale, une baisse qui atteint des gens et des classes autrefois épargnées. On est plus à l’époque où les banquiers passionnés finançaient des revues et des éditions tenus par Cendrars et Breton (le grand Blaise n’aimait guère ce dernier et comme je le comprend ! Reste qu’André chou qui ne l’aimait guère plus conseilla à Doucet d’acheter la Prose du Transsibérien et que notre collectionneur milliardaire commandita Cendrars en lui achetant le manuscrit de l’Eubage à raison d’un chapitre par mois ce que je trouve plus seigneurial que la joute Pinaud Arnaut pur qui aura le plus gros tas de charbon sur carreaux blancs ou la dernière oeuvre du célébrissime lacérateur de serpillère. Sinon, l’émission est intéressante, faudra que j’écoute tout et je te remercie du lien. Et que le monde moderne ait des splendeurs je ne l’ai jamais nié. Mais c’est un siècle à sciences durs, par un siècle lyrique, littéraire, un siècle à salons, à lieux de rencontre comme on les trouve encore chez Paulhan (les cocktails NRF avec Queneau, Viallate, Léautaud,Faulknet & co), chez Galtier, chez Adrienne Monnier avec Joyce et Fargue, chez les Groult avec le génial Jouhandeau, entre autres). Et je ne vais pas me lancer sur la question de la technique selon Anders et Heidegger. Pas plus que sur la ruse de l’histoire. Et continue ton entomologie sociale, ta controverse avec toi-même et tout ce qu’elle entraîne. n’empêche que le réel, tu ne le changeras pas, tu peux juste faire pivoter le projo vers un autre secteur. Na ! (et que le Grand Patron te protège amigo, un XP est irremplaçable.).
Juste pour ceux que ça pourrait intéresser, ce passage éclairant sur l’écriture rabelaisienne.
« Rabelais a puisé dans tous les domaines pour enrichir son
lexique, véritable océan où se sont déversés les courants du
passé et d’où dérivent ceux de l’avenir. Son horizon linguisti-
que est illimité, sa richesse verbale inépuisable et lorsqu’on
croit en avoir exploré tous les abords, on finit toujours par dé-
couvrir quelque îlot nouveau, quelque trésor insoupçonné.
Sa mémoire du passé et son expérience de la vie lui ont per-
mis de puiser à la fois dans le temps et dans l’espace.
Il a ainsi cueilli une moisson verbale si abondante et si
variée qu’elle n’a jamais été égalée. Si nous passons de son
vocabulaire proprement dit à sa lexicologie, à son trésor expres-
sif, à ses tours de pensée, à ses comparaisons pittoresques, la
même admiration, peut-être à un degré supérieur, s’impose à
nous.
Cette diversité expressive et colorée de sa pensée reflète tout
un monde. Ce n’est pas là une collection de vocables inertes,
mais chacun de ses mots vit et s’agite, car il a été puisé aux
sources même de la vie. » LA langue de Rabelais. T II L.Sainean. Ancien professeur à l’université; vice-président de la société des études rabelaisiennes.
« époque PAs lyrique » ‘videmment.
quelques coquilles ailleurs.
Sinon : comme on n’a pas de thermomètre culturel des classes sociales – après tout, on voit combien leurs revues préférées Point Télérama Marianne etc bavent de haute culture, il y a au moins un point indiscutable sauf à se rouler dans le lisier de la pire mauvaise foi : IL y a, de facto, une baisse grave du niveau des élèves. En math, en histoire, en français. Et ça, 80 % minimum -voir tous dans un colloque ou une salle des profs – te le dirons, parce qu’ils l’ont vécu, le vivent actuellement. Et je te parle du témoignage d’universitaires conséquent, des vieux et des jeunes, la plupart,sauf quelques normaliens- étant passés par lez public. L’Université a divisé par deux la maîtrise et fait pire encore au DEA. On casse l’exigence puisqu’il n’ya plus assez de gens pour y répondre. Le doctorat n’existe plus vraiment, 3ans étirée sur 4 au lieu de 10. Reste heureusement la thèse d’habilitation à diriger des recherches, hypocrisie supplémentaire. Eux sont désespérés par leurs 1ere-2eme années, les profs du secondaire par leurs 3emes, leur sixième,leurs secondes.Ce qui n’empêche pas l’existence d’élèves brillants obligés de supporter des gens qui seraient tellement mieux dehors -ce qu’eux-mêmes reconnaissent en majorité. Reste -mais pour combien de temps encore puisqu’on parle de les supprimer, les classes prépas.Extrêmement dures, elles sont un repart mais empêchent la France d’avoir une université normale à l’Allemande. Bon, je vais lire Ramuz. Dit au colon de cette page que je compte lui graffiter un code dès que possible, p’têt point avant demain tard et que je le remercie d’accepter mes tirades de graphomanes.Je ne serai pas repassé pour rien !
Bcp trop long ! Verbeux, pompeux, alambiqué… pour moi, c’est illisible.
Cher Restif, les amis pour XP sont un immense problème. Il a l’amitié très forte et très fidèle et en même temps il a ce goût d’écrire et ce goût de la vérité viscéralement logé dans tous ses pores.
Je viens de lire dans « Les exorcismes spirituels » (le n°1) de Muray ce passage sur Bloy que vous connaissez par coeur certainement mais que je découvre moi et qui m’a fait penser immédiatement à XP :
« Avec Bloy, la littérature s’embarque décidément (et sans illusions sur ses chances de réussite) dans la catégorie de l’expédition punitive. Il faut injurier sans cesse ce qu’on narre pour le rendre intéressant. Les apparences ne sont plus contemplables que souffletées, charcutées, crevées, dérangées. C’est la charité même que d’arracher à leurs charentaises pour les ranimer.
Bloy ne compose jamais un paragraphe qui ne porte la trace d’une violente controverse.
Les débats qu’il ouvre sont des plaies.
L’accord éventuel avec le lecteur ou l’auditeur est une des choses les plus éloignées de son esprit.
On rêve de ce qu’il trouverait à dire, aujourd’hui, sur l’atmosphère consensuelle dans laquelle nous sombrons corps et âme. »
Bref, plus XP est casse pieds, contradictoire, insupportable, plus il est intéressant. Mais tout cela Restif vous le savez déjà.
Très chère Crevette, Noble Dame au rameau d’olivier j’agrée, certes…partiellement (sur le point amitié sans ambages, c’est ailleurs que ça tangue dru). Et point ne m’a pas échappé qu’XP était un parfait avocat du diable, une fonction qu’il remplit en gémissant d’ailleurs, par esprit de sacrifice.
N’ai-je pas dit dans mon com « Çà ne m’étonne aucunement de toi qui n’a jamais tenu compte du réel lorsqu’il te contredit. C’est un charme et j’irai plus loin , c’est une utilité. ». U-TI-LI-TE.
Je suis moins sûr par contre que cela soit le résultat d’un attachement à la Vérité qu’à Sa vérité ^_^. Pour la recherche de la vérité il lui manque l’acceptation sereine, même partielle, d’un point de vue différent, et surtout d’accepter de tenir compte du RÉEL quand bien même celui-ci va contre sa pente. Or il tient davantage à ses certitudes qu’à la vérité. Serait-il humain finalement ?
Quant aux qualités de cet écorché vif qui n’aime pas voir figer la diversité du réel, je les connais trop pour ne pas penser que sa personne dépasse de beaucoup nos petites algarades.
Bien à toi
Mon cher Restif, tout d’abord, le « c’était trop long était destiné à te faire bisquer, gentiment bisquer.
Pour le reste, je ne suis pas d’accord avec toi. Je suis, comme tous le monde ici, issu d’une famille de pensée « de droite », et c’est bien parce que j’ai une capacité à penser contre moi-même que j’en suis arrivé à parler des CAB, à fustiger la Tradition, etc…
Pour ce qui est de l’éducation nationale, on va pas ouvrir un débat qui nous conduirait trop loin, mais je me permet de te soumettre un lien:
franceculture.fr/player/reecouter?play=4764464 … à 7:20
http://www.franceculture.fr/player/reecouter?play=4764464 … à 7:20 précise.
Il y a un truc que j arrive pas a comprendre. Les profs qui en grande majorité rédigent leurs propres cours, alors que les cours sont faits en mieux dans les bouquins que tous les élèves possèdent.
Systématiquement moins bien donc. Et totalement inutiles. Perte de temps qui fait qu ils ne finissent presque jamais leurs programmes. mais c est normal.
Je viens aussi de découvrir que le programme d histoire de cinquième c est au premier trimestre l islam et un peu d histoire africaine. Puis un peu de vie au moyen âge avec les activités paysannes mois après mois. Pourtant dans le bouquin, il y a Philippe Auguste, Bouvines et la Guerre de Cent ans.
Le problème, ce n est pas les programmes, c est les profs. Leur médiocrité, leur lâcheté, leur manque d autorité, d ambition. Faut juste commencer par leur sucrer leur statu de fonctionnaire, privatiser tout le système et laisser les directions enivrer la moitié.
« Il y a un truc que j arrive pas a comprendre. Les profs qui en grande majorité rédigent leurs propres cours, alors que les cours sont faits en mieux dans les bouquins que tous les élèves possèdent. »
Qu’est-ce que le boulot de prof ? Pourquoi prépare-t-on son cours ? Pourquoi y’a-t-il du boulot en amont et pourquoi le livre ne se suffit-il pas à lui-même ?
Pourquoi les gens qui ne connaissent rien à rien comme vous tiennent-il à continuer de donner leur avis sur tout ?
Vous êtes vraiment aussi bête que ça ou c’est juste de la lèche ?
Entre 1)les profs qui refusent la transmission du savoir par idéologie-de-l’égalité, 2)ceux qui sont incapables de se mettre à la portée du tout-venant, c’est-à-dire de l’élève, par snobisme, et transforment le savoir en une forteresse imprenable comme les « grands savants » de l’Islam, pour édifier la populasse, 3) les gros débiles « libéraux » qui n’ont pour toute libéralité que la religion de l’argent, pour qui un bon intellectuel est un intellectuel mort…
eh bien croyez-moi, l’intelligence est mal barrée du côté de chez nous !
A quoi ça sert, l’éducation ?
Ca sert à éviter le cauchemar d’Adous Huxley :
http://www.juxtapoz.com/images_old/stories/2011/JXJan2011/Huxley/Orwell.jpg
L’éducation, c’est ce qui permet à un cerveau de continuer à traiter l’information, lorsqu’il en est surchargé. C’est une grille de lecture, un décodeur, (bon ou mauvais, finalement peu importe) fourni par des maîtres, destiné servir de pierre de fondation à un esprit critique. Quand les pieds sont sur la pierre (c’est une métaphore pour dire : sur du solide), alors seulement la tête peut fonctionner.
La fonction du professeur, c’est d’offrir à l’élève un point de vue sur le savoir, et par-là même de lui apprendre à en avoir un à lui. Il est celui qui apprend à l’élève ce qu’est le sens de l’histoire, ce qu’est l’histoire des idées, qu’elle ne s’est construite que par réactions successives, et que la politique est un débat, c’est-à-dire la contradiction des réactions entre elles, et que pour entrer dans ce débat (c’est-à-dire pour entrer dans la polis – dans la cité), il faut avoir un point de vue à soi.
Le professeur, c’est l’arbitraire social à visage humain. C’est l’information à visage humain.
Le cauchemar d’Huxley c’est l’information sans visage, c’est le monde de l’information qui se mue en moloch inhumain.
Si le cauchemar d’Huxley était Babel, le professeur serait un avatar de la figure du rabbin.
Les professeurs sont là pour donner aux élèves les jalons (les repères) qui leur permettront d’escalader la montagne de l’information (c’est-à-dire aussi celle de la connaissance).
Mais…
Les professeurs sont déjà des Rabbins! Comment imaginer un « poste » qui tiens aussi peu de la simple prestation de service et autant du sacré?
On peut mesurer le degré de civilisation d’une société à la valeur qu’elle accorde aux professeurs.
Le fait est qu’aux heures où ils étaient achetés au marché aux esclaves d’Athènes, ou lorsqu’ils mangeaient en cuisine avec le jardinier et dormaient sous les combles, le degré de civilisation était nettement plus élevé.
Et nettement moins lorsque l’on arrachait des petits Alsaciens de leurs fermes familiales pour qu’ils se prennent des coups de règles en fer, ou qu’à l’heure d’aujourd’hui, tout simplement.
« La fonction du professeur, c’est d’offrir à l’élève un point de vue sur le savoir, et par-là même de lui apprendre à en avoir un à lui. »
Cette phrase m’a fait penser au type qui parle du type qui vends de l’intelligence sans avoir d’échantillon sur lui. ^^
« La fonction du professeur, c’est d’offrir à l’élève un point de vue sur le savoir, et par-là même de lui apprendre à en avoir un à lui. Il est celui qui apprend à l’élève ce qu’est le sens de l’histoire, ce qu’est l’histoire des idées, qu’elle ne s’est construite que par réactions successives, et que la politique est un débat, c’est-à-dire la contradiction des réactions entre elles, et que pour entrer dans ce débat (c’est-à-dire pour entrer dans la polis – dans la cité), il faut avoir un point de vue à soi. »
Bon, nous n’avons pas du avoir les mêmes professeurs.
Chère Yulie Anna, les bouquins sont écrits par des profs. Ils sont en général bien structures, chapitres, le contenu est adapte à l âge des élèves. Les illustrations sont choisies et aident à la compréhension. Ce que peut apporter un prof, c est une sélection, l animation de la classe, mais surtout une méthode de travail. Et ça passe par l autorité, l exigence. Pour ce qui est du fond, il n y a strictement rien a ajouter au contenu des bouquins.
Or, et je parle d expérience puisque j ai dès enfants de 7,13 et 17 ans,la plupart des profs n apportent aucune méthode, n ont pas d exigence, d autorité. Ils tentent médiocrement d écrire un cours dix fois moins bien que ce que les élèves ont entre leurs mains.
Il n y a pas un cours pour un de mes enfants que je ne doive reprendre. Savoir son cours avant de faire des exercices ( les livres sont très bien faits pour ça avec des rappels juxtaposés aux exercices), développer un raisonnement mathématique et conclure par une application numérique, structurer ses idées, faire un plan, apprendre à un élève à venir encours prépare, avec la trouille d être interrogé et de ne pas savoir répondre. Tout ça c est l apprentissage de la vie.
Les profs ne font rien de tout ça. C est le bordel dans leur tête, ils n ont pas de méthode. Pour mon fils de 7 ans , je suis obligé de tout reprendre. Il apprend plus avec moi en deux heures qu avec sa maîtresse en trois mois. Pour celui de 13 ans, il sait que le paysan du moyen âge est pauvre, laboure son champ et paie des impôts à son seigneur mais pense que Charlemagne vivait au XIII e siècle.
Aucun progrès significatif en langues, parce qu il ne faut pas apprendre par cœur… Etc…
C est du vécu et pas du blabla réac genre « les profs qui refusent la transmission du savoir » . Ça ne veut rien dire et c est faux. Les profs croient à la transmission du savoir. Mais on ne peut pas demander ça a des médiocres. Incapables de se mettre à la portée des élèves? C est au contraire le problème. Ils n ont pas de capacité d abstraction pour la plupart. Quant à votre dernière sentence sur les libéraux… On croirait du Melenchon en moins bon.
C est le manque d ambition qui tue l école. Ça sent le renferme. L éducation nationale n’a pas mal évolué,elle a stagné. Les méthodes d éducation ont considérablement évolué et progressé. On le voit sur le net dans tous les domaines. Mais non, l éducnat ne se remet pas en question. On leur demanderait de concevoir et produire une voiture, ils feraient une Trabant. Pourtant sans être un riche libéral et rouler en Porsche, on roule très bien en VW, Seat, Opel, Ford voire même en Peugeot!
Et encore, je ne vous parle même pas des moult discussions avec mes potes docteurs et maîtres de conf en fac, pourtant gauchos, qui sont accablés par la médiocrité de l ensemble d un système dont la caractéristique principale est d être géré par l État. L absence de notation au mérite, de définition d objectifs, de plans d amélioration toutes choses qui existent dans le prive et pas dans le public. Il n y’a aucun mystère dans tout ça.
Il n est question que de pourrissement lent et inexorable d’un État de plus en plus obèse.
nicolasbruno
10 JANVIER 2014 À 1 H 07 MIN
NicolasBruno j’applaudis des deux mains votre post ci-dessus, il n’y a rien à dire de plus c’est exactement ce que je vis et ce je pense pour mes enfants.
Il y a deux jours je suis allée le matin tôt chercher dans mon supermarché deux trois cahiers d’exercices de maths avec les corrigés pour mes jumeaux et en une heure la leçon qu’ils bossent depuis la rentrée était enfin acquise! Je ne travaille d’ailleurs que comme cela avec les enfants, j’ai un stock de cahiers « parascolaires » très bien faits, pour toutes les matières : l’anglais avec vocabulaire bien ordonné et règles simples, maths avec exos de numération, problèmes, géométrie, français avec exos de conjugaison, dictées, orthographe, grammaire etc…Vraiment j’en suis à me dire que les mettre à l’école est une perte de temps et d’argent.C’est fou.
Mon fils en cinquième a minimum deux heures d’études par jour sans compter les profs absents! La prof de technologie fait depuis dix ans le même cours à la virgule près : j’ai un dossier dans mon ordi qui date de mon fils aîné et que je ressors chaque année en changeant simplement le prénom pour mes enfants!! C’est d’une pauvreté sans nom.
le manque d’ambition ds l’EN est énorme, pesant, glauque, il transpire par tous ces profs qui arrivent en retard en cours (quand ils y vont), qui sont mal habillés, qui perdent les copies de leurs élèves, qui racontent leur vie et leurs affres psychologiques à longueur de cours!! Bon sang! vivement qu’ils se taisent et qu’ils soient simplement assis à coordonner les exos de leurs élèves à partir d’un ordi! (il paraît que cela se fait dans le Massachusetts) enfin on bossera peut-être un peu plus dans les classes!
Non mais je suis d’accord avec vous sur le lent pourrissement de ce système éducatif, et du fait qu’il ne fonctionne plus. J’ai pas mal écrit à ce sujet : pour certaines raisons personnelles, ça me déprime tout-particulièrement.
Seulement, je persiste à vouloir attribuer la responsabilité de cette déchéance à une certaine idéologie de l’égalité qui a tué tout élitisme dans l’enseignement. Tuer tout élitisme, c’est tuer toute exigence haute tant des profs vis-à-vis des élèves, que des profs vis-à-vis d’eux-mêmes.
Or éduquer, c’est élever, n’est-ce pas ? Elever est un synonyme de : tirer vers le haut. Celui qui n’est pas « élevé » lui-même, et n’a même pas la prétention de l’être, ne peut élever autrui. Cela coule de source.
Ce « point de détail » de l’histoire de la déchéance de la République : le fait que l’idéologie de l’égalité a renvoyé au poubelles de l’histoire tout élitisme républicain, est à l’origine la raison principale de mon goût personnel (particulièrement prononcé) pour l’élitisme.
Je pense pour ma part que le véritable esprit républicain ne peut reposer (paradoxalement) QUE sur l’élitisme, étant donné que ce qui fonde la République, c’est la détestation des privilèges. Or les privilèges, c’est le pouvoir réservé à une caste de « fils-de », n’est-ce pas ? à des gens sans mérite individuel, qui n’ont jamais rien fait qui justifie qu’on les gratifie de tels honneurs.
Les lieux de pouvoir rendus accessibles à tous, cela ne peut vouloir dire qu’on les a rendus accessibles à « n’importe qui ». Celui qui dirige une nation ne peut être n’importe qui : c’est un élu. Le « n’importe qui » accédant au pouvoir par la grâce du Saint esprit, sans qu’on puisse questionner les raisons pour lesquelles il s’y trouve, encore une fois, du point de vue du républicain, c’est justement le Prince de droit divin. Il faut donc que contrairement au Prince, l’élu d’une démocratie le soit pour des raisons rationnelles et objectives : il faut que contrairement au roi, l’élu d’une démocratie ait MERITE sa place. La primauté donnée au mérite est en conséquence le seul fondement moral possible du régime démocratique. Et la préservation de son élitisme est la condition-même de la viabilité d’une démocratie.
C’est à cause de ça que j’ai toujours réclamé pour les autres comme pour moi-même le droit de dire : « Je suis meilleur que les autres ». Non, personne ne devrait jamais avoir honte de vouloir être meilleur que les autres. Et même s’il ne l’est pas, celui qui se vante d’une telle chose défend au moins le fait – en lui-même et pour lui-même – de vouloir être meilleur. Ce qui ne peut être mauvais en soi.
Voilà l’explication de l’image traditionnelle du « coq gaulois ». Sa fierté de vouloir être « le meilleur possible » n’est pas une question de vanité, mais avant tout de principe.
La médiocrité n’est paradoxalement pas compatible avec le système démocratique tel que les républicains originel (comme V. Hugo) l’ont conçu. Hélas, tous les républicains d’aujourd’hui, et je dis bien tous, sont effroyablement médiocre.
Les profs de la nouvelle génération, par leur jemenfoutisme tout à la fois idiot et criminel, je le dis comme je le ressens, me font FROID DANS LE DOS.
« Bon, nous n’avons pas du avoir les mêmes professeurs. »
J’ai effectivement eu des professeurs (de collège en particulier) qui étaient excellents. C’étaient de vieux briscards, à l’ancienne mode, des passionnés, de braves gens – un peu comme dans Pagnol. Et mes parents qui étaient instit et prof (avant de prendre leur retraite), avaient une approche de leur métier des plus passionnée, des plus impliquée, à mille lieues de la bétise, de la lâcheté, de la médiocrité égoïste, et du manque cuisant de repères intellectuels de la nouvelle génération d’enseignants.
Je ne défends pas la société telle qu’elle est. Mais on ne me fera pas pour autant cracher sur la société telle qu’elle devrait être. Il n’y a aucune raison de haïr la démocratie quand on vit dans une société comme la nôtre, qui n’en est pas une. Nous sommes dirigés par une oligarchie nationale, dans le cadre d’une ploutocratie mondiale, et notre société crève de son manque d’élitisme et d’ambition pour le peuple.
Merci crevette et Yulie-Anna. je ne me lasse pas de lire des eloges des deux plus nobles representantes de la feminite en ces lieux.
C’est pas un si gros compliment étant donné qu’elles sont les deux meilleures sur… deux. 😀
J’ai en peu de mal à comprendre cette conversation, je la trouve surréaliste.
Se plaindre de la baisse de niveau, du manque d’ambition de l’école, de a médiocrité des profs, c’est encore faire allégeance à l’école, montrer qu’on attend tout d’elle, non?
95% du savoir d’un homme, qu’il ait Bac+6 ou un CAP ne provient pas de l’école… Alors considérez que l’école est juste un mauvais moment à passer pour vos enfants, tout à fait inutile mais obligatoire, et cesser de vouez un culte aux enseignants comme vous le faites!
Bien sûr ça n’est qu’un mauvais moment à passer mais malheureusement ce moment laisse des traces et pas les meilleures.
« c’est encore faire allégeance à l’école, montrer qu’on attend tout d’elle, non? »
En ce qui me concerne, oui. Une civilisation sans professeurs, sans maîtres de calcul et de philosophie, sans chercheurs, ça n’existe pas. J’aime la civilisation. Je suis la servante de la civilisation, rien de plus, rien de moins. N’ai jamais fait aucun mystère à ce sujet.
L’élitisme suppose l’éducation, il n’y a pas d’élite sans société éduquée (une « bonne société » étant une société éduquée), car encore une fois éduquer c’est élever. Elever c’est tirer vers le haut.
Logique pure. 1 + 1 = 2. Pas de surréalisme aujourd’hui de mon côté.
Correction & addendum :
« montrer qu’on attend tout d’elle, non? »
Non pas /tout/. Montrer qu’on attend certaines choses de l’école ne veut pas dire qu’on en attend TOUT.
Il y a ce qui est le fait de l’éducation, et il y a ce qui procède de la nature humaine. J’attends également beaucoup de la nature humaine. L’éducation doit tenir compte de la nature humaine et non l’inverse, car la nature humaine est immuable et perpétuelle, on ne peut désirer la changer par l’éducation.
D’un autre côté, la nature humaine ne va pas sans éducation. L’homme est un animal qui s’éduque. Un animal qui apprend. Contrairement aux autres animaux qui n’apprennent jamais rien de neuf – ex : le chien aboie toujours, l’homme a un langage qui évolue. C’est l’une des définitions de l’homme.
Il faut avoir un capital de 57 millions d’euros pour pouvoir disposer d’une retraite de même montant que le mineur économique Ayrault.
http://www.lepoint.fr/economie/l-exorbitante-retraite-d-ayrault-14-01-2014-1780011_28.php
Excellent!