La naissance est une guerre, car la plupart des hommes naissent orphelins… Imaginez tous les obus que vous prenez en plein visage en voyant pour la première fois la lumière du jour, comprenez qu’il s’agit s’une déflagration qui vaut toutes les déflagrations de la guerre 14-18…
La naissance est une guerre, c’est LA guerre, c’est là que tout commence, c’est en ce jour que vous prenez connaissance de vos deux ennemis cardinaux, votre père et votre mère, qui sont tous les Boches à eux seuls… Tous les géniteurs sont à détester une bonne fois pour toute, ce n’est pas la peine d’y revenir.
Nos géniteurs ne sont pas nos parents, ou plus exactement, ils le sont de temps en temps, une fois sur vingt, par extraordinaire… Dans ce cas, ils méritent de l’amour et de l’affection, mais le géniteur à l’état pur mérite notre haine… De quel droit des gens qui nous ont mis génétiquement au monde se targuent d’être nos parents? D’où vient cette superstition ridicule?… La parenté est une notion merveilleuse, elle doit s’appuyer sur une transcendance bien plus vaste que la biologie, ce n’est pas une affaire de pipettes et se sperme…
Mon père, ça peut être un chien qui passe, ou Sacha Guitry, ou Jean Gabin… Comme tout le monde, si j’ai toujours besoin d’un référent père à l’âge que j’ai, je n’ai jamais eu besoin d’un père, même quand j’étais en barboteuse…
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12 réflexions sur « Au nord ton père et ta mère. »
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Yann Moix? Naissances?
En grande partie, d’où les italiques, mais j’ai restitué de mémoire une interview télé… Possible donc qu’il y ait deux ou trois trucs perso. La mémoire est un mécanisme bizarre.
Il se trouve que cette différence entre « géniteur » et parent », la dette du géniteur vis à vis de l’enfant… ce sont des choses sur lesquels j’écris depuis quelques semaines.
En général on dit ces choses-là quand on ne connaît pas grand chose à la vie…ou quand on veut faire son intéressant.
Je trouve que Moix, moche et méchant c’était mieux en dessin animé.
Euh… C’est quand même triste d’en arriver là juste pour choquer son monde… :/
Il est marrant Moix, de dire cela, alors qu’il suce bien profond ceux pour qui la famille génétique compte le plus. Tout ça pour passer dans la boîte à cons. Pauvre type, plus à plaindre qu’à conspuer.
La politique, toujours la politique… Un vice bien français, et vous, vous n’avez même pas l’excuse d’être français^^
C’est tellement vrai… Moix cornaqué à 300% par BHL et qui déclare chez Ardisson qu’il est descendant de Maranes….
L O L
XP, tout ce que vous dites est juste est pertinent, mais ne ressentez vous jamais la tentation de dépasser le stade des « idées » et de désigner des coupables, des personnes, comme Lounès ?
Non, et je ne cherche même pas à dénoncer quoi que ce soit, et encore moins à changer les choses, je cherche à montrer… Je vous jure que ce n’est pas une posture, c’est vrai.
En l’occurrence, ici, ce que j’ai envie de dévoiler, c’est le gouffre qui peut exister entre deux personnes du même sang, ou entre une personne et sa communauté de sang, et dans ce cas, la guerre incessante qui est mené à « l’étranger », celui qui est mal tombé, qui fait partie d’une communauté de sang à laquelle il n’a rien à voir.
Comme la nature est bien faite, les gens qui ont le même sang que vous ont une tendance lourde à vous ressembler, ce sont en quelque sorte des amis et des semblables donnés par la nature, et les géniteurs ont naturellement de bonnes dispositions pour devenir vos parents… Mais pour autant, ça n’a rien d’automatique, et la famille est aussi le théatre d’une chasse à l’homme, d’une « chasse à l’étranger. »
Voilà, je vois ça, et je montre ça… Je ne propose rien, je ne dénonce rien, je ne cherche même pas à me « faire » la famille traditionnelle.
« Comme la nature est bien faite, les gens qui ont le même sang que vous ont une tendance lourde à vous ressembler, ce sont en quelque sorte des amis et des semblables donnés par la nature »
Vous savez, on ne s’entend pas forcément mieux avec les gens qui nous ressemblent… Bien souvent, si l’on ne supporte pas ses parents, c’est parce qu’ils nous renvoient à la part de nous qui nous effraie le plus : notre pente naturelle, celle à laquelle nous ne pouvons rien changer.
« je ne cherche même pas à me « faire » la famille traditionnelle »
Aaah bon. Vous me rassurez.
Parce que, tout de même, sous prétexte qu’il y a des familles unies qui sont effectivement des systèmes de grégarité pervers – où le meilleur de chacun est constamment rabaissé, humilié – ne peut pas mettre sur un pied d’égalité les parents qui abandonnent leurs enfants et ceux qui s’en occupent avec dévouement, ce serait injuste.
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Après, et là je trouve aussi qu’il s’agit de quelque chose qu’il serait intéressant d’étudier, une part de l’éducation se fait effectivement « en réaction à ». [C’est en cela – « l’obéissance à-rebours » – qu’il y a un peu de chat dans l’homme.]
Il arrive assez souvent que des parents injustes, usant pour se faire obéir de raisonnements absurdes et de procédés révoltants, stimulent chez leurs enfants un désir de justice, de clarté et d’exemplarité. De même, il arrive assez souvent que les petites jeunes filles qui ont grandi sous la coupe de mères abominables, pleines de vices et de cruauté, quand elles ont été les victimes privilégiées d’une telle cruauté, se retournent contre le vice de leur mère, et évoluent en petits anges de douceur…
De même, j’ai un jour rencontré (c’était dans un cours de comédie) un garçon blindé de chez blindé – tant sur le plan émotionnel que sur le plan financier – un fils d’homme d’affaires qui avait pris la suite de son père dans ses micmacs… On aurait dit une sorte de diablotin blond, c’était un hyperactif monomaniaque sautillant à la Claude François, à peu près dépourvu de sens moral et prêt-à-tout pour réussir… Figurez-vous qu’au lieu de me marcher dessus sans me voir comme aurait normalement dû faire quelqu’un de sa trempe et de son milieu, il éprouva d’office de la sympathie à mon endroit. Comme cela m’étonnait, que je lui fis remarquer, il m’expliqua pourquoi ; il me dit que je lui rappelais sa mère. « Ma mère est une femme dans ton genre », m’avait-il dit ; « Elle est trop gentille : elle est faible. Elle me faisait toujours la morale, mais c’est toujours elle qui s’est faite avoir dans la vie. Mon père est bien gentil de lui verser une pension alimentaire, avec ses avocats il aurait pu la laisser sans un sou et elle ne se serait pas défendue. »
Suite à cette aventure je me suis fait la réflexion suivante : les enfants ne se contentent pas d’apprendre les leçons qu’on leur donne, ils en observent aussi les effets. Car on juge un arbre à ses fruits. Peut-être n’y a-t-il rien de pire que d’élever un enfant dans un culte de la tendresse et de la justice qui conduirait coup sur coup à l’impuissance et au désastre… Un enfant préfère un parent fort que pas de parent du tout, or quand l’un de ses parents est trop faible pour lutter à sa propre survie – ou lui apprendre à lutter pour sa propre survie, ce qui revient au même – il le ressent comme un abandon, comme une mise-en-danger de sa personne et de son avenir… C’est alors un peu comme s’il le laissait orphelin.
Dans un second temps, ce qu’il serait amusant d’observer, c’est de quelle façon lesdits enfants élevés par des parents indignes se débrouillent avec leurs propres enfants. En général ils vivent à ce moment-là de leur vie un véritable dilemme moral : vont-il élever leur enfant autrement – selon des standards nouveaux, qu’ils auront intellectuellement mis au point – et donc engendrer des personnes totalement différentes d’eux, avec des problèmes différents, qu’ils ne sauront peut-être pas résoudre ?… Ou bien vont-ils finalement reproduire l’injustice qu’ils ont subie, dans l’espoir secret de donner la vie à des personnes qui leur ressemblent ?
J’ai pour illustrer ce paradigme une anecdote piquante, lue dans le Journal des Frères Goncourt… C’est une anecdote au sujet de l’enfance de La Païva (célèbre courtisane), qui disent-ils leur a été rapportée (légèrement romancée) par Théophile Gautier.
Théophile Gautier raconte que la « Marquise de Païva », né Esther Lachmann en Russie, aurait été en réalité l’enfant naturel de sa mère juive et de Guillaume de Prusse … Elle aurait grandi cachée dans les jupes de cette femme – elle-même une courtisane rangée, ayant eu par le passé de nombreux amants… Jadis très belle, la dame en question aurait eu le visage ravagé par la petite vérole, à cause de quoi, par vanité, elle aurait fait poser du crêpe noir sur tous les miroirs de sa maison. Pour cela, la future Païva aurait grandi sans jamais voir un miroir – ni, donc, son propre visage – et par méchanceté, on lui aurait raconté toute son enfance qu’elle avait un nez affreux, « un nez en pomme de terre ». Comme elle était toute petite encore, et innocente, elle n’arrivait pas à se représenter ce que cela pouvait être qu’ « un nez en pomme de terre », alors cela l’aurait obsédée.
Par la suite, encore une fois paraissait-il pour cacher ses illustres origines, on l’avait mariée à un pauvre petit tailleur français de Moscou. Mais quand l’adolescente – la future Marquise de Païva – s’avisa que son nez n’avait en réalité pas du tout la forme d’une pomme de terre, elle se dit tout-naturellement qu’une fille cachée de Guillaume de Prusse ne pouvait pas demeurer ainsi à coudre des chaussettes dans le ghetto plus longtemps. Peu après avoir donné un fils au pauvre petit tailleur français, elle s’en fut avec un Prince qui passait dans le coin. Après quelques temps de grande vie parisienne, quand celui-ci, ruiné, l’abandonna à son pauvre sort dans une chambre d’hôtel, elle prit la résolution de s’y établir « à son compte ». C’est ainsi que naquit sa vocation.
Ce qui m’amuse dans cette histoire, c’est la façon typique dont la mère juive, avec un mélange de cruauté, de mégalo et très-certainement aussi de mythomanie, a pour ainsi dire « dressé » sa fille à devenir une réplique d’elle-même. ^^
Pour aérer un peu l’air après la déjection de Yann Supergoy, une des chansons les plus poignantes sur la paternité, un peu foirée comme relation père-fils, mais belle relation quand même:
http://youtu.be/-s5r2spPJ8g
Ugly Kid Joe en avait fait une bonne reprise, avec un très joli clip:
http://www.muzu.tv/uglykidjoe/cats-in-the-cradle-musikvideo/1082688/
HS:
A 30″45, ca dure quelques secondes, et c’est la meilleure de l’année: http://pluzz.francetv.fr/videos/c_a_vous_saison5_,91460992.html