Quand un journaliste fait son travail en se bouchant le nez il dit qu’il s’astreint.
A défaut de l’odorat mais en mobilisant tous ses autres sens, le journaliste de terrain s’astreint alors à aller à la rencontre de l’information nauséabonde dont il raffole même si elle le dégoûte. Il s’astreint à interroger les gens, s’astreint à les écouter et s’astreint même à les observer. Et débusque ainsi le relent nauséabond confirmant son intuition première de se boucher l’appendice nasal dès le départ.
Mais à force de se pincer le nez, celui devient peu à peu douloureux, surtout avec par froid mordant de janvier à Paris. Et devient presque gelé à la fin de son astreinte.
On hésite donc entre applaudir ou appeler une ambulance devant cette performance, que dis-je, ce sacrifice journalistique de haute volée.
Plus dur que la Syrie, plus dur qu’une garde aux urgences d’un hôpital, l’astreinte à la manif pour tous.
Maurice Szafran, puisqu’il s’agit de lui et puisqu’il était effectivement dans la manifestation d’hier (je n’ai pas pu résister à l’idée d’aller la voir), ne peut pas nier le fait qu’elle était importante.
Impressionnante qu’il dit.
Numériquement il s’entend.
Même s’il est bien incapable de trancher entre les chiffres des organisateurs et ceux de la préfecture puisque les médias sont manifestement incapables de dépêcher trois journalistes faire le même travail de haute technicité que la préfecture, c’est à dire dépêcher un couillon qui appuie sur un compteur à main coûtant moins de dix euros. Tout comme, d’ailleurs, ils sont incapables de mettre un hélicoptère dans le ciel pour filmer les manifestations importante dans leur ensemble. C’est qu’en France, que ce soit dans le cinéma ou le journalisme, on met le pognon des contribuables dans les salaires de ceux qui sont en place. Et pour le reste, on a des idées. Comme, ici, donner les deux chiffres, ceux de la préfecture et ceux des organisateurs, puis sous-entendre que la vérité se trouverait entre les deux.
Génie.
Un journaliste se plaignait hier d’avoir été légèrement insulté par un manifestant.
Il devrait pourtant s’estimer heureux de ne pas se faire lyncher par tous.
Les français sont un peuple infiniment tolérant et doux.
Mais revenons à Maurice Szafran.
Car, vous allez le voir, le fait que les manifestants étaient nombreux résonne pour lui comme un caractère aggravant.
Ainsi, le fait pour lui de s’être astreint à couvrir la manifestation ne suffit cependant pas pour écarter d’emblée le dérapage homophobe. Ainsi, même après s’être astreint à écouter, observer et interroger les manifestants, il ne peut écrire autre chose que il « n’y eut apparemment pas de dérapage homophobe ». Apparemment. Certes, il n’en a pas constaté, mais le cortège était si long… Qui sait, si, à voix haute ou peut-être seulement dans le secret de son âme, un manifestant n’a pas une parole, une pensée au moins, homophobe ?
Et puis, comme il le dit, lui-même, s’il n’y a pas eu de paroles homophobes (ce qu’il nomme dérapage homophobe, peut-être parce que certaines paroles homophobes n’en constituent pas…), Maurice Szafran a quand même bien compris qu’il s’agissait hier d’un « malaise envers l’homosexualité ». Mais, ballot comme il est, Maurice Szafran a oublié de préciser que ce malaise, réel, concernait essentiellement la filiation plus que le mariage et en aucun cas ce que font deux hommes ou deux femmes ensemble ce dont tout le monde se fout royalement. Maurice Szafran est homosexuel ? Hétérosexuel ? Transgenre ? Mais qu’est-ce que ça pourrait bien foutre de le savoir ?
Cela dérange beaucoup moins les participants à la manif pour tous que l’existence même des manifestants d’hier ne dérange Maurice Szafran.
Hier Maurice Szafran s’est frotté sous astreinte à une France qui dérange.
On en tremble.
Des catholiques défilant tranquillement pour la famille un dimanche dans Paris et hors vacances scolaires sont donc dérangeants.
Comprenez plus loin qu’en plus de ne pas partager ses réflexions ils ne seraient pas modernes.
Rances quoi.
Certes, les jeunes catholiques sont à mèches, bottes et jean slim. Certes, les sonos diffusaient les dernières musiques aux millions de vues sur youtube. Certes, le record de concentration d’iphones sur le Champ de Mars a été battu. Certes, on divorce aussi allègrement dans les nouveaux couples de catholiques pratiquants. Certes, des jeunes filles catholiques doivent montrer leurs seins comme les autres sur snapshot. Certes, beaucoup de manifestants se moquaient bien de l’ouverture du mariage en lui-même aux homosexuels, ne voyant guère de sens dans la cérémonie administrative à la mairie.
Mais ça, eh, ce n’est pas la modernité. Juste son apparat. Son illusion. Ses oripeaux.
Cette absence terrible de modernité résidant dans cette résilience insupportable à l’adoption de deux ou trois dernières lubies à la mode sur des dizaines intégrées sans souci. Terrible résistance. Foutus catholiques. Dire qu’ils écoutent encore les prescriptions bidons d’un illuminé datant d’il y a plus de mille deux cent ans… Ah non. Merde. Ça c’est les musulmans. Mais c’est encore pire avec les catholiques, leur religion est encore plus vieille. Et je ne parle pas des juifs. Je laisse Maurice Szafran s’en charger.
Elle dérange, répétons-le, mais il n’y a pas d’autre choix que d’en tenir compte ; non pas de lui céder, mais d’être capable de l’écouter, de s’évertuer à un travail pédagogique envers cette France-là, même si elle est refermée sur elle même. Ce travail pédagogique, même Francois Hollande et les siens y sont contraints.
Oui.
Effectuons un travail pédagogique.
Je pense qu’un bon travail pédagogique adapté et mené par Christine Taubira devrait pouvoir balayer sans problème des dizaines et centaines d’années de réflexion théologique sur la question de la famille pour des catholiques. Avec les puissants intellectuels qui nous gouvernent et nos courageux journalistes, l’affaire devrait être réglée en quelques semaines et l’absolue nécessité de permettre aux homosexuels de se marier devant l’adjoint au sport de leur mairie plutôt que de se pacser au greffe, et l’impérieuse urgence d’ouvrir aux homosexuels l’adoption pour que, enfin, deux ou trois enfants puissent être adoptés par eux chaque année, sera enfin reconnue par tous.
Pourquoi se crisper sur des droits qui ne coûtent rien (PMA enlevée) à donner et qui ne concernent personne ou presque ?
Cent mille familles homoparentales ? Allons ! Et pourquoi pas un million ? Tout le monde sait que cela ne concerne que quelques cas.
Assurément, il y a quelques semaines encore, on prétendait que cette réforme était d’une grande ampleur. Mais que voulez-vous. Les temps changent. Faut vous adapter.
Va, si ce n’est pas la preuve que ces gens ne sont pas modernes…
Ordures de manifestants qui vont »contraindre Hollande et son équipe à un travail pédagogique »!!!
Bien content de pas y être allé, au moins on pourra pas me reprocher d’avoir »contraint » quelqu’un à un quelconque travail pédagogique…
Tant qu’a contraindre Hollande a un travail,ce serait à un vrai travail,un travail honnête, genre qui fatigue, qui fait tomber le bedon,et qui evite de dire des conneries le soir tant tellement on est crevé….réassortIR les rayons du super ,ou gratter les canaux embourbés, ou chercher à demeller le vrai du faux dans un PV de comparution immédiate…. Un truc utile ,en somme…
En tout cas, je suis surpris de la façon très efficace dont l’information circule dans les milieux catholiques au sens très, mais alors très large, via le net, dans toute cette affaire ( et surtout dépasse le microcosme catho-net habituel). Ajouté au mépris décomplexé (mais un peu stressé tout de même) de la gauche dans les médias, c’est toujours ça de pris pour l’éveil de nos amis droitards pantoufleux.
On peut arguer qu’ils nous auront à l’usure sur ce projet, c’est ignorer la joie toute nouvelle de mamy Yvonne lorsqu’elle reçoit son mail gé quotidien de résistance du fond de Bled-les-deux-églises et son utilisation quasi malicieuse du bouton reply. Et ça peut même l’amener à mépriser le facteur et rire de Finkielkraut. Banco.
http://www.ndf.fr/vu-des-etats-unis/22-01-2013/eleve-par-deux-meres-le-point-de-vue-inconnu-de-lenfant#.UQQInI69pOx