En attendant que le sommeil revienne, j’ai parcouru le journal du soir acheté en me promenant : quelques articles commençaient encore par : « Nous, japonais, nous ne savons pas faire ceci… nous ferions bien de nous inspirer de… il faut corriger ce défaut national », etc., mais on sentait que le cœur n’y était plus et que le temps des peccavi était passé ; plusieurs faits divers sur des évadés revenus de Russie, sur tous ces gens qui vivaient encore d’aubaines, d’astuces, d’escroqueries ingénieuses sous des identités et dans des emplois qui n’étaient pas les leurs. Mais ces aléas, ces imprévus, ces existences picaresques donnaient de l’air aux idées et créaient un climat ouvert et vivant. On avait l’impression que pas mal d’impostures anciennes avaient volé en éclats avec la défaite et n’avaient pas encore repris racine. Les annonces d’écoliers japonais en quête d’échanges de timbres ou de pen friends remplissaient une page entière. La récolte de riz 1955 avait battu tous les records. La vie était encore difficile, mais le « miracle économique » commençait à payer des dividendes et le Japon se reprenait à croire à sa chance.
J’allai examiner les paquets de cigarettes soigneusement alignés sous le bar ; ils s’appelaient Peace, Love, Sincérité, Perle, Vie nouvelle. C’était peut-être un bon moment pour débarquer ici.
Nicolas Bouvier, Chronique japonaise, XIV, « Passepartout ».
…Ces aléas, ces imprévus, ces existences picaresques donnaient de l’air aux idées et créaient un climat ouvert et
vivant…
http://24heuresactu.com/2012/01/06/fellaporte-la-mode-sexuelle-delirante-des-japonaises/
C’est plus mignon que la mode des photos duckface chez la post-ado diverse en surpoids teintée blondasse de nos banlieues et autres lieux riants.
Jolis noms pour des cigarettes, les temps ont bien changé même pour les
Nippons. En attendant, il avait raison, c’était vraiment le bon moment pour
débarquer là…Comme ce serait le bon moment pour foutre le camp d’ici!
Nicolas Bouvier, c’est ce qui s’appelle un vrai baroudeur…