Fragments(2)

C’est une affaire entendue, le boulanger  vend du pain pour nourrir ses enfants, pas les nôtres…

Il lui viendra très facilement à l’idée de nous rappeler la petite note, mais jamais de nous dire qu’il travaille pour nourrir nos enfants…. Pourquoi donc l’instituteur tient-il  mordicus à nous vendre l’idée qu’il instruit nos enfants, pourquoi l’infirmière se raconte-t-elle qu’elle nous soigne, et qu’est-ce qui peut passer dans la tête d’un paysan français, pour qu’il se persuade qu’il nourrit la France? Quand vous achetez du pain à vos enfants, il est bien établi que c’est vous qui les nourrissez, alors pourquoi, lorsque vous payez l’instituteur, on considère que c’est lui qui les instruit?

Comme c’est une affaire entendue,  que le boulanger travaille pour ses enfants et pas pour les nôtres, c’en est une aussi,  qu’on contracte auprès de lui une dette financière en  prenant  notre pain chez lui, qu’on ne lui doit plus rien quand il a été payé, et que d’une certaine manière, on se libère de lui, en lui donnant du fric.

La différence entre l’artisan boulanger et l’instituteur, c’est donc que le premier assume de ne travailler que pour lui et ne nous réclame qu’une dette financière, tandis que le second prétend travailler pour nos enfants et nous réclame une dette morale… Or, La différence entre une dette financière et une dette morale, c’est que la seconde,  elle ne s’éteint jamais, qu’elle se reporte sur les futures générations, qu’on ne peut jamais la solder, ni même la négocier, qu’elle ne fait pas l’objet d’un contrat et qu’elle est arbitrairement évaluée par le créancier.

Celui qui est réputé n’avoir pas acheté un service mais l’avoir reçu, il devient de facto  un esclave de père en fils… Si le socialiste estime que dans le cadre d’une économie planifiée,  l’instituteur ou l’infirmière ne vous ont rien vendu mais qu’ils vous ont servi, alors, si vous remettez en cause la planification économique, vous n’êtes pas un contradicteur, mais un traître et un voleur.

Les patriotes disent des exilés fiscaux qu’ils sont des voleurs qui refusent de payer leurs dettes contractées auprès de leurs instituteurs  et leurs infirmières, et partant, ils disent rigoureusement la même chose que Fidel Castro, lequel faisait tirer sur les bateaux pneumatiques des fuyards en beuglant la Patrie ou la mort.

 

Il y avait en URSS des opposants enfermés dans des camps de concentration, et des maniaques sincèrement attachés à leurs servitudes et à leurs Maîtres… Il est fort possible que ces maniaques amoureux de leurs bourreaux aient été bien plus nombreux que les prisonniers politiques, et si tel était le cas, on pourrait en conclure que le Politburo était l’émanation de la souveraineté populaire, que le peuple était souverain, en URSS, mais surtout que le principe de liberté n’a rien a voir avec celui de la souveraineté populaire.

Si dans un pays, dix millions d’esclaves par tempérament s’octroient souverainement le droit  de tourmenter le seul homme libre qui traîne dans les parages, alors il s’agit d’un régime totalitaire qui mérite d’être bombardé par l’OTAN. Si à l’inverse, on flique les dix millions d’esclaves pour que le seul honnête homme de ce pays  ait la paix, alors il s’agit d’un Etat de Droit.

 

Avant, dans ma jeunesse, lorsque je croisais un distributeur de tracts communiste, j’allais vers lui pour tenter de lui expliquer que sa doxa est criminelle et qu’on met ses coudes dans du sang, quand on est encarté dans une officine communiste… Aujourd’hui, je ne dis plus rien, parce que je sais qu’il le sait, et même que c’est pour ça qu’il distribue des tracts… Pour assouvir une pulsion de mort, une très banale pulsion de mort.

 

Pompidou disait des paysans que ce sont des paresseux qui se lèvent tôt.

La masse des fonctionnaires, c’est  la paysannerie qui a fait une descente en ville, et l’exode rural, ca n’est jamais que l’odyssée de millions de culs plombés,  l’histoire d’un bon million de vieux fainéants  qui ont mis leurs fils et leurs filles dans les trains dans les années 1960 pour qu’ils aillent en ville  faire l’employé des postes, l’ instituteurs ou l’ inspecteur du fisc, parce qu’avec leur intelligence de serfs, ils avaient compris que c’est comme ça, que tout allait continuer.

Quand la moitié de la France était paysanne, la moitié de la production d’une famille paysanne était, par définition, de l’autoproduction… Si l’on ajoute qu’en plus, ce n’était pas la morale qui étouffait la France ancestrale et que le paysan faisait travailler ses vieux, sa femme enceinte jusqu’aux yeux et ses enfants, il n’est pas difficile de comprendre qu’il ne faisait lui-même pas grand chose, le plouc de la France d’avant. …

Nos grand-père agriculteurs savaient que jusqu’à leurs derniers souffles, ils auraient une vie de merde, mais toujours trois poireaux et deux pommes de terre dans leur jardin pour faire la soupe… Leurs descendants  les employés des postes en vélo, ils continuent, ils  veulent qu’on leur garantisse  leurs deux poireaux, leurs trois pommes de terre et qu’on les assure que la vie va continuer toujours aussi mal, certes, mais jamais plus mal  et sans secousses.

 

 

La mentalité paysanno-fonctionnariale hait toute forme d’innovation, toute personne qui s’écarte du droit chemin de l’improductivité tracée par leurs ancêtres est un traître, ils attendent avec impatience le moment où il tombera, et si ça n’arrive pas, ils feront en sorte que ça arrive.

Une des premières formes d’industrialisation des campagnes s’est produite quand un industriel du tissu s’est rendu compte que les paysans avaient énormément de temps libre à la morte saison. Il a d’abord fait livrer des machines à tisser dans les fermes, en faisant naître une forme d’industrialisation décentralisée. Les paysans auraient logiquement dû voir un moyen d’augmenter leurs revenus et leur niveau de vie …  Même pas,…  Ceux qui acceptaient de travailler sur ces machines en hiver étaient vus comme des traîtres, des semi-paysans, de quasi-ouvriers des villes.

Il faut aussi parler de l’arrivée de la pomme de terre en Allemagne : Un excellent produit , qui ne nécessite que très peu de travail par kilo , qui permet de vivre et de vendre même en cas de mauvais temps ou d’épidémies , qui permet même aux populations d’être auto-suffisantes en cas de troubles divers, d’un mot  la panacée … Et bien figurez-vous que les producteurs de blé essayaient de bloquer les exportations , que des scientifiques faisaient tout pour affirmer que la pomme de terre était impropre à la consommation , qu’elle était tout juste bonne à nourrir les porcs …

Ne surtout rien changer …  Et si ça bouge, taxer …  Ca nous permettra de continuer à vivre de la même manière même si le monde change. (1)

 

(1)Merci à Prolo

 

25 réflexions sur « Fragments(2) »

  1. Vertumne

    « Pompidou disait des paysans que ce sont des paresseux qui se lèvent tôt. »

    C’est une idée reçue que de croire que « nos ancêtres se cassaient le dos pour produire une mesure de farine ». Comparée aux travaux des secteurs secondaire et tertiaire, l’agriculture nécessite en réalité peu d’énergie, d’esprit et surtout de capacité de concentration. Certaines journées étaient éreintantes mais la plupart du temps, c’était ennuyeux, répétitif et facile, tant et si bien que les enfants avaient les capacités d’aider aux champs comme de petits adultes. De l’Irlande à l’Anatolie, les aptitudes que l’on demandait au paysan étaient une certaine résistance physique pour supporter la vie au grand air, un bon système immunitaire pour résister aux nombreux germes apportés par les animaux de ferme et des besoins nutritionnels faibles pour ne pas engloutir trop vite sa production. Ces qualités étaient et sont réparties très équitablement dans l’ensemble de l’humanité.

  2. Vertumne

    A l’inverse, le travail du secteur tertiaire est horriblement exigeant intellectuellement et physiquement:

    -vous êtes astreint sept heures par jour au minimum à rester assis devant un ordinateur, ce qui pour la majorité de l’humanité descendant de paysans, de bergers, et de chasseurs cueilleurs est une véritable torture.

    -vous devez être productif à court terme (une journée, parfois moins), ce qui est encore un fois inatteignable pour des populations qui n’ont pas été sélectionnées génétiquement pour cela. La faible capacité de concentration et la mauvaise aptitude au raisonnement abstrait de la majeure partie de l’humanité la rend encore une fois peu apte à ce travail.

    -à cause du mode de vie sédentaire, vous devez avoir un métabolisme très gaspilleur ou sinon votre corps va assimiler chaque molécule de gras et de sucre de votre alimentation et vous transformer en obèse. L’obésité étant la maladie de la transition de la vie pré-tertiaire à la vie tertiaire. Les populations les moins bien adaptées génétiquement au tertiaire ayant tendance à grossir en raison d’un métabolisme hérité des périodes de disette

    1. Vae Victis

      Très juste.

      Pour de ne pas devenir une boule de gras :
      – Ne surtout pas écouter les nutritionnistes. Trois repas par jour équilibrés, alors qu’on reste assis devant un ordinateur toute la journée, c’est la quasi assurance d’avoir 20 ou 30 kilos de trop à 40 ans. Il faut impérativement baisser les apports énergétiques, à moins d’avoir un organisme très dépensier.

      – Faire du sport pour se maintenir en forme.

      Un emploi dans le tertiaire demande donc de passer pas mal de temps à se concentrer sur des activités abstraites, mais aussi de gérer sa vie, avec un régime adapté, en s’aménageant des activités sportives chronophages, pour s’aérer l’esprit et générer des efforts physiques.

  3. kobus van cleef

    la fille de la photo , e, pull over jaune, a de fabuleuses tétasses , que l’on imagine moëlleuses sous l’étoffe pelucheuse
    en plus de ça , elle a une tête a baffe , Habsolument réjouissante ,le genre de tronche qui doit donner des idées à DSK
    ou la conjonction des deux , la tête et les tétasses

    1. nicolasbruno

      Si vous aimez, je ne doute pas que vous aimerez Sophie Guillemin dans l’Ennui, si vous ne l’avez pas déjà vu bien sûr.
      Bon, depuis, elle a mis le voile; elle a préféré choisir le chemin de la tête à claques que celui de l’icone callipyge. Dommage…

      1. kobus van cleef

        c’est sophie guillemin ?
        écoutez , j’ignorais le nom de cette femme là

        en fait , ça m’est égal
        pour plusieurs raisons
        – je met un point d’honneur à ne regarder aucun film français , à part peut être les OSS117 , juste pour faire chier mon entourage cultureux
        (pas que je regarde l’inspecteur harry pour autant , hein, mais clint eastwood disant « tu vois, tucco, dans la vie il y a ceux qui ont un revolver et ceux qui creusent » avouez que c’est DU cinéma)
        – TOUS les auteurs vronzais , sans exception, sont pourris par le système d’exception culturelle et d’avance sur recettes
        – TOUS les critiques de cinéma frankaouïs me donnent des envies de meurtre , surtout lorsque je les écoute sur vronze-cul (vous me direz aussi que chuis con de m’infliger pareille torture, c’est vrai, mais c’est vrai aussi que « le meilleur maître est l’ennemi »)

        bref, pour en revenir à la jeune femme porteuse des appâts mammaires sus mentionnés , y a de quoi réconcilier un radiologue avec les 24×30 ( blague à usage corporatiste)

        non, l’idée de la tête à baffe m’est venue un jour que je lisais une recension de libé , un folliculaire qui avait suivi marine le penn dans une campagne quelconque, et qui disait à peu près « elle a la tête de ces filles qu’on baise debout contre un mur et qui vous demande de les gifler lorsqu’elles vont jouir »
        je me suis longtemps demandé si ça pouvait s’appliquer à notre bonne marine
        évidemment pas
        déjà , pour tringler une fille debout contre un mur , il faut être heureusement pourvu par la nature , ensuite , il faut avoir une espèce de….rage?….désir? …toutes choses hors de la portée d’un folliculaire ressasseur de torchon pour bobos
        ensuite , je doute que , dans ce type de circonstances , ce soit la marine qui encaisse les baffes…elle a déjà lourdé quelques maris, voyez….le folliculaire de libé serait au tapis avec sa zézette sur l’oreille…

  4. hiver

    Le passage sur le boulanger et l’instituteur me fait penser à cette conférence TED édifiante à propos des écoles privés low cost dans des bidon-villes un peu partout dans le monde. Sans grande surprise, celle-ci proposes en moyenne des enseignements et des conditions de travail bien supérieure aux écoles publiques. Un excellent exemple de la façon dont un marché libre peut apporter une réponse pertinente et efficace à un domaine que beaucoup sont prêt à ranger dans la catégorie des activités régaliennes…

    http://www.youtube.com/watch?v=gzv4nBoXoZc&feature=player_embedded

  5. Vlad XXII

    Toute votre argumentation n’a strictement aucun sens puisque votre postulat de départ est faux.

    Vous écrivez :
    1) « le boulanger vend du pain pour nourrir ses enfants, pas les nôtres »

    Et vous vous lancez un foireux parallèle avec les instituteurs et les infirmières, en écrivant :
    2) l’instituteur « instruit nos enfants » et l’infirmière « nous soigne ».

    Or ce sont des lapalissades ! L’institeur instruit et l’infirmière soigne comme le boulanger… boulange.

    Si les phrases du 2) étaient inexactes alors, d’une part, il faudrait se demander en quoi consiste leur métier, et d’autre part vous devriez également être contre l’idée même que le boulanger fabrique du pain !

    Bref, votre article n’aurait eu de sens que si vous aviez écrit trois phrases strictement identiques :
    « le boulanger vend du pain pour nourrir ses enfants, pas les nôtres »
    « l’instituteur instruit nos enfants pour ? »
    « l’infirmière nous soigne pour ? »

    or vous n’indiquez strictement aucun but, comparez donc des affirmations sans aucun rapport logique, et finissez par redécouvrir des truismes.

    La seule comparaison qui tienne à peu près la route est celle avec le paysan, puisque nous retombons sur une structure logique :
    « le paysan cultive la terre pour nourrir ses enfants, pas la France »

    Mais je suis généreux, et l’incohérence de départ m’empêche de prendre le reste au sérieux.

    1. XP Auteur de l’article

      On s’en tape complètement, de qui vous prenez au sérieux ou pas, on vous connait pas. Et on a pas envie de vous connaître.

      Ici, il y a une règle implicite: les commentaires doivent être intelligents. On apprend à lire d’abord, et on commente ensuite.

      1. XP Auteur de l’article

        « qu’il ne sait pas lire un texte elliptique »

        Exactement. Celui qui l’esprit lent a besoin qu’on soit très précis, il est lui-même inutilement précis, et il appelle sa lenteur de la précision. Ca rejoint ce que je disais sur les vieux professeurs et les cours magistraux.

        Quand on raconte une blague, notre ami doit être du genre à l’expliquer en riant à ses voisins de table.

        1. XP Auteur de l’article

          N’empêche que l’ami Tchoxk vient sans le vouloir de faire une belle demonstration, qu’il en soit remercié: il faut qu’un texte soit imprécis pour être intellectuellement stimulant et satisfaire de bons lecteurs. D’où l’intérêt des formats très cours.

            1. Vlad XXII

              Ah ! Vae Victis…
              Ces six dernières années ne vous ont pas changé d’un iota.

              Toujours cette promptitude à venir défendre le boeuf et le gobelin, même quand personne ne vous a sonné.

              Etes-vous finalement devenu avocat, dans la vraie vie ?

  6. Nicolas

    « il faudrait se demander en quoi consiste leur [infirmière et instituteur] métier »

    Si nous parlons bien des « services publics » (que-le-monde-entier-nous-envie™ et qu’il-faut-sauver-parce-que-c’est-pas-une-marchandise©), ils n’ont pas de métier. Ils ont un statut : fonctionnaires.

    Ils n’ont pas de salaire, mais un traitement.

    Ils n’ont pas de lieu de travail, mais un poste auquel ils sont affectés.

    Ils ne travaillent pas pour une entreprise, mais pour une administration.

    Laquelle n’a pas d’utilité économique, mais est une service public dont on prétend qu’il est si important qu’on doit y engloutir de la richesse créée par les autres et qu’on leur prend via l’impôt.

    Service public si important qu’on leur donne d’ailleurs comme droit sacré le droit d’interrompre leur travail pour emmerder le monde, ça s’appelle le droid’grève.

    Bref les leçons de logique et de cohérence, hein…

    1. Vlad XXII

      « ils n’ont pas de métier. Ils ont un statut : fonctionnaires. »

      Si vous décidez de prendre ce chemin un peu trop escarpé, me semble-t-il, pour vos gros sabots, alors le cadre qui bosse dans le privé n’a pas non plus de métier, mais un statut. De même, finalement, que toute personne exerçant un métier régi par une convention collective.

      « Ils n’ont pas de salaire, mais un traitement.  »

      Si ce n’est pas de la novlangue, ça…

      « Ils n’ont pas de lieu de travail, mais un poste auquel ils sont affectés.  »

      Et le poste auquel ils sont affectés, il est en plein air ? Vous êtes d’un ridicule…

      Il faut que les mots aient un sens, ici, ou bien il est exigé de raconter tout et absolument n’importe quoi ?

      « Ils ne travaillent pas pour une entreprise, mais pour une administration. »

      Dieu du ciel ! c’est l’antre des inventeurs du fil à couper le beurre, ici ! La Palice, j’écris ton nom !

  7. Vertumne

    Voilà une vidéo absolument indispensable, où l’on voit Michel Onfray taper sur Disney parce que ce dernier « méprise le peuple en faisant la promotion d’une culture populaire » et en arrive in fine à faire l’éloge de l’URSS, parce que la Culture (avec un grand C) y était gratuite et que les prolos pouvaient aller à l’opéra.

    http://www.youtube.com/watch?v=HRI-KD1TzGk&feature=g-vrec&context=G2b4f8c5RVAAAAAAAABw

  8. XP Auteur de l’article

    Je ne résiste pas à vous faire découvrir ça, ne serait-ce que pour le passage sur Régis Debray. Hillarant!

    Par Gaspard Proust

    Cher Nicolas,

    J’en ai marre. Marre de te voir galérer sur les plateaux télé et dans les sondages. Maintenant, il faut arrêter tes histoires de « vague » et de « je la sens bien », et mettre le turbo. Si ça ne prend pas, what the fuck, t’auras été toi-même !

    Sans déconner, ressaisis-toi ! Go back to basics ! Au soir du premier tour, va dîner au Fouquet’s, avec trois Rolex à chaque poignet, Ray-Ban en platine et verres en diamant. À la sortie du rade, jette à la foule ahurie ta note de la soirée, et je t’en supplie, ce soir-là, mets-toi au grand cru ! Vide-leur la cave, ne prends pas une bouteille en dessous de 3 000 euros ! Et si dehors ça hurle, joue la provoc, ouvre ton Burberry façon Jack l’éventreur et exhibe ton nouveau t-shirt sur lequel il y aura marqué « KARCHERIZE ME, BITCH ».

    Arrête de t’excuser, assume ! Fais revenir dans ta campagne ce merveilleux gimmick ; le « Oui, je pense ça, et alors ?! ». Cette figure rhétorique ravageuse inspirée du « je préfère être riche et bien portant plutôt que pauvre et malade. Pas toi ? » Heu… oui… » Alors, fuck it !

    Ta force, c’était ça, le truc décomplexé qui faisait que lorsqu’elles t’interrogeaient sur les plateaux télé, les minettes du PAF dégorgeaient fissa dans le Tampax.

    Quand elles te posaient une question, c’était toujours dans l’idée de te coincer. Forcément, 80 % des journalistes sont de gauche, manière polie de dire qu’ils n’y connaissent rien à l’économie. Tu connais l’adage : « Les bacs S font de l’argent, les bacs L en parlent. »

    Du coup, les journalistes, leur seul axe, c’était de t’astiquer sur la morale, donc ton rapport au pognon : « Monsieur le président, il paraît que vous aimez les riches ? » « Oui. Et alors ? Vous-même, le PIB de la France, vous le préférez plus proche du Soudan ou de la Suisse ? » « Ben, heu… » « Ben vous voyez… » « Quoi, qu’est-ce qu’elles ont mes Ray-Ban ? Vous, quand il y a du soleil, vous mettez quoi ? Des rondelles de courgette ? » « Ben, heu, non… »

    On te cogne sur le chômage ? Réponds comme à la grande époque : « Oui, le chômage a augmenté, mais vous ne trouvez pas que le chômage, c’est aussi une fantastique opportunité de temps libre qui permet de se consacrer à la recherche d’un emploi ? Et je devrais m’en excuser ?! » Et bim !

    Et si on t’allume sur les patrons qui s’augmentent en temps de crise, surenchéris comme tu en as le secret : « Mâme Chabot, ce qu’il faut en ce moment, c’est du courage… Et vous ne trouvez pas que le vrai courage, c’est de s’augmenter quand on n’en a pas les moyens ? Je ne serai pas le président qui découragera le courage ! Et bim, bam, boum !

    Ose l’aplomb ! Comme Ségolène ! Propose de faire raccompagner chaque clandestin par un flic jusqu’à sa case au Mali. Dis au peuple que tu vas diminuer les dépenses en augmentant les dépenses ! Personne n’a jamais osé, il y a un créneau à prendre !

    Jette une vision d’avenir démente – la démence est tendance -, dis que dans 30 ans tu veux que la France ressemble à un rideau de douche. Pourquoi un rideau de douche ? On s’en fout, c’est de l’avenir, on ne le connaît pas, alors pourquoi pas !

    Clive jusqu’à rassembler ! Dis que si t’es élu, tu feras la politique de Cheminade avec la compétence de Poutou. Que tu nommeras Artaud à la Bourse, Bouygues chez Emmaüs et Eva Joly aux objets trouvés. Explique qu’un jour tu marieras Jean-Luc et Marine ! Que ces deux-là, ils se détestent trop pour ne pas s’aimer et que tôt ou tard ils se mettront des tartes avant que le hibou écarlate n’aille lui crémer la raie comme à la grande époque du couple Taylor-Burton.

    Du rêve, de l’audace, je te dis ! Plutôt que de faire chier les paradis fiscaux, ouvres-en un en France ! Déclare-le septième zone franche ! Convoque une conférence chez Vuitton, pose-toi dans un sac à main et annonce que tu vas classer le riche au patrimoine français ! Il est en voie de disparition ! Fais de Neuilly une réserve d’Indiens avec heures de visite et petit train!

    Fous-y le Loft, dans leurs hôtels particuliers ! Montre aux gens que le riche bosse juste pour oublier à quel point ça l’emmerde de pouvoir tout se payer. Fais-leur miroiter, aux pauvres, à quel point c’est pénible d’aller acheter un Matisse chez Christie’s et de débander au troisième coup de marteau du commissaire priseur !

    Et surtout, ne cherche pas à soigner ton langage. N’écoute pas Debray qui pleurniche sur tes prétendus 250 mots de vocabulaire. Selon cette logique, s’il s’était présenté, les Français auraient élu le Petit Robert président de la République ! Toi, trace ta route, n’utilise que deux mots : « moi » et « je » ! La présidentielle, ça se joue sur un homme, alors va à l’essentiel !

    Déconne pas, Nico, ose en grand, fais dans le sublime ! Si c’est Waterloo, il faut que ça sonne comme Austerlitz ! Et si, vraiment, ça devait tourner mal, au lendemain du premier tour, propose de pousser l’ouverture jusqu’à démissionner et nommer un président de la République socialiste. Et qu’ils se démerdent !

    Un électeur anonyme

    http://www.lepoint.fr/chroniqueurs-du-point/gaspard-proust/vas-y-nico-lache-toi-16-04-2012-1452080_562.php

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