Moi, je suis une grande gueule, dans la vie.
Ma nature et mon genre me poussent à faire des mots, comme si j’étais un écrivain français mineur né vers 1880, une espèce de Sacha Guitry venu au monde avec l’indécrottable manie de trop parler, de faire tout le temps du bruit avec sa bouche et déposer une merde tous les trois mois dans la boîte aux lettres de son éditeur… je crois à la réflexion que ce n’est pas mieux d’être comme ça que d’avoir un bec de lièvre ou les oreilles d’un ouistiti….
C’est triste, mais je suis un métèque du sud de la Loire, en dépit d’une ascendance qui était plutôt prometteuse…. Figurez-vous que lorsque j’étais gamin, à la campagne, j’ai dormi jusqu’à mes quatorze ans dans la même chambre que mon grand-père, que je me souviens comme si nous y étions du bruit que faisait au matin sa pisse dans le pot de chambre et du rire que lui inspirait la satisfaction de voir encore une fois le soleil, tandis que je ne me rappelle pas de l’avoir entendu prononcer une phrase…. Une heure après le pipi, je le trouvais devant son journal dans le salon, il levait un sourcil pour m’adresser son bonjour, et mon Dieu, il était si bien dit que je m’en souviens encore.
Un jour, le Général de Gaulle a prononcé une phrase définitive à propos des gens nés au sud de la Loire, en disant de l’Arabe Bourguiba que s’il était né quatre cent kilomètres plus haut, il aurait fait un excellent maire de Marseille… Comprenne qui voudra, mais moi, je me repasse toujours cette formule, quand un provençal ou même un auvergnat me caresse le dos pour me saluer, en me parlant fort comme si nous étions au théâtre, qu’il était l’acteur et que j’étais le public… Moi, j’aurais voulu naître avec le don de chuchoter, que l’on ait dû me forcer depuis l’enfance à redire les choses, parce que l’expérience m’a appris que c’est la marque des élus, que de n’avoir pas de voix, de ne pas savoir où foutre son corps et d’avoir l’air emprunté tout le temps, au point de mourir de peur en croisant les filles, dans la rue … Je suis jaloux comme un poux de la timidité des anges et des albatros qu’il m’a été donné de croiser, et je le jure sur ma tête, j’aurais voulu ressembler à ça.
Je ne suis pas encore mort, mais j’y pense…. Je me demande ce qui va me traverser l’esprit, quand je verrais qu’il ne me reste que trois-quarts d’heure…. J’avoue que j’attends tout ça avec de l’appréhension, certes, mais aussi de la curiosité, parce que mes instincts de joueur de poker me font saliver d’impatience… J’imagine que je ressentirais les mêmes choses que ce soldat de 18 ans puceau de l’horreur et de la volupté envoyé par les sudistes se faire trouer la peau, qui a reçu un balle dans le ventre et qui a raconté dans ses mémoires qu’elle lui a fait le même effet que le sabot de son cheval Jumpy, lequel le frappait tous les jours à la ferme depuis son plus jeune âge…. Je vais sans doute me repasser toute ma vie et me dire My God, c’était ça, tout ça pour ça…
Pardon pour le truisme, mais je sais déjà qu’il n’y a de richesses que d’hommes et que je traînerais dans la tombe les rencontres que j’ai faite, le merveilleux souvenir laissé par celles et de ceux qui m’ont murmuré des choses aimables à l’oreille. C’est terriblement con à écrire et ça ne saute pas aux yeux, mais enfin, les faits sont là: nous avons été envoyés sur la terre pour nous aimer.
http://www.dailymotion.com/video/x8rszw_alain-bashung-sur-un-trapeze_music
Enfin !
« Moi, j’aurais voulu naître avec le don de chuchoter, que l’on ait dû me forcer depuis l’enfance à redire les choses, parce que l’expérience m’a appris que c’est la marque des élus, que de n’avoir pas de voix, de ne pas savoir où foutre son corps et d’avoir l’air emprunté tout le temps, au point de mourir de peur en croisant des filles dans la rue … Je suis jaloux comme un poux de la timidité des anges et des albatros qu’il m’a été donné de croiser, et je le jure sur ma tête, j’aurais voulu ressembler à ça. »
Parfait… Cela me rappelle l’homme de main de Leroy qui parlait de votre filet de voix au téléphone… On me fait aussi répéter une fois sur deux ce que je dis…
Bleu pétrole est un album essentiel, le plus beau testament dont un chanteur puisse rêver je crois. Bashung est de tout façon, avec Manset, un des seuls que j’écoute en variété française. Ils ont travaillé ensemble d’ailleurs, pour écrire une des plus belles chansons que la France ait produites, cioranienne en diable, bien entendu…d
http://www.youtube.com/watch?v=nlkBV-5imBg
Ah , d’accord . Vous allez republier jusqu’a atteindre le quota d’éloges ? C’est un plan quinquénal Xpéen ?
Pour nous aimer nous-même ou nous aimer les uns les autres ? Pas bien compris…
Moi ce qui m’a le plus frappé chez mon grand père, ce n’est pas la pisse, mais de voir un jour ces couilles pendre entre ces jambes à contre jour alors qu’il se lavait les dents tout nu dans la salle de bain. Je l’admirais – admiration conformiste d’un enfant pour un adulte, rien de plus – et j’avais fait un effort pour me lever à la même heure matinale que lui… En voyant ce truc pendre entre ces jambes, j’ai aussitôt compris que la vie ne serait qu’une longue suite de déceptions, je suis retourné me coucher sur la pointe des pieds et je n’ai plus jamais cherché à me lever en même temps que lui.
Quant à Bashung, je l’ai vu un jour en concert dans une salle déserte (1979 sans doute), nous n’étions que quelques dizaines massés près de la scène. Je suis grand, très grand ; il était petit, très petit, si bien que lui debout sur la scène et moi debout devant, nous étions quasi face-à-face. Du coup, ça m’a fait penser à Petrucciani que j’avais vu une après-midi faire des gammes au piano dans un Fouquet’s désert quelques jours avant. Après, je n’ai jamais pu écouter un disque de Bashung sans penser à Petrucciani, au point d’enlever le disque de Bashung pour écouter Manhattan Project, le seul disque de Petrucciani que j’ai jamais eu (et encore, ce n’est pas vraiment un disque de lui). Ils sont tous les deux morts aujourd’hui. Mon grand-père aussi.
Et moi, je suis de plus en plus grand.
À part ça, je m’en voudrais d’écrire un texte intime et de citer Guitry, de Gaulle, Bourguiba et Fernandel. Mais je ne vous en veux pas.
J’aime beaucoup votre Commentaire, sur la forme. C’est très bon, on dirait du XP.
« À part ça, je m’en voudrais d’écrire un texte intime et de citer Guitry, de Gaulle, Bourguiba et Fernandel. Mais je ne vous en veux pas. »
Vous venez de faire un comm assez intimiste en citant Bashung, Petruciani… et moi je ne parle même pas de Fernandel. Mais je ne vous en veux pas.
Sinon, à propos de Petrucciani, savez-vous que c’est aussi le nom de famille de Loana, la fille qui s’était fait prendre dans la piscine dans Secret story? Elle doit moins bien jouer du piano, mais il faut reconnaître qu’elle était bien mieux gaulée que son cousin, à l’époque.
J’avoue que Fernandel, c’était un peu bas… mais j’étais de méchante humeur ce soir.
Puisqu’on parle de lui, j’ai entendu son fils se plaindre un jour sur une radio quelconque de la difficulté de porter ce nom dans la vie… Sauf que Fernandel est un nom d’emprunt.
Et avec Loana, vous me mettez dans de beaux draps : je ne vais plus pouvoir écouter un disque de Petrucciani maintenant…
C’est pas bien de parler de Fernandel dans un texte? Vous avez lu ça où? Vous êtes un GVD? Je parle de Fernandel quand je veux.
Vous voudriez que je cite Ciceron et Tite-Live, même si c’est pour répéter des âneries qui ont été dites cent fois dans le journal ou sur les forum citoyens?
Vous n’auriez pas une légère tendance à yoyoter de la touffe ?
Bref, heautontim, vous avez découvert que dans cette vie, il y avait une couille dans le potage^^
Commentaire magnifique. C’est encore meilleur que du XP en fait (mais ne le lui répétez pas ou il va m’en vouloir).
(je dis que c’est meilleur que du XP parce que je lui en veux de traiter Sacha Guitry d’écrivain mineur qui fait du bruit et dépose des merdes, non mais putain.)
ET Fernandel, ne serait-ce que pour un film (Le schpountz), c’est un génie. Si vous le niez, je serais obligé d’insinuer que vous faites des choses avec votre mère à la façon de J.Leroy (insinuer à la façon de JL, pas faire les choses). Ce qui m’embêterait, étant un ivrogne, mais pas communiste.
Tiens, j’allais dire la même chose que Gil pour Fernandel, mais on est loin de devoir s’arrêter au Schpountz. Et le bouleversant Fernandel du premier Don Camillo de Duvivier où on le voit porter la croix en un magnifique hommage au Calvaire? Même le Fernandel d’un pur délire comme son voyage dans le temps (le supplice de la chèvre^^)est un délice,un très grand acteur ce monsieur.
Bon, quel est l’extraordinaire barjot connaisseur qui nous a mis John Norman en share? C’est que je l’ai lu Norman! (au moins jusqu’à Captiv of Gor franchement mauvais), c’est un sacré tour de manège! Ah, Les assassins de Gor, Le Jeu, La Pierre du foyer, l’Ubar des Ubar, les prêtres rois…Toute ma douce enfance. Félicitations.
Tiens, vous êtes vivant Restif ?^^
Oui bien sûr Fernandel est un grand acteur, mais je crois que Le Schpountz est son meilleur film, en plus d’être un chef-d’oeuvre total.
vivant, vivant, je sais pas trop, plutôt l’impression d’être une momie mal empaillée qui se démaillote en marchant. Quel est le crétin qui a prétendu que le travail était une fervente dilatation de l’être. Encore un qui a oublié les paroles du christ sur les lys « qui ne filent ni ne tissent » et les oiseaux du ciel « que le Père nourrit ». Finalement le Christ et Nietzsche se rejoignent parfois, ce qui n’étonnera pas Nebo^^.
Salut a vous Gil, félin fêlé flingué du foi (c’est pour l’allitération zévidemment ^^)
Et Guitry quand même hein, c’est pas Ibsen !
Ibsen est très surfait. La preuve : il n’a jamais été foutu de faire un film, contrairement à Guitry !
Salut et bonne nuit à vous, Resstaïfe.
@ restif ( de la b…?)
« le tarnier de gor » ?
peut être pas…
Comment allez vous Kobus ? J’espère que la zone grise est toujours toute crépitante des plus nocives radiations et que l’oreiller suprême est toujours ovale.
Alors vous lisez l’immonde Norman.Rien de ce qui est infâme ne vous est étranger. Je finirai pas penser que vous avez glissé du hollandisme au bayroutisme . Gravissime dérive Vous vous radicalisez.
Merci Gil. A vous relire.
@ ami restif
mais ça va très bien , ami
ça crépite pas mal chez l’ami stag , comme dans un bon tarkowski
j’ai fait bien pire que de lire normann , savez vous
j’ai fait la promo d’immondices littéraires en prétendant les avoir apprécié
et l’âme naïve les ayant achetté , venant me trouver ensuite et me disant « t’as trouvé ça bon , toive? » , je ne trouvais rien de mieux que d’asséner, raide comme balle « mais c’est très bon,bordel ! comment tu peut ignorer ça ? »
faut croire que ça se transmet génétiquement, mon gamin devient coutumier du fait
il est certain que les bouquins de son époque (la nôtre , donc, car on ne peut pas changer d’époque, je veux dire , à moins de pas travailler, de rester chez soi ou en maison de retraite) sont considérablement plus nul qu’auparavant, ou que la barre a baissé , tant sur le plan de la littérature que des lecteurs ( on glorifie le gosse qui se cogne tout harry potter , mais peut être est ce un titre de gloire , tant tellement c’est chiatique )
mais on eput faire la même chose avec des tas de trucs, des expériences sexuelles ( « j’ai pas trop kiffé le truc avec tes doigts dans le cul » « mais , ma chérie , ça se fait couramment entre gens non mariés et plus encore entre couples illégitimes »), aux fringues (« le bénouze serré du cul , ça me semble un peu has been , non? » « mais mon garçû, c’est le fait de dire has been , qui est has been ») en passant par les pratiques professionnelles (« l’abandon de cette procédure me semble pas rentable, enfin je veux dire , financièrement bien sûr mais aussi sur le plan de l’investissement intellectuel qu’on avait consenti pour bien la roder » « ha bon , écoutes , mon gars, dans notre groupe, on a to-ta-le-ment abondonné ça , on en entend plus parler depuis, ho bien , 6mois, de toutes façon , les recommandations des autorités de tutelle la rendent caduque à court terme, faut déjà anticiper »)
bref, vous aurez pigé que je suis un ignoble manipulateur
Je n’en ai jamais douté. Et un manipulateur qui s’avoue tel est un manipulateur au carré. Personnellement je me contente d’être parfaitement idiot, les neurones alimentés au néant, et je laisse les autres projeter sur moi les pensées, intentions et coups tordues qu’il me prêtent. C’est, du coup, un vrai bonheur de les voir s’emmêler le Machiaviel en reniflant des sournoiseries inexistantes. 3Le royaume des cieux apparient aux simples d’esprits ». Et qui est plus simple que moi dans sa saisie heuristique d’un étant qui se déploie à travers une ereignis qui ne conduit pas à l’Etre mais à son approche dévoilante? C’est clair comme de l’eau de roche non souillée par la tekne réifiante qui transforme le monde en une parole évidée de tout sens et l’homme en une prothèse de la machine non? .(M’étonne d’ailleurs que nicolas s’intéresse encore à la gueuse alors qu’elle n’est que la fille de la machine. )
Le bourreau de soi-même (héautontimorouménos) : comment-pouvez vous user d’un tel langage envers XP ? Cet être charmant est d’une délicatesse extrême et vous le tancez vil de la syllabe. ce n’est pas dans les habitudes de la maison ce langage.
Ps Moi j’aime retrouver les textes d’XP. J’avais oublié la phra
phrase sur les « anges et les albatros ». Superbe.
Pourquoi que quand je me connecte à ILYS je suis renvoyé vers un autre site de merde ? Vous avez un bug ou vous avez été piratés ? 🙁
Restif… avé !
« Vous avez un bug ou vous avez été piratés »
Les deux ?
Nous enquêt….heu, pardon, on en reparle lundi ?
Et, bien sûr, Jean-Luc Mélanchon, tout ça..
Triple ave Nebo ! (ainsi qu’à the Lady); je pensais précisément à toi en relisant le Bloc-notes de Mauriac (peut-être sa plus grande œuvre, qui, bien que parlant de l’actualité -mais aussi de littérature et à chaque instant de Dieu- n’a pas pris une ride.). Voici ce qu’écrit l’un des plus grands écrivains français catholique :
« Catholique, j’ai toujours cru sans difficulté à la vocation de l’Église orthodoxe (…)Nous avons crié à la persécution au temps d’Emile Combe, nous savons aujourd’hui ce que c’est d’être persécutes pour la foi en regardant nos frères orthodoxes. Ils n’ont pas été fidèles à Dieu par intérêt, pour survivre, comme le croit Michel Cournot, mais ils ont retrouvé dans l’épreuve ce Dieu qui a donné un sens à la souffrance. Ils ont pris conscience de leur vocation ». (Bloc-notes, mercredi 3 décembre 1969, T.V seuil, « essais »). Mauriac pensait certes plus aux russes alors, mais sa pensée va plus loin puisqu’elle embrasse tous les orthodoxes de l’est emmurés dans le communisme. Il me semble surtout que ses paroles peuvent correspondre spirituellement au sort qu’a subit la Serbie. Et je ne parle pas des alluvions porteur de germes immondes déposées par la propagande chez les âmes faibles.
« Nous avons été envoyé sur terre pour nous aimer », rappel XP. Oui. Mais que faut-il penser des fauteurs de haine, des menteurs, des porteurs de masque et de tous les immondes salopards qui nous pourrissent la vie? Et puis, pardon de sauter de mon petit coq à un pauvre âne, mais cette époque est quand même celle de la fin d’une culture qui commença vers la Renaissance. En dix ans seulement, cinq même, le niveau s’est encore écroulé. qu’est ce qui va venir après?
Bon sang, c’est en fait Xyr qui a raison depuis le début sur le christianisme…