Claire Chazal préférera vous parler en ânonnant son prompteur du Golden Globe de Jean Dujardin.
Mais l’événement de la semaine c’est… non, pas la perte du tripleuha, ça on s’y attendait. C’est le nouveau placement de sa dette par l’Allemagne à des rendements négatifs.
Bien sûr vous n’allez pas prendre votre cochon-tirelire et aller acheter des emprunts d’État allemands — à moins d’avoir un gros, très gros cochon-tirelire. Aussi ramenons cela à notre petit niveau : vous avez 1000 unités de la monnaie d’occupation européenne euros. Vous aimeriez bien que ces mille euros restassent mille euros et si possible quelques intérêts dans trois ou cinq ans. Or, curieusement, au lieu de les mettre sur votre livret Z comme Zorro, ou de les garder sur votre compte bancaire rémunéré, ou d’acheter avec des produits financiers de la Société Lyonnaise de Paris Agricole Indo-Panama garantie par l’UMPS-républicain-citoyen-éco-durable-antiraciste-droits-de-l’homme, vous allez les confier à l’État allemand contre la promesse qu’il vous en rendra légèrement MOINS dans trois ou cinq ans. Pourquoi donc feriez-vous cela ?
Il y a quatre possibilités pour l’expliquer :
- Vous êtes tellement enragé naziste que vous voulez à toute force donner de l’argent à l’Allemagne pour ne pas recommencer l’erreur du Maréchal qui gâcha par sa politique timide et ambiguë notre seule chance de faire vraiment l’Europe en 1941 par une collaboration loyale avec le chancelier d’Allemagne. C’est peu probable. Surtout ici, vous pensez bien. Oh là là, on n’a pas de lecteurs comme ça.
- Vous êtes complètement con et/ou vous ne savez pas compter. Notre public étant d’élite et peu composé d’énarques spécialistes de comptabilité publique, on peut aussi écarter cette double hypothèse par la bêtise et/ou la compétence technocratique.
- Vous n’avez aucune confiance dans vos banques et vous êtes prêt à payer un peu l’État allemand pour qu’il promette de vous rembourser dans trois ou cinq ans, vous préférez ça au risque de perdre plus dans une faillite bancaire. C’est déjà plus probable.
- Vous pensez que l’Allemagne vous remboursera en une monnaie dont l’appréciation relative compensera, et au delà, le rendement négatif de l’emprunt. Vous croyez donc au moins probable, d’une manière ou d’une autre, la fin de l’Euro tel qu’il existe actuellement avant trois ou cinq ans. Là ça devient carrément intéressant comme idée.
Sachant que ce n’est pas vous qui êtes en train de le faire mais que nous parlons ici d’institutions financières, il faut évoquer une autre hypothèse : les banques ne trouvent plus assez d’emprunts d’État bien notés et acceptent donc de payer pour en détenir, parce qu’elles y sont obligées par la réglementation ou par contrat. Ce serait une explication intéressante si ce n’était la troisième fois en moins d’un an que l’Allemagne arrive à placer ainsi de la dette publique à rendement négatif ; elle l’a donc déjà fait deux fois avant la dégradation récente de tout un tas de social-démocraties encore plus mal barrées qu’elle.
Concluons en ces temps de naufrage en rappelant que les banquiers quittent toujours le navire à temps, avant même les femmes et les petits enfants. Et laissons chacun penser à l’avenir de son cochon-tirelire — avenir qui, contre toute tradition, n’est pas rose.
Petite précision technique: les rendements négatifs, c’est pour des placements de trois mois. Mais çe n’est qu’un détail, et ça ne change rien au fait qu’en effet, cette information est hallucinante.
Elle réduit en miette l’argument mongaullo-souverainistes sur « les marchés qui se goinfrent/Les vilains spéculateurs/Les marchés responsables de notre dette ».
Ca confirme aussi que pour ces gens là, des créanciers qui prêteraient gratis, voire qui verseraient un petit quelque chose, ce serait encore trop…. Et que donc, ce qui serait acceptable pour eux, ce sont des créantiers avec lesquels on pourrait se réserver le droit de ne pas demander leur avis, et surtout, surtout, de ne pas les rembourser…. Au nom de la souveraineté du peuple et de la primauté de la politique sur la vilaine finance.
Combien on parie que ce sont les mêmes qui en rachètent de trois mois en trois mois depuis 9 mois ? et qui vont continuer ? ^^
L’ennui avec « les marchés » qui se goinfrent c’est que c’est comme quand on dit l’État : c’est personne. Or qui intervient sur « les marchés » sinon, dans nos saletés de social-démocraties européennes, les hommes de l’État ? ou leurs copains de promo, ou ceux qui financent leur réélection, ou ces capitalistes particuliers à participations croisées qui sont tous inspecteurs des finances et haut-fonctionnaires en plus d’être banquiers ? lesquels d’ailleurs ne sont pas banquiers parce qu’ils ont créé ou racheté et bien géré des banques, mais uniquement parce qu’ils ont une fois dans leur vie réussi un concours administratif… cela dessine quelque chose qui est tout sauf du capitalisme ou du marché libre. Dans les deux cas, on parle de la même oligarchie financière complètement incestueuse avec l’État et qui, en France, s’en distingue encore moins qu’ailleurs.
Vérification faite, ce sont des titres à 6 mois. L’allongement généralisé aidant, je prends tous les paris : dans quelques mois, ce sera à trois ans si nos Baby Delors s’entêtent et arrivent à maintenir à flot leur rouble faillitaire baptisé euro.
Ah oui, tiens, c’est pas bête. C’est comme ouvrir un compte dans une banque prestigieuse en payant, prestige oblige, des frais de garde (les intérêts négatifs). Pour avoir leurs cartes Golden à la Deutsch bank, ils payent 0,1 % de droits de garde… Pour un placement de 100 KE, ça fait jamais que 8 Euros par mois, ç’est pas trop chèr^^
C’est un peu comme d’acheter de l’or alloué aussi, avec un peu de frais de garde et d’assurance. Sauf que là, c’est de la vente de machines-outils aux Chinois qui est allouée ^^
Et c’est sur le marché secondaire que les taux sont négatifs, pas sur le amrché primaire…
Je vous l’accorde, cela ne change pas grand chose…
Les investisseurs font cela pour la même raison que les banques empruntent à la BCE puis replacent immédiatement l’argent auprès de la même BCE : avoir à disposition des actifs très liquide (pratiquement du cash) qui soient relativement sûrs.
Le mot important étant « relativement ». Mais relativement à quoi ? A ce rythme dans quelques semaines même le dollar apparaîtra « relativement » plus sûr que n’importe quoi en euros.
Le dollars est déjà plus sûrs que n’importe quoi en euros…
Relativement par rapport à un actif réputé sûrs comme les OAT par exemple….
C’est pour ça que j’ai dit apparaîtra. On peut toujours estimer, mais quand ça apparaît clairement à tout le monde c’est autre chose. Il me semble que le point où l’Euro sera un tel boulet qu’il fera oublier de manière générale et pour un temps la santé désolante de l’économie américaine n’est pas encore arrivé. La preuve : il y a encore des gens qui achètent en pagaille des obligations en euros d’un état surendetté appelé l’Allemagne…
Nein nein nein. Cheu fiens de férivier. C’était sur le marché secondaire (soit celui qui est le plus proche d’un vrai marché) les deux fois précédentes. Cette fois c’était en direct.
Je suis très étonné ! Normalement les systèmes et les plateformes électronique ne permettent pas de proposer en direct des taux négatifs…
Peu importe, cela revient au même de toutes façons.
Férivié une deugsiémeuh vois : c’est possible parce que les règles ont changé justement : on parle en prix, plus en taux. Donc quand le truc dépasse le machin, bah ça fait bien un taux négatif.
(Et ce n’est pas tout à fait la même chose. J’ai vu passer hier qu’Angela envisage d’interdire la revente des obligations d’État allemandes par les institutions financières qui y ont souscrit. Ça m’avait paru incompréhensible. Mais là ça devient presque cohérent, du coup.)
« Elle réduit en miette l’argument mongaullo-souverainistes sur « les marchés qui se goinfrent/Les vilains spéculateurs/Les marchés responsables de notre dette ». »
Et l’hypothèse, évidemment saugrenue, que les marchés pourraient se goinfrer, quand l’occasion se présente, de même que les états pourraient faire n’importe quoi, quand l’occasion se présente aussi ?
Pourquoi toujours cette forme de pensée binaire ? Ici le mal, là le bien ou le moins mal (par déduction).
Généralement, la pourriture et les agents pathogènes, ça marche ensemble.
Oui, mais la pourriture de votre toit qui fuit c’est pas celle qui fait un vin d’Yquem. De même le marché idéal des libéraux – dont il existe des versions plus ou moins abouties et pures ou plus ou moins dégradées de socialisme – n’est pas la magouille désespérante que font entre eux les inspecteurs des finances de Bercy quand ils sont administrateurs de telle ou telle grande banque, même si techniquement ils passent eux aussi par des trucs qui s’appellent des marchés boursiers (en fait de moins en moins des marchés réglementés, qu’ils prônent pourtant – pour les autres intervenants qu’eux – comme les seuls moraux).
@Nicolas & XP
La faillite du secteur bancaire doublé de la transmutation de l’Euro en papier toilettes, c’est réalisable dans quel ordre de grandeur ?
Jusqu’à quel point peut-on consolider un édifice s’écroule ?
Ou planquer son pognon pour le lecteur d’Ilys qui a gagné au Loto ?
XP pas avoir les compétences pour répondre^^
Achetez des vrais trucs. Rien que l’État puisse imprimer. Pourquoi croyez vous que le marché de l’art contemporain se porte bien alors que tout le monde prévoyait sa baisse ? Jamais la BCE n’imprimera des Klein ou des Cy Twombly. Achetez des vrais trucs ou des vrais services et des sociétés qui les produisent. Du fer, des patates, de la santé, de l’eau potable et les gens qui produisent ou commercialisent tout ça. Si possible qui le commercialisent hors Europe et Etats-Unis aussi, c’est mieux.
Et un peu d’or parce que ça fait chier les keynésiens et que c’est le seul actif AAA depuis des millénaires et que c’est la seule chose qui vous sauvera un peu en cas d’effondrement de tout le reste. Et aussi parce qu’il y a un petit Goldfinger en chacun de nous ^^
Enfin si vous croyez à la hausse des prix à venir, regardez du côté des sociétés qui ont un vrai pricing power, qui peuvent imposer leurs prix. Les perles qui fabriquent un truc incopiable et unique ou qui le fabriquent tellement mieux que tout le monde que ça en tire des larmes, ou qui ont une situation géographique telle que ça revient au même (la société concessionnaire du tunnel prado-carénage à Marseille est l’exemple parfait de ce dernier cas).
Et ne vous endettez pas trop en espérant refaire le coup qu’ont fait vos parents en payant la moitié de leur maison par l’inflation. Car l’inflation c’est la hausse des prix et des salaires. Ce qui nous attend c’est juste la hausse des prix, pas des salaires, et ça s’appelle l’appauvrissement, pas l’inflation.
Planquez votre pognon en Suisse, aux Iles Caymans, n’importe ou sauf dans une zone euro.
L’or mouai, préferez peut être des comodities moins spéculatifs genre aluminium.
« L’or est une monnaie, pas une matière première. » (Bidou, discours de prise du pouvoir par surprise, 12 mai 2012.)
Les vrais trucs, ce sont les matières premières ?
Alors achetez des terres rares, scandium, yttrium…indispensables aux technologies du futur. Planquer dans un trou dans le jardin, semer dessus du géranium (pour que le fisc ne puisse pas vous le prendre)
Ben non. Qu’est-ce que vous en faites des terres rares ? vous les revendez où ? à qui ? Puis le train est déjà passé, c’était il y a deux ans que les Chinois avaient tout raflé. Et ne mangez pas ce qui pousserait là dedans, hein 🙂
Les vrais trucs c’est ce dont la valeur ne dépend pas principalement de la monnaie dans laquelle c’est exprimé. Un vrai truc c’est un truc que vous pourrez revendre même si l’Euro ne vaut plus tripette ou si la France en est réduite à avoir la Drachme pour monnaie. L’équation n’est pas simple, rentrent dedans l’utilité, la capacité à se revendre, le fait qu’on vous le paiera cher ou pas si ça vient à manquer, etc.
Si vous avez un bien immobilier dont le toit fuit et de l’argent en banque, ça peut être de refaire votre toit dès maintenant, car vous l’aurez toujours sur la tête. Alors que dans un an, on ne sait pas très bien si la même somme vous paiera toujours un toit. Tout cela dépend donc aussi de votre situation personnelle.
En outre il vaut mieux les bouturer les géraniums, en plus vous pourrez en vendre quelques uns à vos voisins, ou les échanger contre des haricots ou des patates. Parce que semer des géraniums, vous êtes pas arrivé aux fleurs…
« Si vous avez un bien immobilier dont le toit fuit et de l’argent en banque, ça peut être de refaire votre toit dès maintenant, car vous l’aurez toujours sur la tête. »
Ah là je comprends! Mon mari dit pareil!!
Alors il faut le croire. Il y a un précédent avec un grec et des pressoirs à olives 🙂
Quand on dit que les Allemands ont fini par gagner la guerre, ce n’est pas un vain mot.
C’était bien la peine de se massacrer comme des cons pendant soixante-dix
ans si c’était pour en arriver à ça!
On le critique tout le temps, mais il était malin, ce Hitler, quand-même…
Moi j’attends le Reichsmark-or.