Fondre ses balles

Un être humain devrait savoir changer une couche-culotte, planifier une invasion, égorger un cochon, manœuvrer un navire, concevoir un bâtiment, écrire un sonnet, faire un bilan comptable, monter un mur, réduire une fracture, soutenir un mourant, prendre des ordres, donner des ordres, coopérer, agir seul, résoudre des équations, analyser un nouveau problème, répandre de l’engrais, programmer un ordinateur, cuisiner un bon repas, se battre efficacement, et mourir bravement. La spécialisation, c’est bon pour les insectes. – Robert Anson Heinlein

Jünger pensait de même qu’un homme devait s’apparenter à un navire de haut bord ; avoir en lui tout le nécessaire pour une longue traversée. C’est le but que nous allons poursuivre en apprenant à fondre des balles.

La source de chaleur est fournie par un simple réchaud à gaz. On pourrait aussi bien utiliser un feu de bois. Bien qu’une plaque électrique soit mieux adaptée car au ras du sol elle serait plus stable. Ce petit réchaud a comme autre inconvénient de manquer de puissance, ce qui allonge le temps de chauffe. En l’hiver atteindre la bonne température peut s’avérer difficile. Mais il est suffisant pour fondre quelques balles les beaux jours venus.

Le récipient est constitué d’une casserole dont la taille est adaptée à celle du réchaud. Tout récipient dont la température de fusion est supérieure à celle du plomb peut convenir. Les faitouts de fonte seraient particulièrement adaptés. La louche était originellement destinée à la cuisine, avec son bec verseur et sa contenance relativement élevée elle est parfaite pour cet usage.

Le plomb peut être coupé en morceaux de façon à ce qu’il rentre dans le récipient et pour faciliter sa montée en température. On peut acheter des plombs de plongée. Ou récupérer du plomb chez des couvreurs ou des plombiers, en ce cas il contiendra divers adjuvants qu’il conviendra d’écumer à sa surface une fois fondu. On peut aussi récupérer de précédents projectiles.

Le point de fusion du plomb se situe autour de 327° C. Il convient donc d’éviter de prendre des risques. Premièrement en veillant à ce que le réchaud et le récipient soient bien stables. Ensuite en se protégeant la peau, avec des gants épais pour saisir la louche, et avec des vêtements couvrants en matières non synthétiques pour les bras et les jambes en cas d’éclaboussures. Pendant toute l’opération la concentration est de mise, il faut éviter les mouvements brusques et agir avec précision. Il est également conseillé de respirer le moins possible les émanations de plomb et de le fondre en extérieur.

Voici un moule Lee. Il en existe en une multitude de calibres reprenant la même structure, avec une ou deux cavités selon le calibre. Ces moules sont constitués de formes en acier, d’un coupe-jeu en acier qui sert aussi d’entonnoir et de soies emboitées dans des manches en bois.

Le plomb en fusion est versé en un seul geste lent dans les entonnoirs du coupe-jet à l’entrée des chambres du moule. On arrête le geste quand les entonnoirs sont remplis et que le plomb les recouvre. Le plomb se solidifie alors dans le moule. Quand le plomb s’est solidifié à la surface du coupe-jet on frappe celui-ci d’un coup de gourdin sec. Son excroissance est prévue à cet effet, ce qui a comme conséquence de débarrasser la balle du trop plein versé. On donne alors un ou plusieurs petits coups de gourdins sur le corps du moule pour détacher la ou les balles, puis on ouvre le moule dont les balles encore chaudes iront rejoindre leurs consœurs. Le mieux est sans doute de les recevoir sur du sable.

A chaque coulée, on rabat le coupe-jet vers soi. On verse le plomb. On attend qu’il se solidifie. On frappe le coupe-jet vers l’extérieur. Puis le moule. Et l’on libère la balle.

Pour que l’opération se déroule convenablement il faut que le moule soit chaud. Pour cela on peut chauffer le moule à la flamme du réchaud. Ou alors accomplir quelques coulées, le plomb réchauffera le moule au fur et à mesure.

On peut voir ici trois types de balles. Les premières sont incomplètes, les secondes ont une surface parcourues de vagues, les troisièmes sont correctes. On pourrait ajouter une quatrième sorte, aussi irrégulière pour des raisons inverses.

Si la balle est incomplète ou si elle présente des irrégularités c’est que le plomb et/ou le moule n’étaient pas assez chaud. Le plomb s’est solidifié avant qu’il n’emplisse toute la chambre. Les balles présentes alors des irrégularités en forme de vagues ou sont incomplètes.

Ces balles sont correctes. Mais il peut arriver qu’il se greffe aux balles des excroissances. Le plomb aura continué son chemin dans les interstices du moule. Cela signifie qu’il est trop chaud.

Une bonne coulée dépend de la température du plomb et de celle du moule. Une fois le coup de main pris et les températures optimales atteintes les coulées s’enchaînent.

Lors de la montée en température du plomb pour la coulée d’un autre calibre, j’ai dû changer de bombonne de gaz, je propose un court article à ce sujet : Monter un réchaud Bleuet.

A noter qu’il existe des fours électriques, dotés d’un creuset et d’un robinet, spécialement conçus pour cet usage, mais pour les rentabiliser il faut tirer très régulièrement.


11 réflexions sur « Fondre ses balles »

  1. Xan

    Belle démonstration de savoir faire. Pour ma part, je pense qu’il serait utile que vous informiez votre lectorat de la possibilité de s’équiper d’un revolver à poudre noire à la seule condition d’être majeur.
    Pour un prix raisonnable (environ 300 euros, mais cela peut varier selon la qualité de la réplique), vous voilà détenteur d’une arme de poing qui a fait ses preuves. L’amateur d’histoire en sera ému, surtout lorsque pour la première fois il sentira la poudre et entendra la déflagration magnifique produite par son « pietta ».
    La loi changera certainement rapidement, alors, amis collectionneur , collectionnez! Car jamais il ne faut oublier que le froid tue la fillette qui n’a plus d’allumette…

  2. Lanternier

    Puisque nous parlons d’armes, il y en a une que je cherche activement. Il s’agit d’une arme de poing, une sorte de mini-poignard, qui au lieu d’avoir une lame se termine par un point très fin et non piquant. Son extrémité est en forme de cône. Ceci permet de concentrer la force d’un coup sur un petit point, et donc de décupler la force du coup, ce qui peut faire très mal si l’on sait viser certains points du corps.

    Quelqu’un connaît-il l’arme dont je parle ? Je n’en sais pas le nom. Elle est très simple (celle que j’ai vue était d’une seule pièce, le manche et l’extrémité conique fabriqués dans la même résine) et sans doute pas chère. Son acquisition m’intéresserait grandement, en attendant de pouvoir m’acheter un revolver à poudre, bien entendu. ^^

  3. generalbol

    En plus, c’est beau et malin au final. Comme quoi il faut du plomb dans la tête pour le foutre à l’occasion dans celle des autres &ù%***?&& (qui auront été sans style ou encore malpolis avec notre soeur ou notre mère).
    Rompez.

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