Intensification

Les vacances ne sont pas du tout une alternative à la congestion et à la promiscuité des villes et du travail. Au contraire : on cherche l’évasion dans une intensification des conditions de vie ordinaire, dans une aggravation délibérée : plus loin de la nature, plus près de l’artifice, de l’abstraction, de la pollution totale, stress, forcing, concentration, monotonie bien supérieures à la moyenne – tel est l’idéal de la distraction populaire. Personne ne songe à se retirer de l’aliénation, mais à s’y enfoncer jusqu’à l’extase. Ça, c’est les vacances. Et le bronzage joue comme preuve surnaturelle de cette acceptation des conditions de la vie normale.

(…)

L’été on entend les chiens hurler le soir, on voit les insomniaques soigner leurs plantes vertes en pleine nuit, on lit dans les yeux ternes et brûlants cette euphorie angoissée caractéristique des journées plus longues, du soleil implacable, de cette extraversion de la chaleur qui pousse à une jouissance physique pure et sans objet, et qui correspond pour beaucoup à une situation proche du suicide. Ceux qui restent dans la ville ont des airs de funambule. Ils savent qu’en l’absence des autres ils assurent l’intérim de la socialité, à peu près comme ils arrosent les géraniums de leur voisin en son absence – mais tous assument cependant un rôle historique et théâtral : les uns celui d’abandonner la cité vers on ne sait quel exode de plaisir, les autres celui de veiller sur le décor. En fait c’est un jeu de catastrophe. La ville joue son exode, elle se vide sans avoir été bombardée elle se livre à ses esclaves (les immigrés) dans une saturnale éphémère.

(…)

L’angoisse propre au loisir de la Côte. Trop de beautés naturelles artificiellement rassemblées. Trop de villas, trop de fleurs. Villegiatura, Nomenklatura : même combat. Même privilège artificiel, qu’il soit celui de la bureaucratie politique ou de la luxuriance du mode de vie. Nature pourrie par le loisir, expurgée de toute barbarie, écœurante de facilité – un jour peut-être ce climat de rêve, cette canicule de luxe exploseront en un incendie de forêt définitif.

Baudrillard, Cool memories I

29 réflexions sur « Intensification »

  1. Gil

    Tiens, je relis les Cool Memories en ce moment. Ça me détend, c’est l’été. Même quand je comprends rien, je trouve ça tellement beau. Il parle beaucoup des Japonais, de l’Opéra de Pékin… il y a quelque chose de zen dans ces petits paragraphes, ces aphorismes, ça me fait penser à ces encres japs ou chinoises où l’on devine quelque chose à travers la brume… y aurait une thèse à faire sur le sujet, comme on dit.

  2. Grödion

    Baudrillard touche juste, mais un tel comportement grégaire est naturel chez le commun des mortels : il y a certes « intensification ». Mais à n’importe quelle époque, partout dans le monde, on peut donner des exemples de ce type de compportement. Ce qui change c’est juste l’intensité et la forme.

    1. Il Sorpasso Auteur de l’article

      « Ce qui change c’est juste l’intensité et la forme. »

      C’est justement le sujet. Lorsqu’il parle d' »intensification » ça ne se résume pas au nombre, mais au quotidien de l’être humain. Ça, c’est nouveau. Il n’y a pas de perspective « d’au-delà/rupture du quotidien » comme il pouvait y en avoir dans les pèlerinages, guerres, croisades, fêtes religieuses, païennes, etc. Cette intensification, c’est la célébration du quotidien, « l’extase de l’aliénation » A la limite et pour critiquer ou élargir, on pourrait même réfléchir au fait que c’est bien plus une « extase de la désaliénation » ; ou au fait que c’est le tourisme qui fait tourner le monde (et pas qu’au sens économique) aujourd’hui; ou encore de la pertinence du concept de simulacre (la copie remplace et tue l’original : à partir du moment où les vacances sont des droizakis, le travail n’existe plus sous son ancienne forme, donc les vacances non plus); les vacances obligatoires, les 35 heures, le fait que les gens au fond détestent voyager, etc, etc….

  3. Gil

    Pour Grödion rien n’a réellement changé. Nous sommes toujours dans l’histoire, dans le même humanité. Pour Baudrillard (ou Muray), nous sommes passés dans la 4º dimension, sorti de l’histoire, en pleine « éternité provisoire ».

    Mais Cool memories est un de ses livres dans lequel il semble parfois reconnaître qu’il a fantasmé toute cette théorie, qu’il a volontairement radicalisé toute chose pour voir ce qui en sortirait. Projet plus esthétique que philosophique ?

    Intensification réelle du, dans le réel, ou intensification de la théorie du réel, recréation délirante du réel ? Et cela-même, est-ce nouveau ? Toutes les époques n’ont-elles pas connu des penseurs qui recréaient la réalité à partir de théories radicales ?

    Ce qui n’enlève pas l’ « utilité » de ces théories, la vérité aigue qu’en tire souvent JB dans l’observation du réel.

  4. Gil

    Pour le plaisir :

    « Tous ces pauvres vieux, ces cobayes du troisième âge, qui espéraient, enfin délivrés du sexe et du travail, reposer dans cette sorte d’indifférence à la vie et de jouissance anticipée de la mort, qui est bien la meilleure façon de vieillir – il ne sera pas dit qu’on leur aura laissé une plage en fin de parcours, non, il faut les persécuter jusqu’au bout, les recycler, les libidinaliser (désirez ! jouissez ! il n’est jamais trop tard), les enculturer (cinéma, théâtre, discussions « libres », yoga, musique du XVI º siècle) – rien ne leur sera épargné pour leur permettre de mourir idiots. »

    (CM I)

  5. Gil

    Erf, je ne sais pas si dans ce genre de rapprochements improbables (que j’aime faire aussi) entre artistes a priori très éloignés, il est question de se tromper ou pas… c’est du domaine du ressenti.

    Disons que je trouve G.Noé très lourd et très forcé, alors que Baudrillard me fait souvent rigoler, en étant léger parfois jusqu’à la diffumination (ça existe ?) des concepts et des formes, jusqu’à l’ellipse « asiatique » dont je parlais plus haut… (en particulier dans Cool Memories)

  6. Gil

    D’ailleurs, en y repensant, en repensant à quelques vidéos où apparaît Baudrillard, je me dis que c’était peut-être en effet quelqu’un d' »aigri et blasé ».

    D’où peut-être sa vision de la société actuelle, et sa volonté de dépassement de cette société par une méga-théorie radicale-délirante par intensification (ce concept a aussi un sens positif chez JB) de la réalité plutôt que par fuite de cette réalité. Faudrait relire des livres comme Les Stratégies fatales ou l’Échange impossible, tout ça est tout de même assez fumeux… ce qui comptait pour lui, c’était peut-être l’écriture même de la théorie que la théorie elle-même.

    1. Grödion

      « Baudrillard est une fiotte, il a une petite bite, j’ai baisé sa femme, je le mets K.O rien qu’avec les yeux. »

      Soral in « Comprendre ma bite : demain la dictature des banquiers aionistes de Oualle-Strite ou la révolte des grosses bourses » (sortie 2012).

      1. Grödion

        Je prépare mon mariage en ce moment, avec ma cousine germaine Rosa fille de Chamil-la-cicatrice, j’ai pas trop la tête à réfléchir à Baudrillard en ce moment. Il me manque 15 000 euros pour les festivités : je vais détrousser un chien de Serbe de ses reins ou attaquer la Banque de France à la grenade. Personne aurait l’adresse de Nebo par hasard ?

        Nebo si vous me lisez, rejopignez-moi près du hangar désafecté là-bas, vers 1 heure du matin, j’ai un cd de rock à vous faire écouter. N’ayez crainte c’est de la bonne musique comme vopus aimez. Je vous y attendrai avec mes deux frères Salim « le malade » et Enver « l’arracheur d’oreilles ».

  7. Dindon

    Mon p’tit Grödion ta cervelle ramollie d’albanais fait fausse route avec ce traffic de reins serbes. Tu devrais plutôt récupérer la bite à Soral, il se trouvera bien un mafieux de l’UCK qui a force de violer de la chrétienne serbe et de se faire des rails de coke et ne parvenant plus à bander en fera l’acquisition pour 15 000 euros sonnant trébuchant. Excellente affaire et ton mariage sera assuré d’être aussi grandiose que l’Albanie. Avec un peu de chance tu pourras peut-être la revendre 17 ou 18 000 euros la bite à Soral, parce qu’il parait que son engin a une taille vraiment phénoménale, de quoi remplir de foutre tous les culs des putes albanaises de tous le Kossovo.

      1. Dindon

        Tchetnik aux petits pieds? c’est préférable à terroriste à petite bite, à petit pays,et à petite mentalité à babouche qui se masque derrière de la verve sympathique pour se faufiler dans ce blog d’élite comme anguille sous roche.

        Soral se croit du côté serbe,mais son discours ne tient pas. Dantec par contre a fait son mea culpa,il a fini par comprendre son erreur d’avoir soutenu les musulmans de ta trempe,même s’ils se proclament chrétiens.

        vas-y, potiron,fais résoner ton kanun de pédé.

        1. Grödion

          Tu m’as fait pleurer. Tu es cruel, Serbe sans coeur. J’inonde mon visage de larmes. La dernière fois que j’ai pleuré comme ça c’était quand la jeune fille Serbe que je gardais enchaînée dans ma cave (trophée de guerre, on l’a violé avec les cousins tous les soirs pendant 15 ans) a dit qu’elle m’aimait. Ca m’a fait drôle et j’ai pas pu résister aux larmes. Mais on a du l’achever : une handicapée trisomique ne vaut rien sur le marché aux esclaves.

          1. Grödion

            Moi je regarde en boucle Pusher III : le boss de Copenhague c’est Luan l’Albanais. Le seul film de l’histoire ou les Albanais font quelque chose de leur vie. Enfin, en dehors des films albanais bie sûr, que des chefs-d’oeuvres. Je vous conseille : « Fatmir l’exterminateur de chiens Serbes IV, le retour du Héros ». La fameuse scène ou Fatmir liquide à mains nues un régiment entier de Serbes armés de mitraillette et de chars est un classique. On l’apprend par coeur à l’école.

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