Le jour du petit doigt

Et les gens qu’on ne connait pas, les doigts nous manquent pour les compter, d’ailleurs ils ne comptent pas. Il peut bien s’en massacrer, s’en engloutir, s’en génocider des milles et des cents, chaque jours que Dieu fait, avec la rigueur et la grande bonté qui l’a rendu célèbre jusqu’à l’Embaréné. Il peut bien s’en tronçonner des wagons entiers, les gens qu’on ne connait pas on s’en fout. Le jour du récent tremblement de terre de Mexico, le gamin de mon charcutier s’est coupé un auriculaire en jouant avec la machine à jambon. Et bien quand cet estimable commerçant évoque cette date, que croyez-vous qu’il lui en reste ? Etait-ce le jour de la mort de milliers de gens inconnus ? Ou bien était-ce le jour du petit doigt ?

Pierre Desproges, paru dans L’Humanité


8 réflexions sur « Le jour du petit doigt »

  1. Aristide

    « Il peut bien s’en tronçonner des wagons entiers, les gens qu’on ne connait pas on s’en fout. »

    Mais encore heureux ! Sinon, vous imaginez à quoi ressemblerait la vie humaine ? Avec tous ces gens qui souffrent et meurent tous les jours, parfois dans des conditions atroces, si on devait vraiment éprouver de l’empathie pour eux, mais la vie serait un enfer. Autant se flinguer tout de suite.

    1. XP

      J’ai calculé que si une sirène se mettait à hurler dans le métro à chaque fois qu’une personne meurt dans Paris intra-muros, c’est à dire a quelques kilometres maximum, elle sonnerait toute les 20 minutes.

Laisser un commentaire