La présomption d’innocence est une saloperie

C’est humiliant d’être montré menotté, et on ne doit pas humilier un homme présumé innocent.

Certes, c’est humiliant d’être montré menotté. Mais ça l’est aussi d’être arrêté par la police, emmené devant ses enfants et ses voisins, jeté en garde à vue et traduit devant un juge. Or, par définition, quiconque se fait arrêter par la police est présumé innocent, se fait pourtant humilier, et c’est dans l’ordre des choses… Pour qu’il en soit autrement, il faudrait se résoudre à convoquer les braqueurs de banque présumés par lettres recommandées avec A.R, ce qui nous en conviendrons, serait à la fois baroque et pour le moins inefficace.

Un homme montré menotté une fois sera toujours considéré comme coupable, même si un jour il est innocenté.

D’abord, cette affirmation est tout à fait gratuite. Ensuite, quand on veut bien se donner la peine de la creuser, elle est doublement fausse:

– Tout le monde a vu DSK menotté, de très fortes présomptions de culpabilité pèsent sur lui, et ça n’empêche pas la presse de notre république bananière d’en faire une victime, qui de la justice américaine, qui de la presse libre de ce pays, qui de ceux qui oseraient pencher plutôt pour sa culpabilité que son innocence… Dans ces conditions, s’il est acquitté, on imagine bien que les menottes qu’il a porté deux jours ne lui empêcheront pas de devenir par la seule grâce de sa mésaventure une espèce de conscience morale nationale, une sorte de monstre pleurnichard et dégoulinant qu’auraient pu enfanter Simone Veil et l’Abbé Pierre.

– Je suppose qu’après avoir été menotté un jour puis innocenté un autre, si l’on pense avoir des comptes à demander, on doit garder précieusement les images de soi avec les bracelets, faire une flopée de tirages, en mettre un dans un coffre, en donner un autre à son avocat et encore un autre à son meilleur ami, histoire qu’ils puissent les brandir pour défendre notre honneur, s’il nous arrivait malheur….

– Quand par hasard on est persuadé de son innocence et menotté, on doit être bien heureux de voir passer une caméra pour agiter bien haut ses poignets, de telle sorte qu’à l’heure des réparations, chacun ait en mémoire l’ampleur du préjudice.

En réalité, une justice qui laisse filmer les prévenus menottés est une justice qui prend des risques, qui est sûr d’elle même et qui craint très peu l’erreur judiciaire. A l’inverse, une justice qui a le curieux souci d’humilier le moins possible publiquement les prévenus fait immanquablement l’effet de ne pas être sûr d’elle même et de plaider par avance l’ irresponsabilité pour elle et ses fonctionnaires, si elle venait à se tromper… On vient vous chercher discrètement, on vous vous fout discrètement au trou, s’il s’avère qu’on se trompe on vous relâchera discrètement, et pour que vos déboires passent alors le plus inaperçus possible, on préfère ne pas vous montrer entre deux gendarmes.

N’oublions pas que dans le pays où le prévenu est montré menotté, on filme aussi leurs audiences, c’est à dire le juge et le procureur en même temps que lui, et qu’en plus ces gens-là sont élus par le spectateur contribuable…Ca doit être pour ça, qu’on est tellement attaché à la présomption d’innocence, dans la république bananière française: c’est sommes toutes la meilleure façon d’envoyer des innocents au trou par incompétence où parce qu’on n’a pas les tripes de s’opposer à son ministre sans avoir jamais à se démettre de sa morgue de fonctionnaire et de sa bonne conscience de serviteur de l’Etat.

7 réflexions sur « La présomption d’innocence est une saloperie »

  1. Labrador chocolat

    J’aimerai bien que les journalistes enquetent sur la declaration d’ISF du couple Strauss Kahn,et le versement des sommes dus a ce titre,en effet l’affaire a revele une fortune digne de contribuer a diminuer le deficit de l’etat.Il m’a ete suggere qu’ils pourraient ne pas etre domicilies fiscaux en France,ce qui est enorme.Pris la bite dehors et la main dans le sac serait l’apotheose de l’hypocrisie.

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