Une ignoble, mais malheureusement usuelle, réflexion raciste, consiste à prétendre que le monde musulman est en retard.

Retard technologique. On ne fera pas la liste des savants de confession musulmane  l’étant pour autre chose que ce qui leur tient de théologie. Retard culturel. Même si la lapidation pourrait passer sans problème pour une performance artistique contemporaine. Certains rajouteront un retard politique, social et tant d’autres encore.

Quoiqu’il en soit, il faut avouer que le monde musulman venu en Europe progresse rapidement sur l’ensemble de ces sujets.

J’oserais bien imaginer que le fait d’être à notre contact doit favoriser les choses, mais j’ai un peu peur que la bête immonde ne vienne me saisir un matin et me foute un ventre fécond comme Marie. Ou quelque chose dans le genre. Je ne sais plus trop.

En tout cas, à oumma.com, on vient de découvrir comment fonctionnait un sondage. Et, folle coïncidence, ce sondage porte précisément sur la perception de la communauté musulmane par les français.

Oups.

Je dis oups parce que ma dernière formulation laisse penser que la communauté musulmane n’est pas française. Donc je précise d’emblée que telle n’était bien entendu pas mon intention. Les musulmans sont des français comme les autres qui sont de culture gréco-romaine et de religion catholique. D’ailleurs, je ne devrais pas dire les musulmans, mais les français-de-confession-musulmane.

Mea culpa.

Dans ce papier déniché et vanté par Daniel Schneidermann, on y apprend donc que la formulation d’un sondage, ses mots, ne sont pas neutres. Ou qu’il est bien dommage qu’un sondage par téléphone ne propose pas cinquante choix possibles au sondé. Et qu’offrir un double choix est une structure binaire -si ce n’est une alternative fallacieuse quand elle ne propose pas les souhaitables cinquante choix possibles au sondé.

Ou bien que le « ni l’un ni l’autre » est une réponse vague et peu engageante.

Ce qui n’est pas totalement faux.

Je n’ai jamais pu sentir les normands.

Oumma.com nous apprend aussi qu’en cas de panne de courant pendant la nuit, c’est la question « est-ce que tu as peur » qui déclenche cette dernière.

Ou que ce sont des faits divers dramatisés qui, depuis le 11 septembre 2001, donnent une mauvaise presse -et donc image- à l’islam et à ses pacifiques fidèles.

Ainsi, tout comme un sondage peut se révéler sécuritaire au lendemain d’un crime horrible ou humaniste au lendemain de la publication d’un livre sur les conditions de vie en prison, la perception de l’islam par les français varierait fortement au gré de l’actualité.

Un jour, un attentat. Le lendemain… Un attentat. Le sur-lendemain… Un attentat. Le sur-sur-lendemain… Ah. Tiens. Un enlèvement de journalistes français.

Notez que c’est un considérable progrès.

Et qu’ainsi, avec un peu de chance, on devrait en voir la répercussion dans les sondages.

A moins, et ce sont des hypothèses un peu folles que je vais formuler, qu’une bonne partie des français pensent tout à fait sincèrement et rationnellement que l’islam représente une menace pour ce pays. A moins que les évènements ne possèdent des répercussions et que celles-ci durent dans le temps. A moins que la brillante conjonction entre un terrorisme se revendiquant de l’islam et d’autres revendications grandissantes, communautaires celles-ci, des musulmans dans les pays européens, n’ait quelque peu joué dans la perception de cette religion de paix et d’amour dans les pays européens.

A moins que ce sondage, tout aussi idiot qu’il soit -et ils le sont presque tous- ne puisse pas rayer le fait que l’islam constitue bel et bien une menace. Et une menace qu’un grand nombre de français ont identifié.

Malgré tout.

Les français n’ont pas été trompés par les médias et manipulés par les instituts de sondage. Il se trouve même qu’ils n’ont pas attendu un article d’oumma.com pour être déçu un jour ou l’autre par le résultat d’un sondage et donc se faire leur idée sur la qualité de ceux-ci et les biais de cette méthode d’appréciation de ce qu’il est convenu de nommer l’opinion publique.

Il n’y a pas de dupes ici.

Chacun a très bien compris quelle était la question et de quoi il s’agissait vraiment.

Ce résultat est-il alors seulement expliquable par une véritable libération de la parole, cette fameuse décomplexion sarkozyste ? Sans doute pas. Le score non négligeable du ni l’un ni l’autre étant le signe que la population gênée sur ces questions, incapable de faire son petit acte citoyen en disant que l’islam est une richesse mais trop culpabilisé pour avouer que l’islam n’est pas intégré, perdure. Il est donc bel et bien le signe d’un ras-le-bol massif et impossible à masquer à l’encontre des revendications et de la visibilité grandissante des musulmans en France.

Et j’ai l’impression qu’ils le sentent.