Paraît-il…je ne sais pas trop d’où vient cette croyance populaire…la première fois que j’ai lu cette phrase c’était dans le maître et Marguerite, j’ai bien aimé ce bouquin…ça m’avait bien botté un chat qui picole un verre de whisky…paraît tout aussi raisonnable que moi me sifflant une bouteille de lait…Donc les manuscrits ne brûlent jamais…c’est tellement vrai qu’on a un mot pour décrire le contraire, l’autodafé…demandez à Torquemada et aux autres ce qu’ils en pensent des autodafés…on pourrait tout aussi bien dire un feu de joie…
On estime que Sophocle a écrit plus de cent tragédies dont sept nous sont parvenues…dont Oedipe qui a fait la fortune de Freud…Mais que valaient Oedipe ou bien encore Antigone dans la somme de Sophocle, furent-elles ses pièces majeures, si majeures qu’elles nous sont parvenues…ou bien des oeuvres mineures dans la totalité…donc on a peine 5% de l’oeuvre de Sophocle alors que la totalité des écrits de Florian Zeller et Angot resteront rien que du fait du dépôt légal…et je crois que c’est pareil pour Eschyle et Euripide…
Donc les manuscrits ne brûlent jamais quand bien même l’incendie de la bibliothèque d’Alexandrie…
Dans un film, Brooklyn Boogie je crois, un type raconte comment calculer le poids de la fumée d’un cigare. Suffit de le peser, de poser les cendres dans une balance avec le mégot et de faire la différence…simple. Plus tard; une autre anecdote est racontée; dans le même film ou dans un autre, peu importe…un écrivain russe travaille depuis des années à son chef d’oeuvre, seulement, il est de Stalingrad et puis il est pris dans la bataille et a accumulé des réserves de tabac…mais il n’y a plus trop de papier dans la ville en 1942, alors il roule son tabac dans son feuillets et fume sans remords aucun…car il sait que les manuscrits ne brûlent jamais…
Dans Les possédés de Dostoievski, il y a deux passages remarquables…Le suicide de Kirilov, il désire se donner la mort parce que c’est son idée. Il croit en la nécessité de dieu et a conscience qu’il n’existe pas…et cette contradiction le mène au suicide…cette scène me rappelle celle de la veillée funèbre du Staretz Zossime dans Les frères Karamazov…le bonhomme aurait été un saint toute sa vie et quelques heures après sa mort, se dégage une odeur putride, alors que l’odeur de sainteté aurait dû embaumer la salle…nait un doute terrible chez les témoins de cette scène, et je pense qu’Aliocha est également atteint bien qu’il ne le montre pas…mais revenons au deuxième moment des Possédés, et à nos pages qui ont brûlé ou censuré…la confession de Stavroguine donc…
Trois jours se passèrent encore et je retournai à la Gorokhovaïa. La mère se préparait à sortir avec un gros paquet ; le père n’était pas a la maison, naturellement ; je restai donc seul avec Matriocha. Les fenêtres (dans la cour) étaient ouvertes. Il y avait beaucoup d’artisans, dans la maison et tous les étages retentissaient du bruit des marteaux et des chansons. Une heure s’était déjà écoulée. Matriocha était assise le dos tourné dans son coin, sur un petit banc ; elle cousait quelque chose. Tout à coup elle se mit à chanter, doucement, très doucement ; cela lui arrivait parfois. Je tirai ma montre ; il était deux heures. Mon cœur se mit à battre fortement. Je me levai et commençai à m’approcher d’elle. Les fenêtres étaient garnies de géraniums ; le soleil était ardent. Je m’assis silencieusement à côté d’elle, sur le plancher. Elle tressaillit, eut épouvantablement peur au premier instant et se dressa brusquement. Je pris sa main et l’embrassai, la fis se rasseoir sur son banc et la regardai fixement dans les yeux. Que je lui eusse embrassé la main — cela la fit rire comme une enfant ; mais un instant seulement, car elle se dressa de nouveau, saisie d’une telle épouvante qu’une convulsion passa son visage. Elle me regarda avec des yeux atrocement fixes, tandis que ses lèvres se mettaient à trembler comme si elle allait pleurer. Mais elle ne cria pourtant pas. Je lui embrassai encore une fois la main et la pris sur mes genoux. Elle eut alors un mouvement subit de recul et sourit honteusement, mais d’un sourire oblique. Tout son visage rougit de honte. Je ne cessai de rire et de lui murmurer quelque chose. Enfin, il se produisit une chose si étrange que jamais je ne l’oublierai et qu’elle me frappa d’étonnement. La petite fille entoura mon cou de ses deux bras et se mit elle-même à m’embrasser ardemment. Son visage exprimait le ravissement. Je me levais presque furieux ; cela m’était désagréable de la part de ce petit être, et puis, j’eus aussi subitement pitié… »
Le feuillet finissait là et la phrase s’interrompait. Il se passa alors un fait qu’il est nécessaire de relater.
La dernière phrase n’est qu’une bouffonnerie d’éditeur…je comprends qu’il ne puisse pas publier le feuillet, mais je ne peux me résoudre à croire que Dostoievski ne l’a pas écrit ce feuillet…et je voudrais savoir où il est passé…le légataire testamentaire l’a-t-il cramé…? Dort-il dans un coffre fort??
et puis plus tard dans un autre feuillet de la confession, Stavroguine ne laisse guère de doute au lecteur…
Cependant je ne cessais pas d’attendre quelque chose. Et en effet, vers onze heures du soir, je vis accourir la fille du concierge que m’avait dépêchée ma propriétaire de la Gorokhovaïa pour me dire que Matriocha s’était pendue. Je suivis la fillette et pus constater que ma propriétaire ne se rendait pas compte elle-même pourquoi elle m’avait fait venir. Elle sanglotait et criait comme font ces sortes de gens en pareil cas. Il y avait du monde, des agents de police. Je laissai passer un moment, puis je sortis.
Il y a plein de manuscrits qui brûlent, qui disparaissent, même dans la bibliothèque de Babel…et pourtant on est intimement persuadé du contraire…j’en accorde l’explication à Max Brode…qui trahit son ami Kafka pour ne pas trahir l’humanité…mais combien n’ont pas trahi leur ami?
Dans un film, Brooklyn Boogie je crois, un type raconte comment calculer le poids de la fumée d’un cigare. Suffit de le peser, de poser les cendres dans une balance avec le mégot et de faire la différence…simple.
On dirait du Dominique Voynet. En moins rigoureux.
Le suicide de Kirilov n’advient pas exactement à cause du débat que vous pointez.Certes, sa réflexion part de l’idée que Dieu est indispensable, mais qu’Il n’existe pas. D’accord. Mais ce n’est pas la tension entre ces deux évidences qui le pousse à l’acte, c’est parce qu’il estime avoir trouvé la réponse à cette tension Et a Dieu.Le premier homme qui accomplira un suicide absolument pur, désintéressé, en toute conscience, « deviendra Dieu ».L’homme qui ne se tue pas est arrêté par la crainte, la peur du châtiment dans l’autre monde.Celui qui se tuera pour détruire cette crainte, avec une liberté absolue sera le surhomme, le porphète d’une humanité libérée de la peur de la mort. Et personne n’aura à le suivre sur cette voie, il aura libéré l’humanité.Christ du suicide (ce qui pourrait bien nous mener à la théologie du suicide de Dieu, le christ ayant toujours su quelle serait sa fin. C’est un des grands questionnement théologique). L’acte de Kirilov, -les raisons qui le poussent à le commettre -, engage quelque chose d’énorme.
Il reste,quoi, un tier d’Euripide… (Aristophane, dans « Les oiseaux »n a mis en scène de manière hilarante l’un des débats préférés des grecs, notre corneille/racine version hellène : « lequel est le meilleur de Sophocle et d’Euripide »,sachant que Sophocle représente la tradition, la parole enracinée dans une pensée de la cité, Euripide étant bien plus « psychologisant », n’hésitant pas à mettre en scène la relativité des points de vue. Le fatum n’est plus le maître, les passions humaines sont motrices, on commence la marche vers les moralistes français (et donc Nietzsche)-simplification extrême mais bon…Bref, l’homme travaillé par sa complexité apparait chez Euripide. Chez Aristophane, c’est Dionysos lui-même,Dieu du théâtre, qui mène le débat. Il y a là une fabuleuse parodie de la classique descente aux enfers,ainsi que de la religion orphique.Grâce à ça on en sait un peu plus sur celle-ci).
Eschyle aussi a morflé sévère. Sur le pouvoir et la vision grecque de celui-ci via Zeus (cequi apportait aussi des réponses sur celui-ci, manquent les capitales deux dernières parties de la trilogie sur les rapports Prométhée/Zeus. Car si ça débute par « Prométhée enchaîné » et l’antagonisme, après devait intervenir une réconciliation, à mesure que Zeus murissait et se rapprochait de l’idéal d’un monarque bienfaisant.
Pour en revenir au manuscrit, on peut regretter sévère le Journal de Byron que ce dernier, mourant, avait confié à un ami qui s’empressa de le communiquer à la femme de Byron…Brûlé! Une bonne partie du Journal de Renard a ainsi été épuré par la veuve furieuse de découvrir ses histoires de cul. On sait comment l’Eneide a failli finir (lire le magnifique Herman Broch « La mort de Virgile »), on a perdu pas mal de Tacite. Pour moi, l’un des plus tristes ensevelissement est celui de l’intégral du Satiricon qui devait être colossal quand on sait qu’on ne possède qu’une infime partie. Mais le plus atroce finalement est peut être la perte de « La chasse spirituelle de Rimbaud ».
Ps Je n’ai pas ici mon exemplaire du Maître… -ah l’ancienne couverture en biblio poche tellement plus belle avec ses cornes et son masque rouges!- mais il faut se souvenir que Boulgakov vivait avec la hantise de voir son manuscrit détruit…Et de fait il s’en est fallu de peu.Il avait lui-même dû brûler un premier manuscrit.tout cela compte dans l’imaginaire d’une œuvre ,non? que Boulgakov se soit rassuré grâce à une version platonicienne de l’idée de manuscrit, on le comprendra. Évidemment un poil d’empathie est nécessaire (et de connaissance de production de l’œuvre, si, si.Au fait j’espère que la prochaine fois vous direz que « Les mémoires d’outre-tombe » chères à Xp vous bottent bien « parce qu’il y a un type qui se tape une sylphide, ,tout à fait mon genre », noterez-vous sarcastique. ah, cet humour visant à saper les bases de notre société… tss, tss, jeune zazou.).
en passant, on aura un souvenir ému pour la perte des deux premiers manuscrits d’Au dessous du volcan l’un oublié dans une cantinas par l’auteur téquilé,l’autre… brûlé dans l’incendie de sa baraque. « Les livres ont leur destin », les manuscrits aussi.
Bon sang Cherea (et Restif), vous avez un tas de références culturelles vous, mon vieux… moi je dis, on ne brûlera jamais assez de livres pour que j’ai un jour l’air cultivé, et je remercie toutefois les nazis pour l’effort fourni en ce sens… pas que les nazis d’ailleurs (des espagnols et des grecs et la providence aussi vous dites) si j’ai bien tout compris (Fichtre, me voilà de plus en plus intelligent grâce à tous ces fascistes)…
John,non d’un p’tit Ramone, y a l’époque Valstar éventée (piquée à Ballard) et colle à rustine (mais là, c’était déjà interdit et en passe de devenir légendaire),et puis l’époque cuistruiro-vieille-barbe Nuit saint Georges Mouton Rotschild ! « Des Berus à Debussy, itinéraire d’un enfant du siècle ».
Ps le clochard au subutex c’était moi! Ah, j’ai un peu changé depuis…Nostalgie.
John,non d’un p’tit Ramone
Et je dirais même : Non d’un p’tit Ramone et d’un Johnny Rotten inspiré ! Saint Joe Strummer priez pour nous.
« Joe Strummer priez pour nous » – Ah les Clash ! Jésus en spiky hair, que c’était BEAU !! quelle claque que cette première écoute de London Calling! « I’m all lost in the supermrket/i can no long shop happily/’Came in hear for the special offer/Garanteed personnality (…) I empty a bottle and i feel a bit free » -sa voix qui déchirait, habitait tous les crépuscules, ceux du dehors … et les autres.
Là où il est j’espère qu’il s’est fait pote avec le Sid (entre autres pirates des Caraïbes intérieures).
Notre camarade John Terby doit avoir de plus récentes liturgies…A chacun sa Vulgate, qu’importe, certaines foudres ne changent pas.
(rha, mais comment met-il la citation en gras?)
« (rha, mais comment met-il la citation en gras?) »
hu hu hu hu !
http://werbach.com/barebones/fr_barebone.html
[b]Merci!![/b] (bon, on verra hein…)
on oublie (« ils sont trop verts et bon pour les babas »)
Petit scarabée avoir passé la première épreuve du Dragon Ancestral…
Misérable fragment de fiente de Yack se mirer dans la Sagesse du maître. Om mani padme hum.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Om_mani_padme_hum
(vous voyez John, où ça mène le punk rock!)