Le patriote français que je suis se réjouit tout naturellement de la défaite fracassante de l’équipe nationale de football du Frankistan, pareil à ce que toutes choses égales par ailleurs, les futurs compagnons de la libération se félicitaient du sabordage de la flotte française à Toulon, souhaitaient voir la France légale se prendre taule sur taule et devenir la risée du monde jusqu’au débarquement US et la libération du territoire par l’Etranger.
L’explosion en vol de son équipe nationale de balle au pied constitue un évènement majeur de la vie politique frankistanaise, tant elle devait lui servir d’appartement témoin tout autant que de village Potemkine. Or, si je crois la population de ce vieux pays bien trop pourrie et vermoulue pour que le moindre événement lui donne des envies de sursaut, je pense néanmoins qu’il s’est passé quelque chose de décisif : le village Potemkine s’est effondré sous les yeux d’un bon milliard d’occidentaux, et les Frankistanais auront beau répéter en boucle les explications que leur suggèrent leurs Maîtres, il n’empêche que de Rome à Moscou, nos frères de civilisation se marrent et n’ont pas fini de se marrer devant l’explosion chaplinesque de l’usine à gaz des Mongaullo-Souverainistes arrogants que nous subissons au pays… Ils ont vu la France qui gagne non seulement perdre et reperdre, mais aussi ses représentants se menacer les uns les autres, ouvrir publiquement la chasse au traître, se battre devant les caméras, se faire des doigts et se comporter sommes toutes comme on doit le faire dans les rues sombres de Bamako. Les jacobins peuvent d’ors et déjà remiser leurs panoplies de grands prêtres, ils sont désormais cantonnés dans l’ emploi de repoussoir et ne sont pas près de s’en voir confier un autre.
La propagande métissolâtre, nous allons encore la subir, mais nous saurons désormais être sous le joug de roitelets dérisoires qui par delà nos frontières serviront toujours plus de défouloir aux rieurs, de communistes albanais persuadés d’avoir raison contre tous et d’entraîner le monde avec eux, et bientôt, seule sa soeur de lait la poisseuse Belgique francophone continuera de trouver du charme à la vieille jacobine vérolée.
Ici, au Frankistan, les lois réprimant la liberté d’expression ne seront bientôt plus d’aucune utilité, et ce n’est même pas la peur du gendarme ou du papier bleu ni la crainte du bannissement social qui empêchent les gens de dire ce qu’ils voient de leurs yeux, car ils ne voient plus rien de leurs yeux et s’acharnent à enfiler des lieux communs avant même que le Moloch ne fronce les sourcils.
C’est ainsi qu’à propos de la débandade frankistanaise à la coupe du monde de football, on entend des âneries par paquets, et je me suis amusé à en recenser quelques-unes :
Les joueurs auraient été pourris par le fric….
Comme si les milliardaires argentins ou italiens se faisaient corriger balle au pied par des africains ou des coréens qui ne jouent que pour le drapeau…
Il manquait à cette équipe le sens du collectif…
Comme si tous ces joueurs n’avaient pas fait leurs classes et gagné leurs galons dans des clubs qui ne misent que sur leur individualisme et leur amour du fric.
Cette billevesée témoigne d’ailleurs plus généralement d’un attachement fétichiste et superstitieux en la croyance socialiste selon laquelle les plus belles réussites collectives seraient autre chose que des amoncèlements d’égoïsmes qu’on a eu la sagesse de ne pas contrarier ni engluer dans des projets collectifs à la con… la France ressemble à la chambre de la malade communiste de Good Bye Lenin, nous y coulons des jours crasseux dans un monde parallèle où les travailleurs des pays bourgeois fuient en masse vers la Roumanie ou la Pologne pour échapper à la misère tandis que la firme Coca-Cola se voit sauvée de la faillite par des soviets ne sachant plus quoi faire de leurs roubles, et nous croyons vraiment qu’une équipe qui gagne, c’est une équipe à laquelle on a insufflé l’amour du maillot.
Ces joueurs arrogants seraient les symptômes de ce qu’on ne se serait pas soucié de leur éducation…
Comme s’ils n’avaient pas fréquenté les rangs des écoles bien plus que Raymond Koppa, Platini ta grand-mère ou la mienne, comme s’ils ne pouvaient s’endormir en comptant tous les éducateurs gauchiasses qu’ils ont croisés sur les stades depuis leurs premiers coups de pied….
Ils traineraient la pauvreté de leur milieu d’origine ou le déracinement de l’immigré à la semelle de leurs crampons, et c’est cela qui les rendraient asociaux…
Comme si Anelka, le plus tête à claques et le plus haineux d’entre tous n’était pas le fils de fonctionnaires de l’Education Nationale venus des Antilles françaises, soit sociologiquement un français de la classe moyenne et historiquement un français de vieille souche….. On ne dira jamais assez combien la sociologie et l’histoire sont des disciplines de seconde main…. Anelka nous le prouve par sa seule existence, lui qui nous démontre combien un Francais bien nourri, gâté par l’existence, dont la famille est enracinée dans une des régions les plus catholiques du pays et administrativement affiliée à lui depuis trois siècles va tout naturellement se lier davantage avec un arabo-musulman fraichement débarqué qu’avec un petit normand ou un alsacien, s’il n’est pas un européen ethnique…
On ne leur aurait pas inculqué l’amour du drapeau…
Comme si eux et nous n’en n’avions pas bouffé ad nauseam, de ce drapeau tricolore sensé nous endrapper tous ensemble et comme s’il n’existait pas des lois répressives interdisant ne serait-ce que de sous entendre que les français de couleur ne seraient pas forcément les plus beaux enfants de la République….
L’entraîneur de l’équipe aurait été mauvais…
Comme si ce genre d’ erreur de casting pouvait provoquer autre chose qu’un banal échec dans une compétition telle que les plus prestigieuses équipes en essuient une fois sur trois, et comme si ces joueurs n’avaient pas perdu pour avoir tout naturellement transformé leurs vestiaires en galerie commerciale du 9-3.
Pour le dire d’une phrase, nous subissons et relayons une propagande totalitaire. L’extraordinaire faillite de cette équipe démontre que nous avons été entraînés dans le délire d’un dément, en croyant faire surgir un peuple ex nihilo par l’engloutissement dans l’Education Nationale des sommes aussi folles que celles consacrées jadis par les soviétiques à la guerre des étoiles, en nous gavant de valeurs communes, de République, et de bleu blanc rouge… Mais à l’instar des communistes qui expliquaient la faillite du communisme par une carence de communisme, nous répétons comme des ânes que les joueurs de l’équipe de France ont perdu pour avoir été trop individualistes, pas assez éduqués dans leur jeunesse, pas shootés au patriotisme, pas assez gavés de France Black Blanc Beur, et que sommes toutes, si le métissage ça ne marche pas, c’est que nous n’avons pas assez donné dans le métissage et pas assez fait pour qu’il advienne et triomphe.
En vérité, ils ont perdu car ils se se foutent de l’équipe de France et s’en foutent à bon droit, parce que n’étant pas de cette Europe qui va de Dallas à Sydney et partait jadis du Cap pour ne s’arrêter qu’à Helsinki, ils ne sont pas français… Ce sont des égoïstes, comme les joueurs italiens, suisses ou danois, lesquels défendent égoïstement leur drapeau car précisément, il s’agit du leur.
On apprend pas à aimer sa femme, sa famille, ses amis ou sa patrie, on a une femme, une famille, des amis ou une patrie, et on défend son bien…. S’il vous faut apprendre à aimer votre femme ou votre pays, c’est qu’ils ne sont pas les vôtres et que la plaisanterie finira dans un divorce fracassant… Des polonais, des juifs ou des italiens sont devenus français hier, et la greffe a pris justement parce que jamais, ils n’ont eu le moindre effort à fournir pour qu’elle prenne.
Tout cela, nous pourrons le dire ailleurs qu’ici, après la libération, quand nous aurons tondu Plenel et arraché la moumoute de Pascal Boniface…
J’ai bien regardé… Il a une moumoute, Pascal Boniface.
Très bon, à une chose près. L’esprit collectif est bon au sein de l’équipe même, c’est indéniable. Je comprends ta défense de l’individualisme et ta méfiance devant la notion de « valeurs communes », mais on voit bien que les équipes dont les joueurs sont frères entre eux peuvent aller très loin, même si leur technique est limitée.
Ces mecs n’aiment pas jouer ensemble et ne joue que pour eux, et je ne crois pas qu’au sein d’un groupe aussi petit, le meilleur vienne de la somme d’égoïsme non-contrariés. Il faut savoir donner sa balle, faire des sacrifices, deviner où l’autre se placera en un regard. Lorsqu’une équipe balaye le terrain d’un mouvement fluide et que les 11 hommes semblent ne former qu’un corps, ça devient magique. Mais l’alignement d’individualités même talentueuses n’a jamais gagné sur le long terme. Dans les clubs comme dans les équipes nationales, je pense à la Lazio de Rome là, enfin bon…
La fraternité ne se décrète pas. Elle existe déjà, elle EST, et éventuellement elle se renforce ou se délite au fil des événements, des sacrifices et souffrances en commun.
Si le Barça arrive à produire ce jeu hallucinant c’est d’abord et avant tout parce que c’est le corps et l’âme de tout un peuple, le peuple catalan, et que les organes les plus vitaux de ce corps sont toujours des enfants du pays, catalans pur sucre, gavés depuis l’enfance à la culture football du barça, éduqués comme on le faisait à Sparte de la caste des guerriers, et qui tiennent ensuite la barque, l’équipe dans son ensemble, par le couilles et le cerveau. Encore plus quand le coach est du cru comme c’est le cas actuellement.
Après y’a des mercenaires qui sont violemment plongés dans le mythe. Certains s’assimilent et font corps, pour bien d’autres la greffe ne prend et ils sont rejetés.
Au passage (j’ingore si c’est toujours le cas de nos jours), à l’époque où Lizarazu y avait signé, l’Athletic Bilbao ne comptait que des basques dans son effectif. L’Espagne est une autre planète que notre pays.
L’Athletic continue toujours de n’accepter dans ses rangs que des joueurs nés ou formés dans le Pays Basque ou en Navarre. Lizarazu est né dans le Pays-Basque Français.
Ils ont un hispano-vénézuélien, actuellement, mais né de parents basques et formé au Pays-Basque.
Merci XP d’avoir pointé tous ces lieux communs désolants.
Quand il était joueur (années 70-80), Domenech arborait une moustache en hommage à Staline. (voir photo ici : http://snake7.over-blog.com/article-19824979.html) Ce type a toujours été un tyran arrogant et incompétent, à l’image de son maître.
Moi je considère que l’insulte d’Anelka a été la meilleure chose que ce mondial de foot nous ait donné à voir. Et même le boycott de l’entraînement m’a fait plaisir. Après tout, les bleus ont réussi l’exploit extraordinaire de choquer la bien-pensance médiatique et je leur tire mon chapeau. En disant merde à Domenech et à toute la clique, ils sont sortis la tête haute, même si on s’est acharné à les culpabiliser et à les désigner à la vindicte. En fait Domenech a fabriqué un système qui lui a pété à la gueule… bien fait pour lui !
« Moi je considère que l’insulte d’Anelka a été la meilleure chose que ce mondial de foot nous ait donné à voir. »
Curieux. Un universitaire qui commence ses phrases par « Moi je ». C’est la première fois que je vois ça…
[Pour la petite histoire, j’ai souvenir de M. Darriulat, professeur de littérature comparée (entre autre) à la Sorbonne, qui abordait souvent la question du « moi je » avec ses élèves… Non sans une certaine bonté d’âme – à lui coutûmière -, il assurait que le « moi je », employé aujourd’hui à tout bout de champ par le vulgus pecum français, avait une signification en quelque sorte « secrète ». En faisant machinalement figurer la plus piteuse des entrées en matière au début de chacune de ses phrases, le « français de base » semblait désespérément implorer son auditeur : « Excusez-moi d’exprimer un jugement, je sais que c’est mal de critiquer, mais rassurez-vous ce jugement n’est qu’une opinion, il n’engage donc que moi »…
Cet « excusez-moi de penser » réflexe, dans toute sa pénible impuissance à vouloir corriger la propension éternelle, historique, voire « génétique », du « froggy »-de-base à donner son avis sur tout et à faire de la philosophie de comptoir, était – très sérieusement – selon le bon professeur, le symptôme d’une conjonction de phénomènes sociaux problématiques. Ce « gaulois de base » se trouvait, d’après lui, intellectuellement pris en étau entre deux phénomènes : d’une part le point de vue prépondérant en son pays de l’intellectuel « upper-class », selon qui le jugement d’un « beauf » n’a jamais eu aucune légitimité, de l’autre, l’idée typiquement protestante (ou anglosaxonne), constitutive de l’idéologie « cosmopolite/mondialisée », selon quoi, (pour faire volontairement court), « critiquer, c’est nuire », « porter un jugement, c’est mal », « hiérarchiser c’est faschiste », et « niveler, c’est bien ».
J’ai envie d’ajouter aussi que les femmes, même d’extraction bourgeoise, sont particulièrement prédisposées au « moi-je ». Par expérience, je puis témoigner que c’est souvent l’habitude d’être « rembarrée » par un père, un frère, un époux, voire même nos meilleurs camarades de jeux d’esprit, lorsque nous donnons notre avis en matière de politique ou de philosophie, qui induit chez nous le réflexe conditionné du « je m’excuse mais » – « mais moi je pense » (- « Non, pas sur la tête! Pas les cheveux! Pouce! »)… Le « moi-je » signalant au final bien davantage la présence d’un complexe d’infériorité – type : celui de la désirable blonde pulpeuse supposément idiote, ou celui du vilain « Lebedev » Dostoïevskien – que celle d’un narcissisme primaire… Le narcissisme véritable survenant bien plus souvent – le mythe antique est particulièrement transparent là-dessus – chez les êtres exceptionnellement doués, beaux, et certains de leur pouvoir sur les autres, mais c’est là un autre sujet]
Enfin, je vois bien une explication, pour clore cette entrée en matière un peu longuette, à votre emploi du « moi je », c’est tout simplement que vous ne connaissez pas grand-chose au football (ce qui est tout à votre honneur ^^), que vous peinez à oublier complètement qu’il s’agit d’un sujet fondamentalement vulgaire, que vous ne résistez cependant pas, vue l’actualité, « à faire comme tout le monde » (ce qui est toujours humiliant pour un philosophe), c’est-à-dire à vous salir les mains à l’aborder quand même, mais que cela irrite un vieux fond de snobisme bien légitime chez vous… Et (si je suis dans le vrai), c’est une chose dont je vous sais gré.
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« Moi je considère que l’insulte d’Anelka a été la meilleure chose que ce mondial de foot nous ait donné à voir. Et même le boycott de l’entraînement m’a fait plaisir »
Outch! – Avez-vous jamais visionné l’une des vidéos où l’on peut voir et entendre les joueurs vedettes de cette équipe, comme Anelka, justement, ou encore Ribéry, déjà lorsqu’ils étaient mômes, s’aboyer après, jetés les uns sur les autres, exactement comme le font les sauvageons de banlieue, se battre de façon incessante entre membres de « clans » raciaux opposés, n’hésitant pas à lancer au besoin un « sale français » appuyé à celui des mômes dont la couleur de peau est la plus claire? N’avez-vous jamais vu le T-shirt imprimé du drapeau algérien que portait dans les gradins du stade du Mondial, la radasse ignoble de celui qui se paye des pré-ado maghrébines, refaites de pied en cap, et teintes en blond-Barbie – parce que, à raison, il les trouve sûrement encore moins vulgaires que sa femme ?
Mais enfin, assez d’angélisme ! Il faut voir que ces gens-là ne sont pas comme nous ! Ce sont des enfants sauvages que l’on n’a pas pris soin d’éduquer. Parce qu’on leur a d’office promis la lune s’ils jouaient bien, parce que eux-mêmes sortis du ruisseau, n’aspiraient bien sûr à rien d’autre qu’à la « thune », et que les présidents d’associations sportives dont les gosses allaient naturellement dans des pensionnats privés d’élite, on trouvé ça « bien suffisant pour ces petits primitifs », parce que, chevaux de course qu’ils étaient, ces descendants d’africains tenaient la force physique pour supérieure à celle de l’esprit, et que dans un mépris à la fois inconscient et total pour eux, par utilitarisme aussi, on n’a pas jugé bon de les détromper, c’est-à-dire qu’on n’a pas jugé bon de les hisser du statut de ce statut ignoble de bestiaux de compétition, à celui d’hommes ; parce qu’on ne les a pas jugé dignes du « Un esprit sain dans un corps sain » antique ; parce qu’on n’a jamais eu le courage et surtout la longueur de vue, de travailler à développer une autre forme d’intelligence chez eux que celle de leur pieds. Parce qu’on n’a pas eu les « cojones » de leur faire le chantage formateur du : « Quand tu auras fini ta dissertation, et si tu obtiens une note supérieure à 12/20, tu pourra retourner jouer au ballon rond avec tes camarades. » Parce qu’on n’a pas donné à leur prof de français et à leur prof d’histoire le droit de retarder indéfiniment la carrière footballistique de ces singes, s’ils refusaient de se rendre dignes de représenter la France et de chanter son hymne, le jour venu où ils gagneraient éventuellement la coupe du monde. Parce que ces débile-mentaux acculturés à qui l’on a fait porter notre drapeau, et à qui l’on a ainsi donné le pouvoir de le souiller, n’ont jamais appris ni la discipline, ni la frustration, ce sont aujourd’hui – résultat d’un grand laxisme généralisé – de très mauvais sportifs !
Croyez-vous que lorsqu’un entraineur brésilien a recruté Ronaldo dans les favelas, il s’est contenté de lui dire : « Vas-y, fais-toi plaiz’, marque des buts, t’auras un chèque » ? Evidemment que non, sinon Ronaldo ne serait pas là à écrire des films en association avec son grand fan Kusturica, pour tenter de nous transmettre sa naïve (et pourtant « vraie », car vécue) philosophie du « Le Futcheball m’a sauvé, il fait de moi un Jésus et il m’a crucifié pour donner l’exemple. Le Futcheball est Dieu. »
J’ai entendu récemment Jeannie Longo expliquer très clairement cela dans une émission télévisée : la tendance actuelle du sport est de miser sur la technique, ce qui n’a rien de mal en soi, mais cela se fait au détriment de l’intelligence (et donc de la liberté) du sportif. Par exemple, elle raconte avoir longtemps couru sans oreillette – c’était le cas de tout le monde autrefois, tout simplement car cette technique n’existait pas encore. Le cycliste, alors, n’était pas cet espèce de hamster décervelé branché en permanence sur les délibérations d’un consortium de spécialistes penchés – en temps réel – sur la carte du terrain. Jeannie Longo étudiait elle-même son itinéraire avant la course, tâchait d’en retenir les spécificités par cœur (gros travail de mémoire), et décidait seule, avec pour unique critère d’expertise le fait qu’elle connaissait très bien son corps, quand accélérer, quand décélérer, quand lâcher du terrain à l’autre, quand serrer à gauche/à droite, afin d’optimiser ses forces… etc. C’est ainsi que cette femme d’exception n’a pas simplement gagné beaucoup de médailles, mais a gagné avec honneur, et s’est aussi forgé, dans la foulée, un art de vivre qui lui est propre.
« Après tout, les bleus ont réussi l’exploit extraordinaire de choquer la bien-pensance médiatique et je leur tire mon chapeau. »
Je ne savais pas que la vocation des footballeurs était de « choquer la bienpensance médiatique » ; je pensais juste que leur job était de marquer des buts.
« En disant merde à Domenech et à toute la clique, ils sont sortis la tête haute, même si on s’est acharné à les culpabiliser et à les désigner à la vindicte. »
Avez-vous fait l’armée, Nicomaque ? Mon père, qui est né en 44, l’a fait. Et durant dix-huit mois, s’il vous plait (seulement dix-huit mois car il a obtenu une dérogation parce qu’il était déjà, à 19 ans, soutien de famille). Mon père, qui est pourtant un horrible gauchiste, le fils de l’un de ces « sales communistes » que vous aimer tant à insulter – un « sale communiste » qui a quand même été envoyé en camps durant la guerre, pour ses convictions politiques (avec les juifs, eh oui !), et s’est suicidé quelques années après, tout simplement parce qu’il ne pouvait ni renoncer aux idéaux au nom desquels il s’était battu pour sa patrie, et avait payé son lot de souffrance, ni accepter de cautionner le monstre sanguinaire qu’était devenu son communisme chéri en URSS, au regard duquel, en tant que contestataire, il allait bientôt être étiqueté à son tour « ennemi de la liberté ». Mais bref, sur ce sujet, il y aurait beaucoup à dire… Mon père, donc, qui est un horrible gauchiste (une « pastèque » pour résumer la chose grossièrement), et qui a aussi fait l’armée, ne se lasse pourtant pas de raconter avec chaleur, à qui veut l’entendre, ce qu’il y a vécu (et surtout de dire des choses auxquelles vous autres ne vous attendriez pas forcément de la part d’un gauchiste, tout simplement parce que les gauchistes d’aujourd’hui sont profondément idiots, et que mon père est un homme d’un autre siècle qu’eux – il ne comprend d’ailleurs plus rien au nôtre).
Souvent il commence en parlant des conditions de vie extrêmement difficiles auxquelles les bidasse étaient soumis, il décrit les brimades, les efforts physiques permanent, ses cauchemars, ses crises de somnambulisme durant la nuit… Ensuite il raconte quand il a pris l’hélicoptère : un bruit énorme de boite de conserve bringuebalante, et « cet imbécile d’adjudant » qui faisait le kakou en travers de la portière coulissante laissée constamment ouverte, bras et jambes écartées de part et d’autre, au-dessus du vide… et du majestueux parc des volcans d’Auvergne. – Mon père reste tacitement fort impressionné par ce souvenir : lui, a le vertige. ^^ C’est alors que « l’imbécile d’adjudant », ce « sous-chef » qui abuse de son autorité (comprendre : mon père préfère tacitement les vrais chefs aux « sous-chefs »), en prend pour son grade : ce cruel personnage avait droit, à l’époque, à un certain nombre de pertes humaines, et il s’acharnait sur les faibles… Un pauvre gars qui n’était pas à la hauteur, trop maigre, mal nourri, avait failli mourir sous ses coups, à force d’être contraint par lui à ramper encore et encore, deux fois plus que les autres, sous les barbelés, dans la fange. [Là mon père fait rapidement allusion au fait que lui-même, par contre, bien entendu, était non seulement « à la hauteur », qu’il avait toujours aimé marcher, qu’il était le meilleur tireur de sa promotion et même que des officiers auraient voulu qu’il fasse une carrière, qu’en l’espace de quelques semaines de service il avait d’ailleurs gagné le premier grade de sous-lieutenant, mais que, de nature pacifique, au lieu de persévérer dans cette voie, et lassé d’être soumis à de mauvais traitement, il avait préféré faire valoir son statut « d’intello » de la compagnie, de façon à briguer le poste de « radio », c’est-à-dire de chargé des communications en morse avec la base, auquel poste peinard il était resté jusqu’au bout tranquillement semi-planqué.] Tout cela mis à part, et pour revenir au « petit chose », souffre-douleur de l’adjudant, j’ai entendu plusieurs fois mon père, son visage émacié tout rouge, ses yeux noir de jais étincelants comme ceux d’un loup, avoir ces mots très durs : « Je me souviens quand le pauvre gars s’évanouissait dans la boue ! La rage que je ressentais ! La rage pure ! Et j’étais pas le seul… Si j’avais pu – si on avait pu – si personne ne m’avait vu – les autres gars étaient avec moi – si j’avais pu me trouver seul avec cet adjudant [comprendre peut-être : si ç’avait vraiment été la guerre] ; je sais pas ce que j’aurais fait… Putain, je me retenais de l’étaler, de lui foutre un coup avec la crosse de mon fusil ! » Mais après cette tirade particulièrement violente, mon père conclue toujours avec un mot de plus, très confondant : « Tu sais, me dit-il, dans l’armée c’est une technique de commandement, ça aussi. Un adjudant qui se fait craindre, jusqu’à la haine, par ses hommes, paradoxalement, ça fait une compagnie soudée. La rigueur de la discipline fait qu’on se serre les coudes. De l’adversité nait la solidarité. »
Les hommes de Domenech n’étaient pas là pour le trouver « sympa », ni même « intéressant », ni même pour l’aimer ou approuver ses choix. Ils étaient là pour lui obéir, quoi qu’il arrive, même et surtout si le gars était vraiment con – rien n’est plus formateur qu’un maître à la fois con… et redoutable – obéir et avancer de façon militaire, à leur propre péril. Il fallait qu’ils lâchent prise, qu’ils soient dans un pur esprit de sacrifice à leur nation, à la façon dont les gladiateurs criaient dans l’arène : « Ave Caesar, Morituri Te Salutant ». La guerre est affaire de tripes, de crainte, et de bêtise virile. Les soldats qui pensent sur le terrain, c’est comme les femmes qui pensent dans l’amour, ou les acteurs qui réécrivent le scénario du film qu’ils doivent jouer. C’est une forme de décadence dont personne ne veut. La civilisation même n’en veut pas.
« [Domenech] a toujours été un tyran arrogant et incompétent, à l’image de son maître. »
Mais lol ! …Si seulement ç’avait pu être vrai. ^^
Si ça avait été vrai, nous n’aurions pas été vaincus… D’ailleurs j’abhorre furieusement le communisme de l’URSS. Mais on ne peut pas dire de Staline que c’était un mauvais stratège, ni un mauvais militaire. La Garde Rouge, c’étaient des lions !
« Quand il était joueur (années 70-80), Domenech arborait une moustache en hommage à Staline. »
Quand on veut tuer son chien… etc.
***
Ps : Je vous ai laissé un long commentaire sur votre blog « Nicomaque », à l’article qui parle du Père Sirico, me ferez-vous la grâce de le lire, et d’y répondre?
Pardon, me he equivocado, j’ai di « Ronaldo » au lieu de « Maradona ». Ce n’est pas du tout la même génération de joueur ; ceux qui ont suivi devraient m’avoir automatiquement corrigée.
Photo ici :
http://snake7.over-blog.com/article-19824979.html
http://snake7.over-blog.com/article-19824979.html
J’ai l’impression qu’il faut éviter de formater les liens en html.
Alors celui-ci est le bon :
http://snake7.over-blog.com/article-19824979.html
Cette autre photo n’est pas mal non plus :
http://www.football365.fr/france/equipe-de-france/article_428037_365tv-bleus-La-fausse-greve-de-Domenech.shtml
Excellent, XP… repris sur mon site avec liens et tout le toutim… et envoyé à ma NEWSLETTER… ^^
>>En vérité, ils ont perdu car ils se se foutent de l’équipe de France et s’en foutent à bon droit, parce que n’étant pas de cette Europe qui va de Dallas à Sydney et partait jadis du Cap pour ne s’arrêter qu’à Helsinki, ils ne sont pas français…
Mouais, raisonnement un peu simpliste. On dirait presque qu’ils ont fait exprès de perdre, à te lire. Et pourtant, même s’ils se foutent de la France, ils ne se foutent pas de leur propre image de loosers, c’est certain.
En réalité s’ils ont perdu c’est qu’ils n’ont ni sens de l’honneur, de l’abnégation, ni discipline et respect pour l’autorité (particulièrement quand celle-ci est blanche), comme toute caillera de banlieue.
Alors même que leur équipe majoritairement noire aurait dû les avantager sur le plan physique (musculairement et athlétiquement, le noir est indéniablement plus fort que le blanc) et sur le plan de l’esprit collectif fraternel.
Cependant, le football demande, outre les qualités énumérées plus haut, un grand sens de la stratégie et de la planification structurée. Ce qui n’est pas précisément un point fort de la culture (d’origine) africaine, comme en témoigne le fait que pratiquement tous les entraîneurs des équipes nationales africaines sont des blancs.
Lors
Lorsque cette structure stratégique blanche encadrant l’équipe n’est plus présente ou plus respectée, ça devient vite le bordel et l’esprit petite frappe refait surface
Ton raisonnement n’est pas spécialement complexe non plus, Grant. Et moins pertinent que celui d’XP.
En coupe du monde pas besoin de « faire exprès » de perdre pour perdre, il suffit de ne pas vouloir gagner, et c’est ce qui s’est passé. Leur image de looser ? Ces mecs jouents tous dans des grands clubs, ils s’en branlent. Quand ils vont rentrer au quartier, mieux vaut être un looser qu’un traître, c’est-à-dire avoir gagné pour le maillot bleu.
L’abnégation, le sacrifice de soi, ils ne le connaissent pas quand il s’agit de la France. Mais pour le Maghreb, ou contre les flashballs, t’en fais pas qu’ils veulent bien y laisser leur peau.
Bref j’te trouve très moyen là, le texte d’XP touche juste, c’est évident maintenant que le problème est là et pas ailleurs.
>>Quand ils vont rentrer au quartier, mieux vaut être un looser qu’un traître, c’est-à-dire avoir gagné pour le maillot bleu.
Oui, c’est un argument intéressant bien que légèrement paranoïaque. En te suivant, on peut se demander pourquoi Zidane a mis 2 goals en finale de la coupe du monde de 1998. Il a glissé deux fois de suite sur la même peau de banane et le coup est parti tout seul, je présume.
Tu me diras peut-être que c’est une autre génération, que la situation s’est empirée depuis (certainement) mais tu ne me feras jamais croire que ces petits cons de l’Equipe de France actuelle ne rêvaient pas chacun individuellement, dans leurs nuits les plus moites, de devenir « CHAMPION DU MONDE »… (« The world is mine » Scarface)
Cette débacle reste donc un mélange de jm’en foutisme (y compris à l’égard de la nation), de mauvaise éducation, et… je n’en démords pas d’un gros problème d’autorité, de stratégie et de structure.
Pourquoi les équipes africaines ne vont jamais très loin dans les coupes du monde ? Pourquoi l’équipe du Brésil n’est-elle pas uniquement constituée de Pelés ?
Probablement parce qu’il faut l’influence et l’esprit de stratégie et de discipline structurante de la culture blanche dans et hors de l’équipe pour gagner une guerre de ce genre.
>>contre les flashballs, t’en fais pas qu’ils veulent bien y laisser leur peau.
Voilà peut-être un début de solution pour le prochain entraîneur… 🙂
Judicieux choix pictural pour illustrer la Phrance … la Phrance défigurée. 🙂
Sur le fond, votre analyse est tout à fait juste. Evidemment. Même les plus demeurés sentent confusément que ce qui s’est passé dans cette micro-société qu’est une équipe de football (des gens d’ethnies, de religions, de cultures différentes, qui cohabitent et se découvrent allergiques les uns aux autres) pourrait prochainement se dérouler à l’échelle du pays tout entier. Et de manière nettement plus violente. Notons aussi que ce psychodrame sportif s’est produit le jour ou 9000 personnes d’origine asiatique ont manifesté, à Paris dans le quartier de Belleville, contre la délinquance arabe, dixeunt les organisateurs.
« Mais pour le Maghreb, ou contre les flashballs, t’en fais pas qu’ils veulent bien y laisser leur peau. »
Mouai, je ne suis pas convaincu. Nous ne connaissons pas les mêmes racailles. Celles de mon quartier ne restent jamais très longtemps quand les CRS où les flics équipés de flash-ball débarquent.